Notre-Dame du Dimanche

Il y a « celui qui y croyait » et « celui qui n’y croyait pas », que le poête avait rangé sous le même respect.

En matière de repos dominical, il apparaît que le Bon Dieu y est fortement favorable. D’abord, comme souvent, Il a donné lui même l’exemple au temps de la Création. Ensuite, Il l’a mis dans la liste des 10 commandements, ce qui n’est pas rien. Enfin, Il le rappelle de temps en temps : à La Salette, la Vierge avait abordé cette question, ainsi qu’à Saint-Bauzille-de-la-Sylve (diocèse de Montpellier), ou Elle est restée honorée sous le vocable de « Notre Dame du Dimanche ».

Elle y est apparue en 1873, à un dénommé Auguste Arnaud, le prenant la main dans le sac, car il était justement en train de travailler un dimanche. Auguste Arnaud était très loin d’être un bon chrétien quand il a été favorisé de cette extraordinaire rencontre, qu’il raconte ci-dessous. Il en a changé radicalement sa vie.

Forums CEF, Nouvelle Evangélisation

Le 8 juin 1873, dimanche de la Trinité, j’étais parti de bon matin, selon ma coutume, pour aller travailler à ma vigne. C’était à peu près 5 heures.

Vers 7 heurs, je quittai le travail pour déjeuner, en m’asseyant dans le fossé qui sépare ma petite propriété de celle du voisin. Mon repas fini, je me disposais à fumer ma pipe. C’était 7 h 30. Je vis alors apparaître devant moi, à une distance de 1 à 2 mètres, un personnage sous la forme d’une femme de taille ordinaire, toute vêtue de blanc. Elle portait une ceinture frangée, sa tête était surmontée d’une couronne haute, semblable à la mître d’un évêque. Un grand voile blanc, partant du sommet de la couronne, l’enveloppait de toutes parts jusqu’aux pieds, couvrant même ses mains que le personnage tenait croisées sur sa poitrine. Tous ces divers ornements étaient d’une éclatante blancheur. La figure de cette femme était belle, calme, sans exprimer ni joie, ni tristesse. Je ne l’ai pas vue sourire. Elle paraissait avoir de 25 à 28 ans. Elle était noyée dans une atmosphère lumineuse.

A sa vue, je me suis levée par un premier mouvement de stupeur et je lui ai adressé la parole dans le patois de mon pays :
– Qui êtes-vous ?
Elle a répondu dans la même langue :
– Je suis la sainte Vierge. N’ayez pas peur.
En me rassurant, ces mots me remplirent d’une religieuse émotion. J’écoutai, et la Sainte-Vierge ajouta :
– Vous avez la maladie de la vigne. Vous avez abandonné saint Bauzille. Il faut célébrer sa fête le jour qu’elle tombe. D’aujourd’hui en quinze il faut aller en procession à Notre-Dame. Tout le canton de Gignac, Montpellier et la ville de Lodéve. Il faut placer une croix neuve et changer l’autre. Vous placerez une Croix avec une Vierge au fond de la vigne. Et vous y viendrez en procession chaque année. Allez le dire à votre père et à votre curé, tout de suite. Dans un mois je viendrai vous remercier.

A ces mots l’Apparition monta verticalement vers le ciel, comme un globe (aérostat) et je la suivis des yeux jusqu’à ce que je ne pus l’apercevoir.

La Vierge disparut, Auguste courut raconter l’évènement à son père et, ensemble, ils allèrent trouver le curé du village. Celui-ci écouta le récit mais n’y accorda pas foi. Il lui semblait impossible que la Vierge apparaisse à un homme qui profane le jour du Seigneur en enfreignant le précepte dominical.

Le lundi matin, ils allèrent trouver le menuisier et lui commandèrent une croix provisoire, en bois, qu’ils planteraient dans leur vigne, en attendant qu’un forgeron, qu’ils avaient été voir à Montpellier, en confectionne une belle en fer forgé, or et argent, avec une image de Notre-Dame au milieu, conformément aux instructions d’En-Haut ; cet achat mangea d’un coup toutes les économies d’Auguste. Le soir même, la croix provisoire était plantée sur leur lopin. Au grand dam du curé qui refusa séchement de venir la bénir.

