Dans cet article, M° Lecourt relève fort justement que le pari de Bricorama a été cynique : « faire peser sur les syndicats puis sur les juges le risque annoncé d’une faillite et un chantage sur l’emploi ». En fait, Bricorama va plus loin, puisque l’enseigne entend faire payer à ses salariés l’erreur d’appréciation de son président, M Bourrelier, qui avait cru pouvoir passer en force sur l’ouverture dominicale. Ayant perdu le procès qu’il avait joué avec l’argent de ses 2500 salariés, M Bourrelier entend maintenant leur supprimer tout intéressement. Pas trop la classe… |
Nouvelle victoire pour Force ouvrière dans le combat qui l’oppose à Bricorama dans le cadre du travail du dimanche. Hier, la cour d’appel de Versailles (Yvelines) a confirmé le jugement du tribunal de Pontoise (Val-d’Oise) rendu en janvier 2012, condamnant l’enseigne de bricolage à fermer le dimanche ses trente et un magasins d’Ile-de-France.
Situés hors des périmètres d’usage de consommation exceptionnel (Puce) établis par la loi Mallié en 2009 (voir l’encadré), les magasins Bricorama ne disposent pas du droit d’ouvrir le dimanche. La plupart sont installés dans un secteur commercial où se trouve un magasin concurrent qui, lui, bénéficie d’une autorisation. C’est principalement sur ce point que se fixe la défense de l’enseigne, qui brandit l’argument de la concurrence déloyale.
Il réalisait 15 % de son chiffre d’affaires ce jour-là
En perdant cette bataille, Bricorama — qui réaliserait environ 15% de son chiffre d’affaires le dimanche — risque encore plus gros. Dans quelques jours, le juge de l’exécution des peines du tribunal de Pontoise se prononcera à son tour sur la liquidation des astreintes réclamées par FO, c’est-à-dire leur paiement. Le montant dépasse les 18 M€. Une somme colossale pour l’entreprise, qui avait jusqu’alors fait le choix de rester dans l’illégalité et de ne pas baisser le rideau le dimanche. « S’il faut payer ces astreintes, le versement des primes et de l’intéressement des 2500 salariés français sera supprimé dès cette année », précise FTI Consulting, l’agence chargée de la communication de la société. Elle évoque également « la menace de fermeture définitive » qui plane sur une poignée de magasins de la région parisienne (quatre ou cinq, semble-t-il, dont celui d’Orgeval, dans les Yvelines) « qui ne deviendraient plus assez rentables en cas de fermeture le dimanche ».
De son côté, Force ouvrière salue l’arrêt de la cour d’appel. « Les juges ne se sont pas laissés manœuvrer par l’enseigne. Sans jamais respecter la loi ni la décision de justice, Bricorama a préféré tenter d’obtenir une dérogation auprès du gouvernement Fillon, puis engager un vaste lobbying auprès du gouvernement actuel et des parlementaires, dénonce Me Vincent Lecourt, l’avocat du syndicat. Leur pari a été cynique : faire peser sur les syndicats puis sur les juges le risque annoncé d’une faillite et un chantage sur l’emploi. » L’avocat rappelle qu’avant l’été FO avait proposé à l’enseigne de renoncer à la poursuivre en justice à condition que celle-ci indemnise ses salariés « pour le préjudice porté à leur vie familiale et ferme ses magasins le dimanche ». Un accord refusé par Bricorama, qui entend maintenant se pourvoir en cassation.