Famille Chrétienne | 10/12/2014 | Par Jean-Claude Bésida
Le ministre de l’économie, Emmanuel Macron, a présenté ce mercredi 10 décembre un projet de loi pour «déverrouiller l’économie française», dans lequel il propose d’élargir les ouvertures dominicales des commerces.
©AFP PHOTO/POOL/LIONEL BONAVENTURE
Voulant élargir les ouvertures dominicales de commerce à douze dimanches par an, le projet de loi Macron a été présenté au conseil des ministres mardi 9 décembre. Hélène Bodenez, qui anime le blog Raison garder rappelle les enjeux du débat actuel.
Pouvez-vous nous resituer la loi Macron ?
Le premier enjeu de cette loi, c’est la désynchronisation sociale qui est enclenchée depuis 2009 et la loi Maillié. À l’époque, la droite – Xavier Bertrand puis Xavier Darcos – avait fait voter la loi Maillié, en se battant contre une gauche qui était vent debout. Depuis cette période, et le débat très vif qu’il y avait eu au Parlement, les dominos tombent de plus en plus.
En effet, à partir du moment où un secteur obtient des dérogations, il n’y a pas de raison que des secteurs économiques voisins n’obtiennent pas les mêmes. Je parle bien de dérogations et non pas d’exceptions : les exceptions au principe du repos dominical concernent des secteurs identifiés comme vitaux (les services d’urgence ou les transports). Les dérogations, c’est autre chose : il s’agit de savoir si je pourrais m’acheter un canapé chez Ikéa, du rouge à lèvres chez Séphora ou des clous chez Bricorama. Bref, on nous demande de sacrifier quelque chose de très haut, le principe du repos dominical, pour des bagatelles.
Dans une perspective spirituelle, pourquoi le dimanche est-il si important ?
La réponse à la question spirituelle est que Dieu est Dieu et qu’il a donné le troisième commandement – un jour pour Dieu. Sur le fond, le sens du dimanche, c’est de dire qu’en honorant pleinement Dieu, l’homme sera pleinement homme. Ce lien vertical est fragile. Il peut facilement être effacé. Nous sommes tous collectivement menacés de ne pas nous souvenir d’où nous venons. Bref, protéger le dimanche, c’est protéger le lieu de notre filiation divine. Le dimanche qui donne l’impression d’être une trace antique est en réalité quelque chose qui nous protège.
Aujourd’hui, qui est pour le travail du dimanche ?
D’abord il y a des enseignes puissantes – la Fnac, Darty, Ikéa, Sephora et donc le groupe LVMH. Ces groupes le veulent et disposent de moyens pour relayer leurs demandes. Ainsi, je trouve très significative la Une de Libération ce mercredi 10 décembre : « Attali, l’autre président ». C’est rudement vrai et audacieux de suggérer qu’Attali est le vrai président et donc de reconnaître que l’autre, celui qui fait les lois n’est qu’un fantoche. Jacques Attali, auteur du rapport de 2008 dont les propositions 136 et 137 préconisaient la fin du repos dominical – avec comme rapporteur, Emmanuel Macron.
Et qui est contre ?
Qu’un gouvernement de gauche mette en œuvre une préconisation du rapport commandé par Nicolas Sarkozy à Jacques Attali est vécu par certains comme une trahison. Mais plus profondément, le travail du dimanche fait partie des marqueurs de la grande recomposition politique en cours.
Les vieux clivages idéologiques droite gauche ne signifient plus grand-chose. Ce qui est significatif, c’est l’émergence de politiques qui opposent à cela une vraie vision anthropologique – Martine Aubry ou Anne Hidalgo contre NKM par exemple sur la question du repos dominical. Ou bien sûr le PCD avec des politiques comme Jean-Frédéric Poisson ou Franck Margain, qui ont toujours défendu une certaine vision de l’homme.
Jean-Claude Bésida