L’exemple de la boulangerie est très symptomatique de ce qui se trouve derrière le combat du travail du dimanche, et est ici décrit avec une sincérité presque désespérée, par Bruno Cabut, Président de la Chambre Syndicale des Artisans Boulangers du Rhone. Derrière les arguments de facade, défendus par des parlementaires peu scrupuleux, se déroule en effet un combat entre les intérêts particuliers de quelques firmes puissantes, qui font une guerre impitoyable au commerce traditionnel en cherchant à l’étouffer. Et pour cela, tous les moyens sont bon, y compris l’instauration du travail 7/7,rythme que les commerces traditionnels ne peuvent pas suivre. Et chaque jour, un homme libre est remplacé par un homme… moins libre. |
Nous publions le droit de réponse envoyé par Bruno Cabut au Progrès de Lyon suite à un article sur le repos dominical des boulangers dont l’arrêté préfectoral a été suspendu par le tribunal administratif.
Voici que par deux fois les lecteurs du Progrès se sont vus éclairer en parcourant leur quotidien sur des faits d’une importance, toute relative, concernant l’ouverture 7/7 des boulangeries. Toute relative, puisque déjà depuis plusieurs décennies, la mort du commerce de proximité traditionnel est annoncée…dommage collatéral inévitable d’une tendance vers le libéralisme sauvage, prédateur, mais moderne… !!!
Voici, exposée en effet, l’idée géniale qu’un syndicat d’artisans boulangers modernes serait né et s’opposerait à la vieille Chambre Syndicale des Artisans Boulangers accrochés, arc boutés, à leur arrêté préfectoral qui régule pourtant avec équité le repos hebdomadaire des femmes et des hommes de la profession.
La Chambre Syndicale Patronale de la Boulangerie Artisanale Lyonnaise et du Rhône est en effet une bien vieille maison, qui de par ses statuts affiche l’année 1886 au compteur de sa première page.
La polémique est donc lancée entre boulangers modernes et artisans boulangers traditionnels comme si la modernité (et son lot de contraintes) était une avancée sociale, une voie de progrès certaine, une obligation nécessaire pour l’avenir… !!!
En fait, nous nous trouvons devant deux visions de la boulangerie, c’est pour le moins certain :
• Des boulangers qui se disent modernes parce qu’ils veulent ouvrir 7 jours sur 7, souvent peu ou pas impliqués physiquement dans les entreprises et pour la plupart, avant poste de l’industrie de pâte congelée à cuire.
• Des couples d’artisans, boulangers et boulangères authentiques professionnels qui eux, étant fortement impliqués à la production et à la vente de nombreuses heures, trouvent normal de prendre ensemble, un repos d’une journée par semaine.
Les premiers, les modernes, rêvant d’un marché où ils auront pu étouffer toute concurrence autour d’eux où seul le chiffre d’affaires donne le droit de tout faire et de faire n’importe quoi sur l’autel du profit de quelques intérêts privés.
Les seconds (les traditionnels) veillant (autant peut il se faire !) à maintenir un réseau de distribution du pain sur l’ensemble du département par des petites entreprises à taille humaine, à la Française, très largement utile et nécessaire à nos quartiers et à nos villages, veillant de plus fort, au respect de valeurs morales et professionnelles, au droit d’exister et de vivre de sa petite entreprise.
C’est aussi les traditionnels qui forment les plus jeunes pour les munir d’un vrai savoir faire garant de leur avenir professionnel, apportant au cours de la formation, les vrais repères qui font défaut dans l’entourage familial.
Quand on réclame le droit d’ouvrir 7/7 jours, cela ne peut pas s’adresser qu’à soi même, on doit bien entendu s’attendre, que ce même droit soit accordé à l’ensemble du commerce petit ou gros et de toute nature, « est-ce véritablement cette société là que nous voulons ? »
Qui pourrait souhaiter pour l’avenir, d’aller chercher pain et croissant du dimanche matin et des autres jours à la grosse boulangerie moderne la plus proche, ouverte 7/7 jours et distante de 15 ou 20 Km.
Beaucoup de jeunes professionnels s’engagent à nos cotés, créent ou reprennent une entreprise de boulangerie artisanale, passionné par le métier et respectueux de ses racines, preuve irréfutable, que malgré les années nous allons toujours de l’avant….
Aussi, pour notre part nous sommes fiers de défendre cette qualité de vie à la française que nous envie le monde entier, parce qu’elle reste, malgré le virtuel, la modernité, le grand libéralisme, une valeur sûre, à laquelle aspirent tous nos concitoyens : celle de la proximité, du respect de l’autre, de la reconnaissance du travail bien fait.
A l’heure où nos parlementaires ont bien travaillé sur le travail du dimanche, nos partenaires sociaux, tous syndicats de salariés confondus ne s’y sont pas trompés et restent résolument attachés à la fermeture hebdomadaire des boulangeries.
La Chambre Syndicale Patronale de la Boulangerie demande instamment aux autorités de prendre conscience de ce qui se joue !
Dans cette polémique, scandaleuse, pour le moins menée par et pour des intérêts commerciaux privés, électrons libres du profit à tout prix, franchiseurs franchisés de tout poil, ces prédateurs polluent notre profession depuis des années en signe de modernité et aspirent à la liberté de polluer les demains et les lendemains de nos enfants et de nos petits enfants.
Nous souhaitons bon vent et saine concurrence aux vendeurs de pains modernes, nous restons quant à nous les garants de vraies et saines valeurs, du respect des femmes et des hommes de notre métier, et du pain artisanal authentique.
Bruno Cabut Président de la Chambre Syndicale des Artisans Boulangers du Rhone