Suite aux récentes propositions du MEDEF pour créer un million d’emplois , le CAD a adressé à son Président une lettre ouverte soulignant l’absence de crédibilité des chiffres présentés.
Ci dessous le texte de cette lettre ouverte.
COLLECTIF DES AMIS DU DIMANCHE (CAD) Paris, le 25 septembre 2014
10 rue Denis Poisson
75017 PARIS
contact@travail-dimanche.com
Monsieur Pierre GATTAZ
Président du MEDEF
55 avenue Bosquet
75008 PARIS
Objet : Travail dominical – Jours fériés.
Monsieur le Président,
La presse a largement fait écho des projets du MEDEF, avec des mesures que nous laissons aux experts le soin d’apprécier. Cependant, le CAD est qualifié sur une mesure que vous avez proposée dans votre conférence du 24/09 dernier : la dérégulation du travail dominical et du travail de nuit, ainsi que la proposition de suppression de deux jours fériés.
Ainsi, vous affirmez péremptoirement qu’autoriser les commerces à ouvrir le soir et le dimanche permettrait de créer entre 90.000 et 300.000 emplois, tandis que la suppression de deux jours fériés, selon vous, en créerait 100.000, sans que l’on sache exactement de quelle mesure découleraient ces créations de postes, puisque la dérégulation dominicale est présentée en même temps que d’autres mesures très vagues.
Ces chiffres ont été immédiatement contestés par les économistes concernés : chiffrages « totalement fantaisistes » (Philippe Askenazy, CNRS), calcul « très trivial » et « surestimé » (Eric Heyer, OFCE), mesures « ne pouvant pas avoir un effet massif » (Gérard Cornilleau, OFCE). Par ailleurs, nous vous avions déjà défié de produire une seule étude crédible démontrant une création d’emploi nette par la dérégulation du dimanche (courrier mai 2014), certains syndicats vous ayant par ailleurs fait la même demande. Vous n’avez à ce jour, à notre connaissance, apporté de réponse à personne.
Il est évident que la suppression de deux jours fériés, dans les conditions actuelles de marché (faiblesse de la demande, difficultés à l’export), ne peut créer aucun emploi, sauf si à l’instar de M. Raffarin, vous envisagiez que le travail de ces deux jours ne soit pas rémunéré.
De même pour le travail dominical, toutes les études à ce jour ayant conclu à une absence d’impact sur l’emploi ou la croissance, voire avec un impact négatif, si l’on élargit le cercle de son application à d’autres personnalités que les propriétaires des grands magasins du boulevard Haussmann. En revanche, les effets délétères sont connus : impacts négatifs sur la santé, sur la vie sociale, concurrence déloyale de la grande distribution envers la distribution de proximité, affaiblissement culturel, développement d’un matérialisme déshumanisant, etc. Les expériences de l’Allemagne ou de l’Espagne à ce sujet sont parlantes.
L’insertion de propositions aussi fantaisistes que la suppression de jours fériés (ou votre proposition de fêter le 14 juillet le 11 ou le 16 en fonction des week-ends !), ainsi que cette nouvelle attaque que vous conduisez à nouveau, insidieusement, à l’encontre du repos dominical et des rythmes professionnels et humains, décrédibilise votre document.
Plus encore, votre absence de réponse à nos courriers précédents laissant conclure que vous n’ignorez pas l’inefficacité de ces mesures, vous diffusez sciemment des informations inexactes, sachant qu’il en restera toujours quelque chose dans l’opinion publique. Ce sont des méthodes qui n’honorent pas ceux qui les utilisent.
Pour notre part, nous contestons formellement votre chiffrage, faute de la publication des hypothèses économiques sur lesquelles il est censé se baser, et nous réitérons pour la troisième fois notre défi : nous vous mettons en demeure de produire une seule étude crédible concluant à une création significative nette d’emploi par la dérégulation du travail dominical.
Dans cette attente renouvelée, Monsieur le Président, veuillez agréer nos courtoises salutations.
Jean DIONNOT
Président
Etienne NEUVILLE
Secrétaire Général