Pas plus échaudés que cela, les Arnaud, en famille et accompagnés de quelques proches, mis au courant de l’aventure d’Auguste, se rendirent le jeudi 12 juin à Saint-Antoine. Tant pis si cela leur faisait perdre une journée de travail ! Décidément quelque chose avait changé chez eux…

Le dimanche 22 juin, toute la famille se rendit à Notre-Dame de grâce à Gignac, y entendit la messe, et chacun constata qu’Auguste passa la matinée en prière dans l’église. Le 4 juillet, et toujours sans le curé, la belle croix or et argent livrée, les Arnaud l’installèrent dans leur vigne avec toutes les marques de respect possibles.

Évidemment, tout Saint-Bauzille était maintenant au courant et, loin de se moquer du fils Arnaud, contre toute attente on le croyait. Et précisément pour les raisons qui le discréditaient auprès de l’abbé Coste : Auguste n’étant pas un pilier de bénitier, ni un chrétien exemplaire, et à peine un pratiquant, personne ne le pensait capable de se monter la tête avec des histoires d’apparition. S’il avait voulu se moquer du monde, il n’eût point réformé sa vie ni mangé ses économies comme il venait de le faire pour acheter une croix de ferronnerie.

On attendait le 8 juillet, date annoncée d’une seconde apparition, avec un intérêt et une impatience croissante, ce qui n’était pas sans inquiéter Mme Arnauld, très effrayée à l’idée que la Sainte Vierge ne revint pas, et discréditât sans retour son mari. Auguste, quand sa femme l’entretenait de ses craintes, souriait et répondait :
– J’ai fait tout ce qu’Elle m’a demandé, donc Elle reviendra.

A la date prescrite, le 8 juillet (c’était un mardi), Auguste se rendit à sa vigne à quatre heures et demie du matin et se mit au travail. Plusieurs centaines de personnes, du village et des environs, vinrent aussi sur les lieux, dans l’attente de l’apparition promise. Vers sept heures et demie, tout à coup, déposera un témoin, Auguste laisse échapper sa pioche (…).

Auguste fera la déposition suivante : « Tout à coup, à deux mètres devant moi, j’aperçus de nouveau la même personne de la première apparition. A peine l’eus-je vu que, rapide comme l’éclair, elle fut sur la croix, (moi) me trouvant devant elle à la même distance de deux mètres. (…) »

Si les témoins, bien sûr, n’ont rien vu de l’apparition, en revanche ils ont constaté ce déplacement prodigieux, inexplicable. L’un d’eux fera la déposition suivante : « Il est emporté avec une rapidité effrayante vers la croix… directement en ligne droite, à travers les souches et les ceps qui étaient alors dans toute leur vigueur, enlacés les uns dans les autres. »

Auguste dira : « La Sainte Vierge avait les mêmes traits et la même expression que la première fois ; ses vêtements étaient de même forme, mais de couleur d’or, et paraissaient encadrés dans une atmosphère lumineuse de quelques centimètres de large. Sa figure était pleine de clarté. Les mains, croisées sur la poitrine et sous le voile, étaient entourées d’un chapelet toujours de couleur d’or. »

Aux dires des témoins, Auguste sembla plongé dans une contemplation pendant une dizaine de minutes. Puis la Vierge délivra un ultime message : « Il ne faut pas travailler le dimanche. Heureux celui qui croira, malheureux celui qui ne croira pas. Il faut aller à Notre-Dame-de-Gignac en procession. Vous serez heureux avec toute la famille. »

Puis, raconta Auguste, « elle fit glisser le chapelet sur la main gauche et de la droite elle donna la bénédiction à la foule comme font les prêtres à la fin de la messe en disant : « Que l’on chante des cantiques ». Et elle disparut de la même man
ière que la première fois. »

Les fruits spirituels furent patents : le village de Saint-Bauzille et, au-delà, la région retrouvaient une ferveur chrétienne, des conversions nombreuses étaient signalées. Aussi l’évêque autorisat-il, en 1879, la construction d’une chapelle. Il vint lui-même célébrer la messe dans le nouveau sanctuaire où la Vierge est invoquée sous le vocable « Notre-Dame du dimamche ».

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