La CFDT pensait l’avoir remporté, obligeant Match à respecter l’arrêté préfectoral prévoyant un jour de fermeture hebdomadaire en cas d’ouverture le dimanche. Mais l’arrêté est caduc et le dossier de nouveau en justice, vendredi.
Lorsque le front social se déplace sur le terrain juridique, les rebondissements sont légion et complexes. C’est le cas de l’épineux dossier du travail dominical. Le 23 septembre, devant la cour d’appel de Douai, la CFDT pensait être « victorieuse » au bout d’une procédure engagée contre Match.
La justice a alors obligé l’enseigne à respecter l’arrêté du préfet du Nord du 28 juin 2004 obligeant les magasins ouvrant le dimanche à fermer au moins un autre jour dans la semaine… Sauf que, depuis, l’arrêté a été annulé par la justice administrative.
La procédure administrative qui a abouti à cette annulation a été lancée il y a trois ans par le gérant d’un petit 8 à Huit du village de Monchecourt, commune de 2 500 habitants entre Cambrai et Douai. « C’est le groupe (Carrefour, dont dépend l’enseigne 8 à Huit, ndlr) qui m’a demandé de le faire », explique Jean-René Lamy, gérant depuis 2005 de cette supérette qui compte trois salariés. Pour lui, l’ouverture sept jours sur sept était « une obligation pour maintenir l’entreprise à flot. ». Soutenu par les services du groupe Carrefour et par la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), le gérant a obtenu gain de cause devant la cour administrative d’appel, le 1e r avril 2010.
Le paradoxe, c’est que Jean-René Lamy, 58 ans, aurait aimé lâcher la gérance du magasin la veille, le 31 mars, pour « redevenir salarié » . Les repreneurs tardant, il tient la barque, « pour l’emploi ». Et, parce qu’il voulait « respirer un peu » , la direction lui a « octroyé le droit de fermer le lundi ».
De son côté, la préfecture, dont l’arrêté a été jugé « illégal », « en lien avec le ministère du Travail, étudie l’opportunité de faire un pourvoi en cassation. » Pas de décision prise pour l’instant, donc.
En attendant, ce vendredi 11 juin, c’est fort de la décision administrative du 1er avril que Match retourne devant la cour d’appel de Douai, soutenu par la FCD, pour demander l’annulation d’une condamnation basée sur l’arrêté caduc.
« Un combat sur les valeurs »
Dans le dossier « CFDT contre Match », « il s’agit avant tout d’un combat sur les valeurs : le droit au repos contre celui de l’argent et du chiffre d’affaires », expose Me Dominique Bianchi, l’avocat du syndicat, qui craint « un effet domino » sur les autres départements.
« Si la FCD parvient à ses fins sur ce dossier, les magasins Match pourront ouvrir tous les jours, mais c’est aussi toute la grande distribution qui pourra s’essuyer les pieds sur l’arrêté de 2004 », estime l’avocat.
« Une chose est sûre, on ne lâchera rien ! », tempête Didier Boute, secrétaire général de la CFDT-métropole lilloise. « On voit une augmentation des attaques contre ce type d’arrêté, derrière, il y aura une attaque du droit du travail », estime le syndicaliste qui souligne que la multiplication des procédures « coûte beaucoup d’argent » et que « la FCD cherche à asphyxier financièrement » les syndicats. Outre un recours devant la cour administrative d’appel pour obtenir l’annulation de « l’illégalité » de l’arrêté, la CFDT espère que l’État se pourvoira en cassation. La FCD et Carrefour n’ont pas souhaité réagir.
Voir aussi : le reportage de Grand Lille TV