Ouest France, Even VALLERIE, 15/12
La justice dira lundi si Bricorama doit payer 37 millions d’euros à FO pour avoir ouvert le dimanche. L’interdiction de 1906 a été peu à peu rognée par des dérogations qui faussent la concurrence.
Les magasins de bricolage jalousent ceux de jardinage
Dans de nombreuses communes, les commerces de détail profitent pendant le ou les dimanches avant Noël de dérogations au repos dominical données par le maire (cinq dimanches maximum par an). Une trêve (des confiseurs) dans la bataille engagée de longue date par les grandes enseignes, notamment celles de bricolage, qui s’affrontent devant les tribunaux.
Elles tirent argument de la complexité des règles entourant le repos dominical (posé par une loi de 1906) et dénoncent la distorsion de concurrence. Les enseignes d’ameublement et de jardinage avaient en effet obtenu, en janvier 2008, pour cinq ans, d’ouvrir tous les dimanches de l’année. Les magasins de jardinage avaient fait valoir que leurs clients jardinent le dimanche. Le problème, c’est qu’ils bricolent aussi. Et parfois avec du matériel acheté dans des magasins de jardinage qui ne se limite pas aux pots de fleurs.
Des conflits de frontière autour des zones Puce
Pour tenter de colmater la brèche, la loi Mallié crée l’année suivante les Périmètres d’usage de consommation exceptionnel (Puce). Ces zones réservées aux agglomérations de plus d’un million d’habitants (Paris, Aix-Marseille, Lyon et Lille) ont été créées pour cinq ans et permettent aux magasins qui s’y trouvent d’ouvrir le dimanche.
Mais leur mise en œuvre va, à son tour, créer des contentieux. Soulevés par les magasins qui se trouvent à quelques kilomètres des Puce et donc soumis à une concurrence à laquelle ils ne peuvent répondre.
Une amende massue pour les magasins de bricolage
Bricorama, dont plusieurs magasins se trouvent dans ce cas de figure, a ainsi enfreint l’interdiction d’ouvrir le dimanche dans ses 31 magasins d’Ile-de-France. L’enseigne a été attaquée par le syndicat Force ouvrière qui demande à un tribunal de Versailles de la condamner à lui payer une somme de 37 millions d’euros en raison des astreintes décidées par la justice. La décision doit être rendue lundi. L’enseigne fait valoir que cette ponction supérieure à ses bénéfices met en danger l’emploi. L’entreprise menace de baisser les salaires. FO souligne qu’elle lui a proposé, en vain, de renoncer au versement contre le bénéfice d’un treizième mois pour les salariés. Ce qui n’a pas empêché 300 salariés de Bricorama de manifester devant le siège parisien de FO avec des banderoles « Laissez nous travailler le dimanche ».
Castorama et Leroy-Merlin poursuivis par Bricorama
Bricorama a également répondu sur le terrain judiciaire, en attaquant, devant les tribunaux de commerce d’Ile-de-France, 13 Castorama et 11 Leroy-Merlin pour lesquels il demande une astreinte de 150 000 € par dimanche et par magasin. Si Bricorama ne peut ouvrir le dimanche, il n’est pas question que ses concurrents continuent à le faire, argumente Jean-Claude Bourrelier, le PDG de Bricorama.