Menaces sur la qualité de vie et sur certains commerces, perte de prérogatives pour Paris, compensations incertaines: l’extension de l’ouverture dominicale braque surtout la gauche.
C ‘est la disposition la plus polémique à gauche. L’extension de l’ouverture des commerces le dimanche inquiète la majorité autant que les conservateurs. Pour amadouer son monde, Emmanuel Macron s’est appliqué en commission à démontrer la supériorité de son texte sur l’existant, en j’occurrence la loi Mallié sur le travail dominical, votée en 2009 sous les huées de la gauche: «Cette loi a créé une situation illisible et injuste, a insisté Macron devant la commission spéciale. Nous voulos réduire les inégalités entre les salariés tout en rendant aux élus la liberté de s’adapter aux territoires.» Une déclaration qui n’a pas convaincu les parlementaires qui entendent obtenir des garanties du ministre. Revue de détail des points contestés.
Une possibilité d’ouverture élargie pour les maires
Ce que propose la loi Macron : les maires peuvent autoriser j’ouverture le dimanche des commerces non alimentaires à concurrence de 12 dimanches par an (contre 5 auparavant). Au-delà de
Ce qu’en pensent les députés: à droite comme à gauche, ceux qui sont hostiles à l’extension du travail dominical revendiquent une position de principe. «Quand le système est socialement contraignant pour les familles, il faut faire extrêmement attention quand on veut l’élargir. Il n’y a pas de compemation qui suffise face à la perte de richesse humaine », relève le député UMP et président du parti chrétien-démocrate Jean- Frédéric Poisson. Dès la mi-décembre, la maire PS de Lille, Martine Aubry, avait elle-même tiré la sonnette d’alarme: «Veut-on faire de la consommation encore plus qu’aujourd’hui – l’alpha et l’oméga de notre société? » La semaine dernière, la direction du PS a à son tour réitéré son opposition à une «banalisation» du travail le dimanche et cherche à ce que soit « flouté » le chiffre de 12. Toutefois, le fait qu’au-delà de 5 dimanches, la décision d’autoriser l’ouverture relève de l’intercommunalité a désamorcé la vindicte de beaucoup d’élus qui craignaient que l’attitude offensive de certains maires entraîne une concurrence commerciale accrue entre communes. Les frondeurs, eux, n’en démordent pas: « Je ne vois pas l’intérêt de conserver une telle mesure symbolique, alors que l’intercommunalité fera qu’elle sera appliquée que très marginalement », insiste le député PS Jean-Marc Germain.
Une homogénéisation des règles
Ce que propose la loi Macron : les zones commerciales (ZC) et les zones touristiques (ZT), vont remplacer les Puce (Périmètres d’usage de consommation exceptionnel, dans les agglomérations de plus d’un million d’habitants) et « communes ou zones d’intérêt touristique» aux règles actuelles très disparates. Ces ZC, qui pourront ouvrir tous les dimanches, seront tracées par décret sur demande des élus locaux et incluront les zones frontalières où il y a une forte concurrence.
Ce qu’en pensent les députés: si elle salue dans l’ensemble l’homogénéisation des règles, la gauche craint que les ZC ne se multiplient, menaçant encore davantage les commerces de centre-ville. Pour éviter cet effet pervers, les socialistes comptent réclamer par voie d’amendements une définition précise des critères de délimitation des zones commerciales.
La création de zones touristiques internationales, au statut particulier
Ce que propose la loi Macron: les zones touristiques internationales (ZTI), définies par « le rayonnement international» de la zone et «l’affluence touristique exceptionnelle », pourront, par arrêté ministériel, être étendues, en particulier à certains quartiers de Paris (le boulevard Haussmann et les Champs-Elysées) et dans
Ce qu’en pensent les députés: la gauche parisienne n’en veut pas. En guerre ouverte contre une disposition qui lui ôte le contrôle des ouvertures dominicales au profit du gouvernement, la maire de Paris, Anne Hidalgo, peut compter dans ce combat sur le soutien du Front de gauche et des écolos, partie prenante de la majorité municipale. A l’instar de la députée PS de Paris Sandrine Mazetier, tous soulignent «l’impact très dévastateur d’une telle extension pour les commerces des zones périphériques ».
Les compensations pour les salariés
Ce que propose la loi Macron : dans tous les cas de figure, l’autorisation d’ouvrir le dimanche doit être obligatoirement précédée d’un accord collectif (ce qui n’est pas le cas aujourd’hui) incluant des compensations salariales et des mesures permettant au salarié de concilier vie professionnelle et personnelle. Le volontariat du salarié doit être établi, et il pourra revenir sur son choix. Dans les petites entreprises dépourvues de représentants du personnel, l’ouverture le dimanche doit être approuvée à la majorité des deux tiers des salariés concernés.
Ce qu’en pensent les députés: si l’avancée sociale est réelle au regard de la législation actuelle, la gauche refuse de confier aux aléas de la négociation collective le soin de fixer les compensations salariales du travail le dimanche. Consciente que le rapport de force n’est pas en faveur des travailleurs concernés, elle entend obtenir au cours du débat parlementaire l’instauration d’un« plancher de compensation », à défaut d’un doublement systématique du salaire, intenable pour nombre de petits commerces. _ par Nathalie Raulin et N.r.