Censé libérer le potentiel inexploité de croissance, le projet de loi Macron est un vaste salmigondis de plus de 100 articles. Il vise aussi bien les professions réglementées, les prud’hommes, la cession de participations de l’État dans les entreprises, l’ouverture de lignes d’autocars et… la libéralisation du travail le diman che.
Selon la loi votée — péniblement — en 2009, les maires peuvent autoriser l’ouverture 5 dimanches par an. Six cents types de commerces de détail non alimentaires sont concernés. Le respect du repos dominical est donc toujours la règle. Emmanuel Macron propose d’aller jusqu’à 12 dimanches. Or, curieusement, c’est le seul point qui révulse Martine Aubry. Elle l’a écrit dans le Monde : elle combattra « cette régression sociale » dans sa ville.
Si vous lisez son texte, plume à la main, allez y comprendre quelque chose. La maire de Lille est d’accord sur le deuxième volet : la création de zones touristiques internationales (Lille est forcément l’une d’elles), où le travail du dimanche sera possible toute l’année jusqu’à minuit. Une grande idée de Laurent Fabius, qui a l’ambition d’attirer, en 2020, 100 millions de touristes en France. Et pour cela, de développer les capacités de shopping car, faute d’ouverture, beaucoup partent le week-end à Londres. Ces zones pourraient être les Champs-Élysées, le boulevard Haussmann et ses grands magasins, les gares, avec à la clé plusieurs milliers d’emplois volontaires. Mme Hidalgo n’en veut pas. Mais ces zones seront créées par décret ministériel, ce qui contournera la maire de Paris…
Mais nous sommes à six mois du congrès du Parti socialiste. Douze dimanches ? « Sept, pas plus ! », tonne Jean-Christophe Cambadélis. « Ça se discute », a rétorqué Manuel Valls, qui a lui-même révélé à la presse le projet Macron. Entouré de 9 membres de son gouvernement, dont le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, qui, en 2009, avait été l’un des plus farouches opposants à cette libéralisation avec Laurent Fabius et Jean-Marc Ayrault, qui n’a jamais obtempéré dans sa ville. La nouvelle maire de Nantes, elle, a lâché 2 dimanches. Une révolution.
Le premier ministre voulait ainsi protéger Emmanuel Macron des attaques de l’aile gauche du PS, pour qui ce jeune ministre est le symbole honni du libéralisme. Son projet s’inspire en réalité du rapport de la commission Attali, dont il faisait partie, commandé par… Nicolas Sarkozy, qui se promettait de le mettre en oeuvre. Ce qui avait déclenché l’hostilité du groupe UMP.
Les frondeurs ne veulent pas non plus des zones touristiques. À Nice, une zone a été créée, il y a trois ans. Première année, 25 dimanches ouverts jusqu’à minuit. Deuxième année, 39. En 2014, 52 ! Les Galeries Lafayette paient double leurs salariés ce jour-là. Idem à Marseille. À Bordeaux, 17 dimanches sont ouverts par an. À Biarritz, 28. Des villes toutes dirigées par des maires de droite.