Sud Ouest, Haude Giret, 13/11/09
Quotidiens, les exemples de stress dans le secteur commercial du Grand Angoulême ? À entendre la CGT, « depuis un an, c’est même plusieurs fois par jour que des gens nous téléphonent. » Sur les 80 adhérents syndiqués depuis janvier que la section des salariés du commerce existe, Daniel Bouyer, son secrétaire général, ne cache pas que la majorité a pris sa carte à la suite de difficultés.
Prêts à craquer
Délégués du personnel et salariés partagent un même constat : « Tout le monde est sous tension ». Ils décrivent des hommes de 50 ans qui se mettent brusquement à pleurer, des employés qui s’entendent asséner que s’ils ne sont pas contents, « il y a des gens à la porte qui n’attendent que de prendre notre place ».
Cette phrase-là, tous autour de la table l’ont entendue. À commencer par Brice et Élodie (1). Ils travaillaient dans une moyenne surface de l’agglomération. Elle au rayon charcuterie, lui à la boucherie. Elle a été licenciée, lui mis à pied trois jours. Il se trouve actuellement en arrêt maladie.
On leur reproche d’avoir tenté de sortir des produits périmés du magasin. L’usage est fréquent. Élodie pensait avoir la permission de sa supérieure. Elle conclut « de toute façon, le directeur ne m’aimait pas. J’avais sans arrêt droit à des réflexions depuis que je m’étais coupé le doigt la deuxième fois ». Les déléguées du personnel hochent la tête, « deux accidents du travail, ça ne pardonne pas ».
Entre l’incident et l’annonce de la sanction, les deux salariées décrivent des pressions répétées. Quant à Brice, depuis que certains ont repéré sur internet une photo évoquant sa vie privée, il voit se multiplier les propos homophobes.
Les deux salariés évoquent encore des vacances interrompues, 42 heures par semaine payées 35, l’obligation de ne pas s’approcher les uns des autres à moins de deux mètres à cause de la grippe A. « On nous disait : pensez au chiffre, si vous êtes malades ! »
Le problème du dimanche
Les deux salariés ont porté plainte contre le directeur du magasin. D’autres incidents sont mis en avant au même endroit : injures racistes pour l’un, bifteck à la figure d’un autre, une salariée prévenue un vendredi soir qu’elle doit travailler le week-end…
Le travail du dimanche, justement. « Des jours fériés, sur les 11, il nous en reste trois : le 1er mai, le 25 décembre, le 1er janvier », lance une déléguée du personnel, désabusée. Une autre fait ses comptes : « Hier (le 11 novembre), je suis venue travailler trois heures pour 13,50 ? de plus. Les gens croient qu’on est mieux payés, qu’on est volontaires. » Daniel Bouyer se demande comment n’être pas volontaire quand on travaille si peu d’heures. « On le comprend, qu’une personne à temps partiel dise oui. C’est dans le commerce qu’il y en a le plus. » C’est aussi dans le commerce qu’il y a le plus faible taux de syndicalisation. Même pas 3 %.
La CGT estime qu’il y a de quoi s’alarmer. Première étape, « on commence à collecter les témoignages ». Le 23 novembre, le syndicat donne rendez-vous au Nil à 20 h 30 à tous les salariés qui veulent s’épancher ou partager.
(1) Leurs prénoms ont été changés à leur demande pour préserver leur anonymat.