Le PS vous souhaite un bon dimanche

Marianne, 7/12 

S’attaquer au repos dominical ? Une "provocation", une "arnaque", une "tromperie organisée" qui menacerait un "équilibre multiséculaire dans notre pays". Ces mots ne sont pas ceux de vilains gauchistes s’attaquant à la proposition phare du projet de loi de croissance d’Emmanuel Macron, mais ceux de… responsables socialistes. Certes, on était en 2009 et ils étaient dans l’opposition…


Faire mieux que la droite sarkozyste ? Chiche ? Serait-ce là le pari que se sont lancés, un soir d’ennui dans un des salons de l’hôtel Matignon, Manuel Valls et son ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, pour s’attaquer au sacro-saint travail du dimanche qui, il y a encore peu, faisait partie de ces fameux « marqueurs de gauche ». Avec sa loi sur la croissance dites loi pour« l’égalité des chances économiques », Macron est bien parti pour faire un joli strike : brouiller une bonne fois pour toute les pistes entre le PS et la droite, et obliger un certains nombres de ses petits camarades à se dédire. 

Car en 2009, sous le gouvernement Fillon, la majorité de l’époque avait adopté une loi « visant à adapter les dérogations à ce principe (du repos dominical) dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires ». Un débat qui avait donné lieu à une véritable bataille rangée, à coup d’amendements en rafale, de prises de parole solennelles et de saisines du Conseil constitutionnel de la part des socialistes. Florilège de paroles socialistes de l’époque : 
  
« Le travail du dimanche, aujourd’hui, c’est une provocation alors que les gens, ils ne travaillent pas. Les gens ne voudraient pas travailler le dimanche, ils voudraient travailler dans la semaine, déjà ce serait pas mal. Et le gouvernement leur dit (…), il faut déréguler. Ils n’ont rien compris à la crise », analysait en 2009 Jean-Christophe Cambadélis, député de Paris et pas encore Premier secrétaire du PS, à l’occasion du traditionnel défilé du 1er mai. 
 
 
 

« En réponse à la grave crise économique qui sévit actuellement, la droite a comme seule réponse des reculs sans précédent sur le droit du travail.(…) Le Parti socialiste s’oppose avec force à ce recul social extrêmement préoccupant pour les droits des salariés. (…) Pour le Parti socialiste, le travail du dimanche est : inefficace sur le plan économique, dangereux pour les salariés et néfaste pour la vie sociale », taclait sèchement le secrétariat national du parti socialiste, dans un communiqué daté du 1er juin 2009.  

« Le gouvernement matraque une nouvelle fois le code du travail, officiellement au nom de la croissance contre la crise. En réalité, depuis des années la majorité souhaite supprimer le repos dominical. La crise n’est qu’une divine occasion de passer à l’acte. Pourtant, les pays les plus libéraux sont les premiers touchés par l’effondrement de ce modèle. Cette proposition de loi révèle la vision mercantile inquiétante de la droite. Il s’agit d’une triple erreur : économique, politique et sociétale. (…) Cette conception de la vie est une véritable menace pour la sphère familiale, amicale, culturelle, sportive, spirituelle ou associative. Nous refusons que la civilisation du caddie remplace la civilisation du loisir. La citoyenneté ne se résume pas à l’acte de consommation. » Ils étaient 120 parlementaires de gauche, dont une bonne partie de socialistes, à signer cette tribune « Dimanche : "Yes week-end" » à l’initiative de Christian Eckert, aujourd’hui secrétaire d’Etat au Budget et publiée dans le journal Libération le 11 décembre 2008 pour protester contre les coups de canifs donné au repos dominical. Parmi les autres signataires on retrouvait un Jean-Marc Ayrault, Claude Bartolone, Delphine Batho, Bernard Cazeneuve, Jean-Marie Le Guen, Christiane Taubira, Jean-Jacques Urvoas, Jean-Christophe Cambadélis (à nouveau lui) et bien d’autres. Une unité affichée qui fait cruellement défaut ces temps-ci… 

Les députés du groupe PS étaient si mobilisés par le sujet qu’ils nous offraient, cette même année 2008, un petit clip gentillet en défense du travail du dimanche (voir ci-dessous). 
 
 
Plus récemment, en 2012, alors que l’enseigne Bricorama réclame le droit d’enfreindre la loi sur le repos dominical, en ne respectant pas les limitations imposées par la loi dans ses 31 magasins franciliens, Michel Sapin, alors ministre du Travail, affirmait qu’il « n’est pas question de modifier la loi, ni de banaliser le dimanche ». Une bien belle déclaration. Mais ça, c’était avant. Avant le gouvernement Valls et la loi Macron. Bon dimanche à eux. Et à vous… 

Laisser un commentaire