Et vous, vous en pensez quoi de l’ouverture des magasins le dimanche?? Difficile de se déclarer pour ou contre, sans pondérer sa réponse. Une nouvelle fois au cœur des débats avec le projet de loi Macron, le sujet est toujours aussi clivant.
Vivement dimanche ? Pas pour tout le monde. Près d’un tiers des Français travaillent déjà ce jour-là (NDLR : non. Seulement 13% des salariés travaillent habituellement le dimanche). Leur nombre pourrait bientôt augmenter avec l’autorisation donnée aux commerces d’ouvrir jusqu’à douze dimanches par an, contre cinq actuellement. C’est ce que prévoit le projet de loi Macron dont la présentation au Parlement est prévue début 2015.
L’ouverture des magasins le dimanche est un serpent de mer qui refait surface sous chaque gouvernement, de droite comme de gauche. Et il divise toujours autant sur l’échiquier politique, mais aussi à l’intérieur même des partis. Il divise aussi chez les commerçants. Les grandes enseignes y voient une opportunité de développer leur chiffre d’affaires et de concurrencer les sites de vente en ligne, ouverts sept jours sur sept, jour et nuit, quand les « petits » craignent une fragilisation de leur activité. Les salariés, eux aussi, ne sont pas tous d’accord. Pour certains, c’est une chance à saisir d’augmenter leurs salaires?; d’autres refusent de sacrifier leur vie de famille ou redoutent les problèmes de garde d’enfants auxquels ils seront confrontés si leur repos dominical vient à disparaître.
En écoutant les arguments des uns et des autres, on mesure l’ampleur de l’onde de choc provoquée par cette réforme libérale portée par un gouvernement de gauche, alors que celui de Nicolas Sarkozy n’avait pas touché aux dimanches. Une réforme qui est critiquée par une partie des socialistes et répond à une attente du Medef. Le débat brouille les lignes : voilà que se retrouvent sur la même longueur d’onde Martine Aubry et l’Église catholique, Jean-Luc Mélenchon et les associations de défense de la famille. La loi fait bondir les syndicats, CGT en tête, mais elle n’est pas sans inquiéter sur certains points une organisation patronale comme la CGPME pourtant très attachée à liberté d’entreprise. Pas vraiment étonnant que ça coince donc…
Et les consommateurs dans tout ça?? Quand on leur pose la question pour ou contre l’ouverture des commerces le dimanche, ils répondent majoritairement oui. Si on leur demande s’ils seraient prêts à travailler régulièrement le dimanche, la réponse est non. Ce sont pourtant eux, les clients, qui risquent d’arbitrer les choses. Si douze ouvertures dominicales sont autorisées, les commerçants pourront choisir d’ouvrir tous ces dimanches ou pas. « Dans les zones touristiques cela se justifie. A Paris, c’est le cas, le dimanche, autour de la tour Eiffel, il y a du monde. A Clermont, rue Blatin, il y en a moins… », pointe Danièle Quinty, présidente de l’association Clermont Commerce. Pour le président de la CCI du Puy-de-Dôme, donner plus de souplesse aux entreprises en leur offrant la possibilité d’ouvrir le dimanche est une bonne chose. Isidore Fartaria se garde en revanche de préjuger de l’efficacité économique de cette mesure.
Les clients sont rois
« Tout dépendra de ce que feront les clients, ce sont eux les rois. Ce qui est sûr, c’est que je ne connais pas un chef d’entreprise qui gardera des magasins ouverts le dimanche et payera ses salariés en conséquence si il n’y a personne dedans ».
Pour que l’objectif de relance de la croissance soit atteint, il faudra que les ouvertures dominicales génèrent du chiffre supplémentaire et ne se traduisent pas par un simple étalement de l’activité sur la semaine. Car si la conjoncture ne s’améliore pas, il est évident que les Français ne pourront pas, le dimanche plus qu’en semaine, dépenser l’argent qu’ils n’auront pas.
Le "oui mais" des commerçants
Ouvrir plus pour gagner plus ? Pourquoi pas, estiment les commerçants, mais à certaines conditions.
« Il faut attendre le détail de cette loi pour savoir exactement comment se présenteront les choses, estime Danièle Quinty, présidente de l’association Clermont Commerce qui réunit plus de 500 adhérents. Il faudra qu’il y ait une politique sur les rémunérations parce que pour un commerçant qui doit payer double et faire récupérer les repos… il faut que ça tourne. Or la crise du pouvoir d’achat reste là… » Voilà pourquoi le texte et ses douze ouvertures possibles est appelé à être selon elle une base de travail. « Localement, il faudra se mettre autour d’une table et discuter. Pour que ce soit productif, il faudra qu’il y ait une vraie dynamique, si seulement certains sont ouverts, cela n’aura pas d’intérêt ». Valérie Veschambre, présidente de Clermont Sud Aubière voit dans cette loi une perspective que son association appelle de ses vœux : « Une égalité entre les différentes zones commerciales ». Car si, à Clermont, cinq ouvertures dominicales par an sont autorisées, le maire d’Aubière n’en autorise lui que trois. « Ce qui constitue une vraie concurrence déloyale », pointe Isidore Fartaria, président de la CCI du Puy-de-Dôme.
De là à ouvrir douze dimanches par an ? Pas forcément. Tout dépendra de la ville, du commerce et du secteur d’activité. Si à Vichy les commerces attirent toujours du monde le dimanche, l’exemple de Bourges illustre que ce n’est pas gagné d’avance. Dans cette ville où les commerçants du centre-ville ont obtenu depuis deux ans une dérogation pour ouvrir tous les dimanches, après une demande de la municipalité de classer le centre historique en « zone touristique à affluence exceptionnelle », les magasins qui profitent de cette autorisation ne se comptent que sur les doigts d’une main.
Catherine Jutier
Principe de base. Le Code du travail précise qu’un salarié ne peut travailler plus de six jours par semaine. Au moins un jour de repos doit lui être accordé
; chaque semaine. L’article L.3132-3 précise que « dans l’intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche ». Il existe cependant plusieurs dérogations permettant d’organiser le travail ce jour-là.
; chaque semaine. L’article L.3132-3 précise que « dans l’intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche ». Il existe cependant plusieurs dérogations permettant d’organiser le travail ce jour-là.
Dérogation de droit. Certains commerces dont l’ouverture est rendue nécessaire par les contraintes de la production ou les besoins publics peuvent déroger sans autorisation administrative (commerces de bouche, hôtels restaurants, tabacs-presse…).
Cinq dimanches. Les maires peuvent accorder jusqu’à cinq ouvertures dominicales par an aux commerces de détail. Le projet de loi Macron prévoit d’étendre leur nombre de cinq à douze ouvertures.
Périmètre thermal. De Vichy à Saint-Nectaire, douze communes auvergnates sont classées en périmètre thermal, ce qui autorise l’ouverture dominicale des établissements qui y sont installés. Mais tous n’ouvrent pas
Commerces alimentaires. Pour les commerces alimentaires de détail, le repos hebdomadaire peut être donné le dimanche à partir de 13 heures.