La proposition Mallié pour les nuls

La proposition Mallié 1254

La proposition Mallié a fait l’objet de nombreuses retouches (cf page précédente). Le Gouvernement n’étant pas sûr d’obtenir une majorité sur le texte de Richard Mallié, a réécrit complètement le texte initial, qui était pourtant passées par cinq versions précédentes, toutes pourtant « parfaitement équilibrées » suivant les dires de MM Bertrand et Chatel.

Ce revirement à 180° démontre que le texte Mallié, contrairement à ce que ses défendeurs voulaient faire croire, n’était pas le texte de peu d’ampleur dont il s’évertuaient à démontrer la « modestie » et le caractère « technique ». C’est bien un texte essentiel, dont l’urgence à été jugée supérieure à la loi sur le logement, par exemple…

 

Un résumé de la proposition Mallié, version 6.

Richard Mallié propose d’autoriser l’ouverture des centres commerciaux le dimanche, dans des « zones d’usage de consommation exceptionnel caractérisé par des habitudes de consommation de fin de semaine » des unités urbaines de plus d’un million d’habitants. En clair, le travail du dimanche serait légalisé dans toutes les zones où il était pratiqué illégalement auparavant.

La travail du dimanche pourrait aussi être légalisé dans les zones frontalières, en cas de concurrence de celles ci.

Les grandes surfaces alimentaires seraient exclues (On imagine bien la fragilité de cette exclusion, alors que le gouvernement n’arrive même pas à faire respecter la loi actuellement…)

En contrepartie, Richard Mallié :

  • inscrit le principe du volontariat dans la Loi : seuls les « volontaires » travailleront le dimanche. Ce point apparaît comme spécialement irréaliste : 85% des cadres (c’est à dire ceux qui embauchent, organisent l’activité, attribuent les congés et le promotions), n’y croient pas.
  • inscrit aussi le principe d’un paiement double, sauf dans le cas où il existe un accord contraire. Comme c’est le cas le plus fréquent (il existe déjà un accord pour les catégories de salariés qui travaillent déjà le dimanche), les salariés payés double seront… rarissimes ! Même Melle Hurel, une partisan fervente de la proposition Mallié, s’en est rendu compte et a protesté.

 

Le détail de la proposition Mallié 1254 au 17/12/08.

Redéfinir la réglementation du repos dominical concernant les commerces, dans les grandes agglomérations et les zones touristiques (n° 1296)

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Article 2

Rédiger ainsi cet article :

« I.- L’article L. 3132-25 du code du travail est remplacé par six articles L. 3132-25, L. 3132-25-1, L. 3132-25-2, L. 3132-25-3, L. 3132-25-4 et L. 3132-25-5 ainsi rédigés :

« Art. L. 3132-25. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services, après autorisation administrative.

« Art. L. 3132-25-1. – La liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente sont établis par le préfet. L’arrêté peut être pris sur demande des conseils municipaux.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »

« Art. L. 3132-25-2. – Sans préjudice des dispositions de l’article L. 3132-20, dans les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants, le repos hebdomadaire peut être donné, par roulement, pour tout ou partie du personnel, dans les établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services dans un périmètre d’usage de consommation exceptionnel caractérisé par des habitudes de consommation de fin de semaine, l’importance de la clientèle concernée et l’éloignement de celle-ci de ce périmètre, après autorisation administrative.

« Art. L. 3132-25-3. – La liste et le périmètre des unités urbaines mentionnées à l’article L.3132-25-2 sont établis par le préfet de région sur la base des résultats du recensement de la population.

« Sur demande du conseil municipal, au vu de circonstances particulières locales et :

– d’usages de consommation de fin de semaine au sens de l’article L. 3132-25-2

– ou de la proximité immédiate d’une zone frontalière où il existe un usage de consommation de fin de semaine, compte tenu de la concurrence produite par cet usage,

le préfet délimite le périmètre d’usage de consommation exceptionnel au sein des unités urbaines, après consultation de l’organe délibérant de la communauté de communes, de la communauté d’agglomération ou de la communauté urbaine, lorsqu’elles existent, sur le territ
oire desquelles est situé ce périmètre.

