C’est aux fondements du Code du Travail que la loi Mallié s’est attaquée. Plan de Campagne n’est que la partie visible
de l’iceberg, le travail du dimanche étant en voie de généralisation.
Entre foie gras et dégustations de vins du pays, vacances en Lozère et séjours farniente sur la côte, le salon des comités d’entreprises a consacré aussi, entre autres, un peu de son temps à la question du travail du dimanche. Avec pour invités Avelino Carvalho (CGT) et Joseph Thouvenel (CFTC). Bien qu’arrivé un peu en retard, le député UMP de Plan de Campagne, Richard Mallié, à l’origine d’une loi a tenu à expliquer, pour ceux qui ne l’auraient pas encore extraite, la substantifique moelle de son texte. Précisant au préalable que la loi qui porte désormais son nom, était « un de ses engagements de candidat aux législatives de 2007 ». Tenant à assurer, en toute bonne foi, « pour ceux qui n’auraient pas compris la finalité de ma pensée » qu’il s’agissait, « juridiquement parlant, de mettre un terme à 40 ans de dérogations illégales sur cette zone. Ne pas légiférer aurait pu mettre en péril mille emplois ».
Ces employeurs hors la loi
Plan de Campagne. L’expérimentation « in vitro » de ce qui se généralise aujourd’hui dans tout le pays. Une zone et un laboratoire du non-droit. Pas la peine de se cacher derrière un rideau de fumée, dit Joseph Thouvenel,. « Le travail du dimanche concerne désormais tout le territoire ». Si c’est dans la banlieue de Marseille que tout a commencé, Paris, Lille entre autres, sont aussi largement impliquées. Les zones dites touristiques dont la notion est extensible à merci, sont aussi dans l’œil du cyclone.
« Tout a commencé depuis plus de douze années, ajoute Avelino Carvalho. Tous les employeurs savaient qu’ils transgressaient la loi mais c’est depuis 2002 que les choses ont commencé à se durcir quand Richard Mallié a décidé de s’attaquer à l’un des fondements du Code du travail ».
Ce non droit, Richard Mallié, dans son argumentation, le revendique. Et signe. « Grâce au travail du dimanche, les étudiants, pour ne parler que d’eux, peuvent ainsi mener à bien leur cursus universitaire. » Isabelle, employée d’une grande surface, s’insurge : « Comment pouvez vous soutenir cette idée que les étudiants soient contraints de travailler pour pouvoir mener à bien leurs études. Les étudiants doivent pouvoir se concentrer sur leurs travaux, et ne pas avoir à s’éreinter sur des tâches dominicales qui les empêcheront d’aller sur les bancs de la fac dès le lundi ». D’où cette question, la société telle qu’on nous la construit, cherche-t-elle vraiment une pépinière de chercheurs, de mathématiciens, de philosophes et d’artistes ? A cela, le député Mallié n’a pas eu de réponse. Pas plus qu’aux réflexions des syndicalistes s’interrogeant sur la qualité du « vivre ensemble ».
Rupture du lien social
Où en est le temps que les gens peuvent partager, celui de la convivialité ? « Un repas, une promenade avec les enfants, le temps de la spiritualité », demande Joseph Thouvenel ? Tout un temps collectif désormais nié. « Une véritable rupture du lien social », ajoute Avelino Carvalho. Irréversible si on en croit en effet l’ampleur d’un mouvement qui semble entrer dans les mœurs. Ou à coup de force de loi, ajoute Avelino. « Plan de Campagne n’est que la partie visible de l’iceberg. » Extensible, puisque, sur cette zone, des terres agricoles sont aussi convoitées par des promoteurs. Des demandes de dérogation sont en outre en cours sur le centre ville ou encore sur des zones commerciales comme La Valentine, à Marseille. « Nous sommes très attentifs à cela, se défend Richard Mallié, et ne donnons notre accord que dans des cas limités. »
De dérogations en dérogations, souligne Joseph Thouvenel, « et malgré ce que prétend Richard Mallié, le travail du dimanche contribue à tuer des milliers d’emplois. Notamment dans les commerces de proximité ».
Restent les salariés qui, devant l’institutionnalisation du travail du dimanche, auront bien du mal, comme cela était la règle, à faire valoir leur droit à un double salaire. Quant au volontariat évoqué par le député, tout le monde a bien compris qu’il n’en est plus question. « C’est à une cascade de licenciements des récalcitrants qu’il faut s’attendre », affirme encore Joseph Thouvenel. Comment pourrait-il en être autrement, alors que sur le seul site de Plan de Campagne, un très grand nombre d’employés ne bénéficient que de contrats à durée déterminée ?
Et Avelino Carvalho de conclure : « le travail du dimanche n’est qu’un exemple du travail de sape des délinquants économiques qui sont aux commandes du pays ».