Des salariés de Bricorama, obligé de fermer le dimanche, ont manifesté leur colère jeudi. La faute aux actions en justice des syndicats, mais aussi à une loi qui a privilégié certaines enseignes et pas d’autres.
La scène, insolite, s’est déroulée jeudi à Paris à deux pas de la tour Montparnasse. Entre 200 et 300 salariés de Bricorama ont protesté devant le siège de FO. Motif : le syndicat a fait appel à lajustice pour obliger l’enseigne de bricolage à ne plus ouvrir ses magasins le dimanche, privant ses employés d’une source de revenus non négligeable.
Une affaire — emblématique — qui relance la polémique sur ce dossier épineux du travail dominical. Sur le papier, pourtant, rien de plus simple : d’un côté, certains consommateurs, débordés durant leur semaine de travail, trouvent pratique de faire leurs courses le dimanche. De l’autre, certains salariés sont preneurs d’une mesure leur permettant d’arrondir leurs fins de mois. En principe, un certain nombre de personnes y trouverait donc son compte. L’idée, bien dans l’esprit du « travailler plus pour gagner plus » sarkozyste, fait l’objet, en 2009, de la loi Maillé, du nom du député UMP des Bouches-du-Rhône qui mena la bataille pour l’ouverture le dimanche de Plan de campagne, cet immense centre commercial aux portes de Marseille.
Dérogations en pagaille
Contestée par les syndicats, par les catholiques attachés au repos dominical et par les défenseurs du commerce de proximité, cette loi, mal ficelée et à l’impact limité en termes d’emplois, a brouillé les cartes en multipliant les dérogations pour les commerces alimentaires, les magasins situés dans les zones touristiques ou de forte consommation. Et provoqué des distorsions de concurrence entre enseignes. Bricorama ne pouvait pas ouvrir le dimanche là où le Leroy Merlin, distant de quelques kilomètres, y était autorisé. De plus, « l’argument du volontariat ne tient pas car les enseignes demandent dès l’embauche aux salariés s’ils acceptent de travailler le dimanche », relève Eric Scherrer, président de la fédération CFTC des employés du commerce.
« Il est clair qu’il faut revenir sur cette loi Maillé », assure Daniel Raoul, sénateur PS du Maine-et-Loire. Déjà, le sénat a voté fin 2011 une proposition de loi pour renforcer les droits des salariés travaillant le dimanche et pour limiter les dérogations. Mais le gouvernement est d’une prudence de Sioux sur ce dossier politiquement sensible. Et pour cause : aujourd’hui, plus de 1 salarié sur 4 (6,5 millions) travaille le dimanche.