Le pourquoi de la proposition Mallié
Richard Mallié est le député des Bouches du Rhone, depuis 2002. Dans la vie, il est dentiste.
C’est un député très « bavard » : entre 2004 et 2006, il est le député effectuant le plus d’interventions en séance.
Il s’est signalé en particulier par la proposition de loi créant l’Agence Nationale pour la Garantie des Droits des Mineurs. Plus récemment, c’est lui qui, avec le soutien d’une société de lobbying, a été à l’origine de la mention obligatoire d’un identifiant territorial sur les futures plaques d’immatriculation (encore une merveilleuse « réforme ».). Il s’est aussi fermement opposé à l’entrée de la Turquie en Europe.
Mais Richard Mallié sait aussi avoir de la fantaisie. On se souvient de sa proposition 653 de janvier 2008, amusante, pour l’instauration d’un « baptème républicain », ou de sa proposition 227 de septembre 2007, « visant à respecter l’orthographe exacte des noms patronymiques lorsqu’ils sont écrits en majuscules »… (voir l’article de Wikipedia).
Accessoirement, il a été condamné pour fraude de ses comptes de campagne. Carabistouille un jour…
En ce qui concerne le dimanche, le problème posé à M. Mallié est un problème local.
En effet, M Mallié est le député dont relève la zone commerciale de Plan de Campagne, vaste surface de 200 hectares de galeries marchandes, construites dans les années 60.
Dans cette zone, de nombreuses enseignes sont ouvertes le dimanche, tout à fait légalement, mais sur la base d’autorisations préfectorales qui avaient été accordées illégalement !
Certains commerçants de la zone sont donc de toute bonne foi (d’autres, un peu moins…). Ils ont effectué des investissements et créé des emplois sur la zone, en tenant compte de cette donnée erronnée.
Or sous la pression des syndicats, due pour partie à la mauvaise foi gouvernementale (condamnée), la justice (la cour administrative d’appel) a donné raison aux syndicats bataillant contre l’ouverture de Plan-de-Campagne le dimanche. Elle a confirmé les décisions du tribunal administratif (TA) de Marseille. Celui-ci avait en effet annulé le 24 janvier 2008, les 133 arrêtés préfectoraux autorisant des magasins de la zone commerciale de Plan-de-Campagne à ouvrir le dimanche.
Le ministère du Travail ainsi qu’une centaine d’enseignes concernées avaient contesté ces annulations. Mais lors de l’audience d’appel, le 22 décembre, le commissaire du gouvernement avait pris position pour la confirmation de l’annulation des arrêtés.
D’un côté, il y a la Loi : il est maintenant chose jugée que les dérogations étaient illégales. Mais de l’autre, il y a les commerçants et entrepreneurs de Plan de Campagne, qui ont fait des investissements, pris des risques, crée des emplois sur cette base incorrecte. Comment traiter ce problème évident de manière intelligente ?
Pour notre part, nous pensons que puisque le problème est local à Plan de Campagne, il doit être résolu localement. Et pour avoir pris de nombreux contacts du côté syndical, nous affirmons qu’un accord local avec les partenaires sociaux est parfaitement possible, qui prévoirerait par exemple un retour à la situation légale sur une durée longue, et pourquoi pas la même durée que la situation d’illégalité.
Richard Mallié ne l’entend pas de cette oreille, et demande un statut dérogatoire permanent pour sa zone de Plan de Campagne. Dès mai 2004, il avait déposé la proposition de loi 1604 visant à assouplir la règle du repos dominical par la voie conventionnelle. Pierre Lellouche a pris la suite deux ans plus tard, avec la proposition 3262, de juillet 2006 (qui avait été celle qui nous avait conduit à ouvrir ce site), visant à permettre l’ouverture des commerces le dimanche. Puis Richard Mallié avait déposé la proposition 129 en août 2007, « ten
dant à garantir aux salariés concernés par le travail du dimanche, une majoration salariale et un repos compensateur, dans le cadre d’accords entre partenaires sociaux sur des périmètres déterminés ». En, dernière proposition en date, M Mallié a déposé le 24 avril 2008 la proposition 837, visant à « rénover les dérogations au repos dominical ».
Cette proposition de loi a été saisie au vol par le Gouvernement : la procédure législative étant beaucoup plus simple quand il s’agit d’une proposition de loi émanant d’un député, par comparaison avec un projet de loi émanant du Premier ministre (cf schéma de procédure législative sur le site de l’Assemblée), le Gouvernement s’en est saisie pour faire passer une proposition de campagne du candidat Sarkozy, et a fait modifier la proposition de loi 837 a plusieurs reprises.
On arrive ainsi à la proposition 1254 « visant à définir les dérogations au repos dominical dans les grandes agglomérations, les zones touristiques et les commerces alimentaires ».
Les moyens médiatiques n’ont pas manqué pour soutenir cette proposition : sondages payés par les grandes enseignes, diffusions de chiffres fantaisistes de création d’emploi, présentation visant à faire croire que tous les travailleurs seraient payés doubles, plagiats de sites internet, et jusqu’à la diffusion de sondages scandaleusement biaisés, qui ont valu à Richard Mallié le surnom de « Tonton Carabistouille ».
Cette proposition, présentée à l’Assemblée le 17 décembre 2008 à l’Assemblée a essuyé un échec cuisant et a du être retirée, la majorité n’étant pas du tout certaine de recueillir suffisamment de suffrages sur le texte.
Mais dès avril 2009, la mécanique se remettait en route, et le Gouvernement annonçait qu’un député présenterait bientôt un nouveau texte, en contradiction flagrante avec les usages républicains. Ce député est encore Richard Mallié, qui présente maintenant la proposition 1685, « réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires », dont le simple intitulé est à lui seul un chef d’oeuvre de désinformation.