Les supermarchés verbalisés préfèrent payer l’amende plutôt que de renoncer au chiffre d’affaires additionnel.
Le dimanche, après le marché, le supermarché. De plus en plus de supérettes et petits supermarchés ouvrent désormais le dimanche toute la journée, dans l’illégalité. Il s’agit pour l’essentiel de Franprix (groupe Casino), Shopi (groupe Carrefour) ou G20.
Cette tendance constatée depuis le vote de la loi sur le travail dominical l’été dernier inquiète Bertrand Delanoë, qui note une «fragilisation des commerces de proximité». Le maire de Paris a demandé au ministre du Travail, avec des syndicats de salariés et des représentants du commerce et de l’artisanat, qu’il «mobilise l’inspection du travail et mette un terme à ces dérives». Selon lui, une vingtaine de procès-verbaux ont été dressés «alors même que plusieurs dizaines de situations irrégulières se sont développées au cours des derniers mois».
Le sujet embarrasse. À la Fédération du commerce et de la distribution, on estime qu’il ne s’agit que de «quelques cas, pas très nombreux à notre connaissance». «Nous ne sommes pas dans une situation où on essaierait d’imposer l’ouverture généralisée le dimanche», affirme Jérôme Bédier, président de ce syndicat professionnel. La grande distribution milite pour une simple extension de cinq à dix par an du nombre de dimanches où une ouverture exceptionnelle peut être obtenue.
Des amendes de 1500 euros par jour et par salarié
La loi est à la fois claire et ambiguë. Elle a généralisé l’autorisation à tous les commerces alimentaires d’ouvrir jusqu’à 13 heures. En même temps, elle n’a pas annulé une disposition précédente qui oblige ces derniers à fermer au moins un jour par semaine, afin de ne pas créer de distorsion de concurrence entre les petits commerçants tenus à ce jour de repos hebdomadaire et les supermarchés. Dans les faits, ces derniers, même s’ils n’ouvrent que jusqu’à 13 heures le dimanche, sont donc dans l’illégalité. C’est pourquoi Monoprix a choisi de rester fermé le dimanche, à l’exception de quelques Monop qui testent l’ouverture dominicale toute la journée.
Les magasins verbalisés ont souvent préféré payer l’amende de 1500 euros par salarié par dimanche ouvert plutôt que de renoncer au chiffre d’affaires additionnel. D’autant que l’amende ne concerne que le jour d’infraction constaté. Aucun jugement n’a eu lieu pour l’instant sur la question.
Les syndicats restent néanmoins très vigilants. «Même la loi censée régler tous les problèmes liés au travail dominical n’est pas respectée, peste Joseph Thouvenel, de la CFTC. Ces enseignes ouvrent illégalement pour gagner des parts de marché et tuer la concurrence. Elles occupent le terrain pour qu’on nous refasse ensuite le coup du fait accompli, en légalisant la délinquance.» C’était en effet le but de la loi du 10 août 2009 : régler les aberrations juridiques et permettre aux centres commerciaux d’ouvrir (comme à Plan-de-Campagne, près de Marseille), qui le faisaient illégalement jusque-là. La loi visait aussi à harmoniser les pratiques et à garantir les droits des salariés concernés.
À ce propos, le Conseil de Paris a ce lundi saisi la balle au bond. Bertrand Delanoë a demandé au préfet de classer en «périmètres d’usages de consommation exceptionnelle» (Puce) les sept zones touristiques parisiennes. Ce qui aurait pour conséquence que les salariés soient volontaires et payés double pour travailler le dimanche, contrairement au règlement en vigueur dans les zones touristiques.