Le Parisien, Cécile Beaulieu, 26/11/10
Huit magasins d’alimentation vont affronter les syndicats du commerce devant le tribunal sur l’ouverture illégale le dimanche à Paris.C’est une première.
D’un côté de la barre, les syndicats du commerce, de l’autre, les enseignes alimentaires… et, sur la table des débats, l’épineux problème du travail dominical. Pour la première fois à Paris, une action collective est intentée en justice contre huit supérettes soupçonnées de ne pas respecter la législation.
Les avocats de Monop’, Franprix, G20, Carrefour City et Spar ont affronté hier matin, pour un premier round, le Comité de liaison intersyndical du commerce de Paris (Clic-P), composé des syndicats CFDT, CFTC, CGC, CGT, FO et SUD, tous bien décidés à mettre un coup fatal à l’extension du travail dominical dans la capitale. Avant l’audience, fixée au 20 janvier, chacun est invité par la présidente de la première chambre civile à réunir ses arguments… qui ne manquent pas : « Nous avons constaté la violation régulière et récurrente du droit au repos dominical des salariés du commerce alimentaire. En ouvrant le dimanche au-delà de 13 heures et le lundi, elles bafouent la réglementation en vigueur, soutient l’avocat de Clic-P, et portent préjudice à l’intérêt collectif des salariés. » Les syndicats et leur conseil s’insurgent par ailleurs de voir régulièrement violé l’arrêté préfectoral de 1990 qui prévoit un jour de fermeture, destiné notamment à réguler la concurrence dans le secteur alimentaire.
De l’autre côté, l’argument est balayé d’un revers de main : « L’arrêté de 1990 est complètement obsolète, s’agace l’avocate de Franprix. Et puis, nous sommes en pleine discrimination : des centaines de commerces sont ouverts à Paris le dimanche. Chacun le sait. » Sur cet épineux débat, le Clic-P est formel : « Il est évidemment impossible de traquer toutes les ouvertures illégales sur un territoire comme Paris. Nous agissons au coup par coup et la police aussi : elle multiplie les rappels à l’ordre, contraint les commerçants à fermer leurs portes, mais ils rouvrent en général discrètement dès que possible. Pour les employés, c’est catastrophique : ils ne touchent pas de prime spécifique et doivent renoncer à leur vie de famille. » Bien décidés à mettre le débat sur la place publique et à rendre aux salariés du dimanche leur liberté, les plaignants entendent toucher « au portefeuille » les commerçants récalcitrants en demandant une astreinte de 10000 € par infraction et par établissement.
En septembre dernier, la justice avait commencé à s’intéresser au problème, en condamnant à des amendes deux supérettes G20 et Shopi du Marais pointées par l’inspection du travail pour avoir ouvert illégalement le dimanche après-midi.