Travailler le dimanche : un facteur de relance économique ?

Cet article a été publié par Ecotidien, le blog d’Edouad Leclerc « qui vous dit tout de la consommation ». Leclerc est très ambigu sur le travail du dimanche : bien que M. Leclerc se soit prononcé « plutôt contre » le travail du dimanche, nous avons remarqué beaucoup de ses magasins, franchisés relativement indépendants il est vrai, qui proposent des promotions valides uniquement le dimanche, afin d’augmenter la présence de consommateurs dans les rayons, le dimanche.

Il n’en reste pas moins que l’auteur de l’article note plusieurs points que nous n’avons cessé de dénoncer : le risque qu’il fait peser sur le commerce traditionnel, l’absence de volontariat réel, le choix culturel profond qu’il représente. L’auteur note, de plus, qu’aucun impact sur la consommation ne peut être décelé (bien qu’il soit sans doute un peu trop tôt pour en faire un bilan.)

Piégé comme beaucoup par la communication du Dr Mallié, l’auteur, qui est sans doute journaliste débutant, tombe dans le même piège que tout le monde en s’étonnant que s’ils sont 55 % à « être défavorables au travail du dimanche, ils sont 52% à être favorables à l’ouverture des magasins le même jour » : il s’agit là de l’emploi d’une technique de désinformation bien connue, la technique de l’amalgame. En effet, la formulation des questions du sondage cité a permis d’inclure dans ces 52% de « favorables au travail du dimanche » les personnes qui sont simplement favorables au fonctionnement des services nécessaires le dimanche, ainsi qu’à l’ouverture des magasins d’alimentation et des marchés le dimanche matin, bref la situation telle qu’elle était légale avant le vote de la loi Mallié.

Ecotidien, 9 Novembre 2009

Au nom de la relance économique, les dimanches seront consacrés au travail pour les parents, à la garderie pour les enfants, et au shopping pour tous les autres. Cette législation est-elle une progression économique ou un recul social ?

Le travail du dimanche constitue une controverse problématique : d’un côté, le gouvernement et les employés qui travaillent déjà le dimanche, et qui tiennent à leurs 300 euros mensuels supplémentaires. De l’autre, les syndicats, des hommes politiques, et une partie de l’opinion publique pour qui le travail du dimanche constitue une régression et une atteinte au droit du travail, les avis sont très partagés. Les français sont ils prêts à s’adapter à une telle révolution sociale ? Quelles sont les répercussions de la nouvelle loi sur leur consommation?

Trois mois après le vote d’un nouveau texte de loi sur le travail dominical, les français se déclarent plutôt hostiles au travail du dimanche : 55% d’entre eux, selon un sondage effectué par Obéa-Infraforce pour France Info, sont contre le travail dominical (ce qui est moins le cas des habitués du travail du dimanche : aides-soignants, boulangers, policiers ou encore cuisiniers). Ce sont majoritairement les 72% de salariés non-concernés par le travail du dimanche qui résistent (65% de ceux-ci ne se déclarent pas prêts à travailler le dimanche. Ainsi, la nouvelle loi entérinée de justesse (165 contre 159 voix au Sénat) le 15 Juillet, a suscité la polémique même au sein de l’UMP.

Le débat est en premier lieu culturel. Autoriser le travail le dimanche, même si ce n’est que dans les PUCE (périmètre d’usage de consommation exceptionnelle) et dans les zones touristiques, pourrait élargir à toutes les zones commerciales le phénomène, et ainsi à menacer le commerce de proximité, et éradiquer la tradition française du repos dominical, jour que l’on consacre à  la famille, au profit du capitalisme et de la consommation à outrance. « Nous sommes dans un monde moderne », explique Vincent, manager pour une enseigne de bricolage ouverte le dimanche « il faut que les français acceptent que certains choisissent, pour des raisons financières, mais aussi parce que le repos dominical est dépassé, de travailler le dimanche».

Le jeune homme insiste sur le fait que ses employés, quant à eux, sont totalement pour le travail du dimanche, qui leur permet d’être payés un double salaire. Pour des enseignes comme celle de Vincent, il semble urgent de légiférer une situation qui dure depuis plusieurs décennies, et dont les protagonistes se satisfont pleinement. Etudiants, mères de famille ou encore célibataires se déclarent souvent soulagés par les salaires du dimanche. Cependant, pourrait-on répondre, c’est peut être la question des salaires en général qui est à revoir. Les employés qui défendent leur travail dominical insistent aussi sur le fait que ces horaires sont établis sur la base du volontariat.

Mais quant à cette notion de volontariat, il est fort probable que des employés, comme c’est déjà le cas, subissent des pressions pour travailler le dimanche. Si le texte est censé protéger les employés du bon vouloir de leurs supérieurs, dans la pratique, la revendication peut s’avérer, comme le craignent les syndicats, plus complexe : « Le dimanche est le seul jour où je peux profiter de ma famille au complet, et, après avoir essayé une fois de refuser de travailler un dimanche, je préfère me taire et faire ce qu’on me demande, car j’ai trop peur qu’on ne me renouvelle pas mon CDD », déplore Sanaa, jeune mère de famille. Pour les détracteurs du travail dominical, le volontariat est totalement factice, de par la subordination salariale, mais aussi sociale de l’employé à l’employeur.

L’économie constitue un des arguments majeurs en faveur du travail dominical. L’ouverture des commerces tout au long du week-end permettrait de consommer plus, et donc de relancer l’économie, surtout dans la région parisienne où, faute de temps, la majorité des achats sont effectués le week end.

La consommation a-t-elle pour autant augmenté ?

Les français, peut-être en hommage à François Mitterrand, font encore une fois preuve de contradiction : s’ils sont légèrement majoritaires à être défavorables au travail du dimanche, ils sont 52% à être favorables à l’ouverture des magasins le même jour. Néanmoins, plus de 56% de la population ne fréquente pas plus les magasins le dimanche depuis Juillet dernier. La consommation des ménages n’a quant à elle pas augmenté: malgré un rebond de +2,3% en septembre, la consommation des ménages accuse d’une légère baisse (-0,2%) sur l’ensemble  troisième trimestre*, un phénomène dont témoigne également la profusion de soldes et de promotions que proposent les enseignes généralistes ou de prêt-à-porter. Il semblerait, ou peut-être est-ce le temps de changer nos habitudes, que les dépenses soient davantage réparties mais pas accrues par cette nouvelle législation : « Je profite de l’ouverture des magasins le dimanche, mais je ne dépense pas plus au final», témoigne une internaute. En général, le chiffre d’affaire des grandes enseignes n’a pas connu de progression notoire. De toute évidence, si l’on s’en tient aux chiffres, la consommation n’a pour l’instant pas été augmentée, ni l’économie « reboostée » par la législation du travail dominical. Reste à voir si, avec le temps, les français modifieront leurs habitudes sans oublier que l’ouverture des magasins le dimanche était déjà répandue avant ce 15 Juillet.

Et vous, consommez vous plus depuis cet assouplissement ? Etes vous plutôt adeptes du  shopping dominical ou le boycottez vous ?
Juliette Speranza

*Chiffres INSEE

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