« Le préfet statue après avoir recueilli l’avis du conseil municipal de la ou des communes n’ayant pas formulé la demande visée au présent article et n’appartenant pas à une communauté de communes, une communauté d’agglomération ou une communauté urbaine dont la consultation est prévue à l’alinéa précédent, lorsque le périmètre sollicité appartient en tout ou partie à un ensemble commercial, au sens de l’article L. 752-3 du code de commerce, situé sur leur territoire.

« Ces avis sont rendus dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

 « Art. L. 3132-25-4. – Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20, L. 3132-25 et L. 3132-25-2 sont accordées pour une durée limitée, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d’industrie, de la chambre des métiers  et des syndicats d’employeurs et de salariés intéressés de la commune. L’autorisation est réputée accordée à l’expiration d’un délai de quatre mois à compter de la réception de la demande. Elle fait l’objet d’une publication.

« Une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne peut prendre en considération le refus d’une personne de travailler le dimanche pour refuser de l’embaucher. Le refus de travailler le dimanche pour un salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement. Le salarié d’une entreprise bénéficiaire d’une telle autorisation qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire.

« Les autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-2 ne peuvent être accordées aux commerces de détail alimentaire visés à l’article L. 3132-13.

« Les autorisations prévues aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-2 sont accordées pour cinq ans. Elles sont accordées soit à titre individuel, soit à titre collectif, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, pour des commerces ou services exerçant la même activité. »

« Art. L. 3132-25-5. – Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-2 sont accordées au vu d’un accord collectif ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur prise après référendum.

« L’accord fixe les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées.

« En l’absence d’accord collectif applicable, les autorisations sont accordées au vu d’une décision unilatérale de l’employeur, prise après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, lorsqu’ils existent, approuvée par référendum organisé auprès des personnels concernés par cette dérogation au repos dominical. La décision de l’employeur approuvée par référendum fixe les contreparties accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées. Dans ce cas, chaque salarié privé du repos du dimanche bénéficie d’un repos compensateur et perçoit pour ce jour de travail une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente.

« Toutefois, un accord collectif régulièrement négocié s’applique dès sa signature en lieu et place des contreparties prévues à l’alinéa précédent.

II. – Dans le premier alinéa de l’article L. 3132-26 du même code, le nombre : « cinq » est remplacé par le nombre : « huit ».

 

 

La légalisation des zones de non-droit

Dans la version 6, les zones commerciales d’attractivité exceptionnelles sont complétées par des « périmètres d’usage de consommation exceptionnel caractérisé par des habitudes de consommation de fin de semaine » dans les unités urbaines de plus d’un million d’habitants, définition aussi floue que possible. Mais en clair, il s’agit de la pure et simple légalisation du travail du dimanche dans toutes les zones où il était pratiqué illégalement auparavant.

Le principe retenu pour légaliser Plan de Campagne apparaît comme particulièrement scandaleux : de même que l’on ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes pour légaliser un comportement illicite (quand le Gouvernement argue du non-respect de la loi), de même il ne peut se prévaloir de pratiques illicites pour légiférer.

8 dimanches dérogatoires par an dans toute la France

Autre nouveau point, l’ouverture du dimanche ne concernerait plus tous les dimanches, mais seulement 8 dimanches par an, contre 5 actuellement.

Ce point apparaît exactement calqué sur les exigences de la grande distribution, qui réclamait 10 dimanche le 23/11 dernier par la voix de son président, M Jérôme Bédier. Au delà de 10, compte tenu des habitudes de consommation actuelle, et de la crise financière actuelle, le retour sur coût n’est pas intéressant. Plus tard, les habitudes de consommation changeant, la grande distribution pourra en demander d’autres.

Mais d’ici là, quelques milliers de magasins traditionnels auront fermé leurs portes.

La création des zones frontalières

Des zones limitrophes de zones frontalières seraient créées, afin de pouvoir en limiter la concurrence, cette disposition visant particulièment la Belgique.

Ce concept est spécialement baroque ! Devra-t-on créer ensuite des zones limitrophes de zones limitrophes ?! Au lendemain de la présidence française de l’europe, un tel repli sur soi est particulièrement mal venu. Gageons que ce point ne restera pas longtemps dans le texte.

 


Le texte de la proposition Mallié 1254 sur le site de l’Assemblée.

 

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