Compte rendu analytique officiel du 8 juillet 2009 : première séance

M. le président. La parole est à M. Yves Albarello.

M. Yves Albarello. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui dans son ultime version n’est pas du tout l’expression de la volonté de quelques-uns d’imposer coûte que coûte le travail le dimanche, comme certains esprits, mal informés, je l’espère, voudraient le faire croire. Elle est, au contraire, le résultat d’une très large concertation, qui a duré des mois et qui a permis aux opinions les plus variées de se faire entendre.

Elle traduit donc un compromis auquel ont abouti des parlementaires de bonne volonté et désireux d’être constructifs, un compromis équilibré qui, selon les propos de notre excellent collègue Marc Le Fur, initialement opposé à ce texte, doit « permettre de sortir de l’hypocrisie ». (M. Jean Mallot s’exclame.)

Monsieur Mallot, je ne vous ai pas interrompu…

M. Jean Mallot. Si !

M. Yves Albarello…et le président de votre groupe vient de rappeler combien il est important d’écouter les orateurs.

M. le président. Monsieur Mallot, je vais décompter vos interruptions de votre temps de parole !

M. Yves Albarello.
 Enrichissons-nous de nos différences pour faire évoluer le texte.

Car, actuellement, nous sommes véritablement dans l’hypocrisie.

M. Jean Mallot. Quel aveu !

M. Yves Albarello. En effet, nous savons tous que la vieille loi de 1906, votée dans la foulée de la loi de séparation et quelque peu conditionnée par celle-ci à l’époque, ne correspond plus du tout à la réalité actuelle. C’est tellement vrai qu’elle a été maintes fois remaniée, au point qu’elle est source d’incohérences, voire d’injustices, comme l’a souligné récemment le Président de la République.

On parle toujours des entreprises, jamais des salariés, monsieur le rapporteur. Or il y a une réalité concrète, celle des sept millions et demi de Français qui travaillent le dimanche, dont près de la moitié d’une manière régulière. Bon nombre d’entre eux sont en infraction avec la loi actuelle. Au moment où nous connaissons des difficultés économiques liées à la crise déclenchée il y a un an, n’est-il pas temps, n’est-il pas enfin raisonnable de leur donner la sécurité juridique nécessaire plutôt que de préférer, parfois pour des motifs fondamentalement idéologiques, les enraciner dans la précarité de l’emploi ? Car c’est bien à cela que conduirait une attitude négative d’hostilité de principe au présent texte.

Sachons aussi regarder plus loin. La France est un des grands pays touristiques du monde et les ressources que la fréquentation touristique apporte à notre pays nous sont absolument indispensables. Comment peut-on imaginer une économie faisant largement appel au tourisme tout en lui fermant la porte dans les faits en empêchant brutalement le travail le dimanche ?

Maire d’une commune d’Île-de-France à taille humaine, puisqu’elle compte 11 000 habitants, je suis quotidiennement confronté au problème. Le plus souvent, des personnes aux ressources modestes, des chefs de famille monoparentale, des jeunes couples, des étudiants, des personnes ayant perdu leur emploi viennent me trouver avec l’espoir d’obtenir un travail, même le dimanche, qui leur offrirait la possibilité de vivre, quelquefois même de survivre.

Il n’est pas question d’imposer le travail le dimanche.

M. Jean Mallot. Bien sûr que non : juste de le conseiller vivement !

M. Yves Albarello. Le principe du repos dominical subsiste. Mais, tout en le conservant, on doit pouvoir l’adapter à notre société, qui n’est plus la même qu’il y a un siècle.

La proposition qui nous est soumise est, sur ce point, très modeste et plus restrictive que les règles qui prévalent à l’étranger. Nous sommes en effet loin de ce qui se fait en Grande-Bretagne, où les commerces sont libres d’ouvrir tous les dimanches, et le texte est également plus restrictif qu’en Allemagne, en Italie, pays concordataire, ou encore en Espagne.

En outre, nous refusons que le travail le dimanche soit imposé aux salariés : il n’est concevable que sur la base du volontariat.

M. Jean Mallot. Vous voterez donc contre le texte !

M. Yves Albarello. L’accord du salarié est indispensable : nous respectons donc scrupuleusement sa volonté et sa liberté.

Enfin, en dehors des zones touristiques – dont la situation est très particulière et pour lesquelles toutes les précisions nécessaires devront être apportées lors de la discussion –, les salariés bénéficieront d’une rémunération double, avantage traduisant bien le caractère exceptionnel des dérogations au principe réaffirmé du repos dominical.

Mes chers collègues, il arrive un moment où le temps de l’élaboration des textes législatifs soumis à notre discussion doit prendre fin. C’est le cas de la présente proposition de loi. Nous avons été nombreux à y travailler depuis deux ans, remettant sans cesse sur le métier notre ouvrage, avec le souci de la perfectionner. Le résultat est à mon sens satisfaisant C’est pourquoi je voterai cette proposition de loi qui, tout en respectant un des engagements pris par le Président de la République lors de la campagne de 2007, apporte une réelle amélioration à une situation existante à laquelle il convenait de remédier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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