Alors qu’ils ont invoqué des raisons familiales, trois personnes du magasin de hard discount alimentaire Ed à Oyonnax ont été licenciées pour avoir refusé le travail dominical
Je suis caissière chez Ed depuis cinq ans. Enfin je devrais dire, j’étais ». Mi-juin, Etelvina Fernandes a reçu une lettre de licenciement de son employeur. Au motif « d’insubordination et de refus de se plier au planning ». Elle est aujourd’hui en préavis jusqu’au 17 août. Tout comme deux de ses collègues, Élise Kongo et Rath Luang.
Au cœur de leur histoire commune, le travail du dimanche. « C’est une question qui est en discussion depuis janvier 2009 dans les magasins Ed. La direction nous a expliqué qu’elle voulait ouvrir les dimanches matins. D’abord sur la base du volontariat avec un roulement et une majoration du salaire de 20 %. Les salariés ont été convoqués individuellement pour en discuter », se souvient Etelvina. « J’ai immédiatement expliqué, que pour des raisons familiales, je ne pourrais pas venir le dimanche matin pour l’instant. Ce n’est pas que je ne veux pas, c’est que je ne peux pas », explique cette maman. Le dimanche, Etelvina Fernandes reconduit en voiture son fils Nicolas au Mans. À 1 300 kilomètres aller-retour d’Oyonnax. Le jeune homme est inscrit en sport-études de football américain. « C’est sa passion. C’est loin de la maison certes mais il n’existe rien de plus près dans ce sport alors on s’est organisé pour lui. Le dimanche est mon seul jour de congé et je veux le garder pour continuer à m’occuper de mon fils. Il n’a que 16 ans. J’ai cru que la direction pouvait comprendre ça ! On m’a vite répondu que l’ouverture du dimanche se ferait avec ou sans moi », se désole-t-elle aujourd’hui. Et d’avancer un autre argument : « Est-ce que les patrons croient vraiment que je peux sacrifier ma vie familiale pour 5,03 euros de paye en plus en travaillant la matinée du dimanche ? ». Une question que se pose aussi Élise Kongo. « Le 8 mars, Journée de la femme, le magasin Ed d’Oyonnax a commencé à ouvrir le dimanche matin. Nous avons été inscrites de force au planning. Mais nous avons refusé d’y aller », explique-t-elle. Et puis le magasin a fermé mi-mai pour un changement d’enseigne. Il a rouvert depuis sous l’enseigne Dia. Sans les deux caissières. Sans leur collègue, Rath Luang non plus. Pour lui aussi, le travail le dimanche pose un problème familial de taille. « C’est le jour où il voit son petit garçon. Il est séparé de la maman et n’a pas d’autre solution de garde. Les autres jours, il travaille », défendent ses collègues. Les trois salariés d’Ed ont décidé de porter conjointement leur affaire devant les prud’hommes. Une avocate les assiste. « Avec une amplitude de travail de six jours sur sept, il ne reste plus que le dimanche pour la vie de famille. Et les parents doivent s’occuper de leurs enfants, c’est aussi la loi. Alors se pose une question très importante : est-ce qu’il faut sacrifier sa vie pour le travail ? Je ne crois pas. Dans ce dossier, ces trois Oyonnaxiens sont très affectés et déçus par l’attitude déshumanisée de l’entreprise Ed. L’employeur peut organiser les horaires certes mais pas n’importe comment », s’insurge maître Inès Plantureux.