Un an après l’entrée en vigueur de la loi sur le travail le dimanche, alors que des tensions persistent entre certains élus et entreprises, le gouvernement défend un projet qu’il estime équilibré.
Pour les syndicats, au contraire, la loi du 10 août 2009 s’avère injuste. La CFTC juge ainsi qu’elle n’a pas entraîné de généralisation massive des ouvertures, mais « une discrimination » et « des promesses non tenues » à l’exception marginale des périmètres d’usage de consommation exceptionnelle (PUCE).
« AGGRAVER LES INÉGALITÉS ENTRE LES SALARIÉS »
« La loi Mallié n’a fait qu’aggraver les inégalités entre les salariés en créant des zones où les compensations sont différentes pour une même dérogation », dont « les femmes et les précaires sont les premières victimes », confirme uncommuniqué de la CGT.
« Selon l’endroit, le salaire est majoré ou pas, le volontariat est exigé ou pas. Selon le type de dérogation, les salariés n’ont pas les mêmes droits alors qu’ils dépendent souvent d’un même groupe, d’une même branche, d’une même localité », poursuit la CGT.
Les salaires. Dans un témoignage au Monde.fr, Marianne raconte son travail dans unLeader Price d’une zone touristique : « Le magasin est ouvert tous les dimanches de cette période mais nous ne recevons pas un salaire plus élevé. Même lorsque la saison touristique est terminée, nous travaillons encore le dimanche sans rien de plus si ce n’est davantage de travail. Et pour ceux qui souhaiteraient dénoncer cette situation, c’est la porte. »
Martin, ouvrier spécialisé dans le domaine de l’automobile, est au contraire satisfait du travail dominical : « Il y a trois mois, notre patron nous a demandé si on voulait bien travailler le dimanche. J’ai alors accepté, ainsi que la majorité des collègues, car il nous a dit qu’on serait payé un petit peu plus que les autres jours de la semaine. J’ai ainsi reçu 1 450 euros par mois contre 1 150 auparavant. Je touche ainsi environ 70 euros par dimanche pour six heures travaillées. J’en suis satisfait car je gagne plus. »
Sylvain travaille un dimanche sur deux. Payé double, il estime toutefois que la généralisation du travail dominical pourrait porter préjudice à cette compensation financière : « Légaliser massivement le travail le dimanche ne revient pas à créer du travail mais simplement à permettre de payer moins bien les salariés ces jours-là.«
Le volontariat. Hervé, technicien de surface chez Leclerc à Saint-Tropez, s’est vu proposer de travailler le dimanche sur la base du volontariat. « J’ai d’abord refusé, pour pouvoir bénéficier de temps libre, raconte-t-il. Mais j’ai alors subi des contraintes subtiles, comme des menaces à demi-mots ou du harcèlement moral. Les caissières, notamment, menaçaient de me coller des codes-barres sur mes chaussettes pour faire sonner le portique à mon arrivée. C’est donc contraint et forcé que je me suis résigné à travailler le dimanche. »
Corentin, lui, est étudiant en master à Lille. Pour pouvoir partir étudier à l’étranger, il a déniché un job dans la grande distribution. Il travaille tous les soirs mais aussi certains dimanches. « Je n’ai jamais été contraint par mon employeur lors des ouvertures exceptionnelles, assure-t-il. Je suis bien mieux payé le dimanche et c’est pour moi la journée de travail la moins dérangeante pour mes études, c’est donc tout à fait volontairement que je travaille. »
« DÉTOURNER LA RÉGLEMENTATION »
Finalement, pour la CGT, la loi Mallié « donne raison à ceux qui détournaient la réglementation », qui « tentent d’obtenir encore plus de possibilités d’extensions », à l’image des « magasins de détail qui ouvrent impunément tout le dimanche, alors qu’ils ne sont autorisés à le faire que jusqu’à 13 heures ».
La centrale réclame alors « une remise à plat des critères et des compensations pour déroger au repos dominical » avec une réduction des autorisations de faire travailler des salariés les dimanches et avec la création d’un « socle légal de compensation en salaire et en temps de repos lorsque celui s’avère nécessaire ».