Alors qu’en France, Gattaz II propose de supprimer des jours fériés, et de travailler dimanche et de nuit, Richard Branson propose à ses salariés des congés illimités. No comments ! |
Richard Branson s’inspire d’une politique déjà mise en place chez Netflix. Seule contrainte : que les objectifs soient remplis. Est-ce possible en France ?
Imaginez : la semaine prochaine, vous partiriez bien profiter des derniers jours de douceur sur le bassin d’Arcachon. Le hic, c’est que vous n’avez pas posé de congés. Vous devriez donc faire une croix sur ce repos tant désiré… Sauf si vous êtes un employé de Virgin aux États-Unis ou en Grande-Bretagne.
C’est la dernière idée de Richard Branson, le richissime patron du groupe industriel britannique. Il l’explique dans un billet publié mardi sur son blog et intitulé "Pourquoi nous laissons le personnel de Virgin prendre autant de vacances qu’ils le veulent". De quoi faire s’étrangler le Medef, qui propose au contraire de supprimer deux jours fériés en France pour gagner en croissance…
Une "non politique" efficace
A l’origine de cette initiative, un article du Daily Telegraph, publié en août 2010. Le journal raconte alors que Netflix, récemment lancé en France, "laisse ses employés prendre autant de congés qu’ils le souhaitent, au moment ils le souhaitent", et surtout, que "ça marche" : lors de l’introduction en bourse de l’entreprise américaine, en 2002, une action valait 15 dollars. Aujourd’hui, elle en vaut environ 445.
A l’origine de cette "non politique des congés" chez Netflix, les nouvelles habitudes de travail. Par exemple, même pendant leurs jours de repos, les employés continuent à recevoir des mails, à y répondre. Gérer les jours de vacances de manière traditionnelle devenait donc "dépassé". Netflix n’est toutefois pas la seule entreprise à procéder de la sorte aux États-Unis, où la législation en termes de congés est très différente de ce qui se pratique en France (voir par ailleurs).
Être sûr que le travail sera rendu à temps
"Pas besoin de faire une demande préalable, et ni les employés, ni les chefs d’équipe ne doivent lister ou compter les jours passés loin du bureau. Seul le salarié décide s’il ou elle a besoin de prendre quelques heures, un jour, une semaine ou un mois de repos, à partir du moment où ils sont sûrs à 100% que lui ou elle et son équipe rendront leur travail à temps et que cette absence n’auront aucun impact sur les affaires, et donc sur leur carrière", poursuit Richard Branson. Les salaires, eux, restent identiques.
Le patron de Virgin se dit donc "ravi" d’annoncer que cette politique vient d’être mise en place dans les sociétés-mères aux États-Unis et en Grande-Bretagne. "En partant du principe que tout se passera comme prévu, nous encouragerons nos filiales et succursales à nous emboîter le pas, ce qui sera incroyablement excitant à observer", prédit Richard Branson.
Applicable en France
Une telle organisation serait-elle compatible avec le droit du travail français ? "Quand c’est défini de gré à gré entre l’employeur et le salarié, rien n’empêche d’octroyer autant de congés que l’on veut, le directeur des ressources humaines d’une grosse entreprise bordelaise depuis 23 ans. Mais pour cela, il ne faut pas que l’employé ait dû faire 80 heures de travail par semaine au préalable. La législation du travail doit être respectée."
Si ce DHR admet que des vacances illimitées pour les salariés peuvent être "viables économiquement", il y voit un risque pour l’ambiance au sein de l’entreprise : "Il y a le problème des objectifs. Peut-être que les clients d’untel seront plus faciles que les clients d’un autre. Cela créerait une compétition interne et il y aurait une impression d’injustice, d’inégalité", estime-t-il. Surtout si certains regardent leurs collègues prendre tranquillement la route du Bassin d’Arcachon…
Les États-Unis, "pays sans vacances"
En France, depuis 1982, au moins cinq semaines de congés payés par an sont octroyés à chaque salarié. Aux États-Unis, aucune loi n’oblige les patrons à accorder des vacances à leurs employés ! Chaque branche et chaque entreprise négocie avec les salariés.
En moyenne, selon Alternatives Économiques, un Américain dispose de neuf jours de congés et de six jours fériés par an. Puis l’ancienneté rentre en ligne de compte : au bout de cinq ans "de boîte", le nombre de jours de vacances grimpe à 15. Ce système occasionne néanmoins de grandes inégalités : 28 millions de personnes ne bénéficient pas de congés payés, selon le Bureau statistique du travail.
Une réalité qui faisait dire au Centre pour la recherche économique et politique, en 2007, que les États-Unis étaient "le pays sans vacances".