Les commerçants de France, entre colère et désespoir

C’est une charge dans laquelle perce un certain désespoir, à laquelle se livre la Confédération des Commerçants de France.

Elle relève certains inconvénients gravissimes du projet de loi Mallié, et notamment l’accentuation de la désertification des centre-ville, déjà commencé avec la LME, avec en corollaire la poursuite de l’inondation de notre marché intérieur par les produits asiatiques.

Elle relève aussi cette autre carabistouille géante à la sauce Mallié : dans la zone de Lille, il n’existe pas d' »usage de consommation de fin de semaine », et tous les centres commerciaux de Belgique sont fermés !!

CDF, courier remis à tous les députés le 02/07/09

Nous ne comprenons pas cet acharnement à vouloir faire mourir les commerces de proximité et de centre ville et sans cesse vouloir faire passer par tous moyens, cette fois-ci au mois de juillet, une loi sur les ouvertures du dimanche en faveur « des périmètres de consommation exceptionnel» (PUCE), c’est-à-dire les centres commerciaux de périphérie.

En effet, est-ce normal et démocratique que cette loi si importante tant au point de vue vie familiale, vie culturelle, sportive et surtout économique – en raison des conséquences en terme de pertes d’emploi dans les commerces de centre-ville et de proximité qui emploient vendeurs et vendeuses – soit débattue en juillet, période où les citoyens sont en vacances, les journalistes à la plage, et les bancs de l’Assemblée Nationale désertés ?

Il faut savoir que les centres commerciaux de périphérie vendent, hors alimentaire, plus de 80 % de produits en provenance des pays du sud-est asiatique et à forte marge alors qu’à l’inverse les commerces de proximité et de centre ville spécialisés avec vendeurs et vendeuses qualifiées vendent des produits de fabrication française et européenne à faible marge en raison du coût de la main d’oeuvre.

N’est-ce pas immoral et injuste que ce texte propose de rendre légal les ouvertures de la poignée de centre commerciaux ouverts toute l’année et depuis longtemps dans l’illégalité la plus totale au détriment des emplois des commerces de centre ville et de proximité qui sont restés dans la légalité ?

Le plus bel exemple est la zone de « Plan de campagne » si chère au Député des Bouches du Rhône Richard Mallié devenue en ouvrant illégalement comme il le déclare depuis 40 ans l’un des principaux centre commercial de France faisant perdre des milliers d’emplois en semaine dans toute sa région : ce qui est une évidence.

La loi de Modernisation de l’Economie va déjà entraîner inexorablement la disparition des commerces de proximité au profit des grands commerces de périphérie et ce au détriment des fabrications françaises et européennes. En effet, tant l’accroissement des grandes surfaces – alors que la France a déjà la plus forte densité au monde d’hypermarchés par habitant – que le raccourcissement des délais de paiement et la possibilité de faire des rabais toute l’année (fin de série et soldes flottants) sont des dispositions qui vont entraîner la mort des commerces de proximité et de centre-ville au profit des centres commerciaux de périphérie ; ce qui aura des conséquences graves sur l’industrie française et européenne car ce sont leurs principaux clients.

Alors pourquoi les assommer définitivement en créant une loi inopportune sur les ouvertures du dimanche ?

1.1. Le chantage à l’emploi des grands commerces de périphérie en situation illégale pour obtenir une modification des règles du repos dominical n’est qu’un leurre.

1.1.1. Aucun des centres commerciaux, chaines de magasin ou galeries marchandes qui ont été obligés de respecter les règles du repos dominical n’a procédé à des licenciements. Certains centres commerciaux se sont, par ailleurs, agrandis (QUAI DES MARQUES de l’île Saint Denis…)

1.1.2. L’augmentation du chiffre d’affaires de ces magasins illégalement ouverts le dimanche ne traduit pas une consommation supplémentaire. Elle s’explique par le fait qu’il s’agit d’un simple déplacement de l’acte d’achat en leur faveur au détriment des commerces qui respectent la règle du repos dominical.

Sans consommation supplémentaire aucun accroissement du chiffre d’affaires n’est possible.

Ainsi, le secteur de l’ameublement qui bénéficie légalement d’une dérogation à la règle repos dominical depuis le mois de janvier 2008 démontre que l’ouverture des magasins le dimanche n’a pas engendré de consommation supplémentaire. La Société Conforama a annoncé, il y a à peine trois mois, qu’elle allait licencier 800 personnes en raison d’une perte de chiffre d’affaires record de 50 millions d’euros.

L’ouverture dominicale des magasins ne permet pas aux clients de consommer plus et par voie de conséquence de favoriser l’emploi.

L’étude du CREDOC du mois de novembre 2008 démontre même le contraire. Selon cet Institut l’ouverture des commerces non alimentaires le dimanche sans augmentation du pouvoir d’achat – ce qui est le cas en période de crise – entrainera 5.400 pertes d’emploi.

De même, l’exemple de la Grande-Bretagne est, à cet égard, tout à fait significatif. Les commerces y sont ouverts 7 jours sur 7 et il ne reste plus que 400 chausseurs qui vendent avec vendeurs et vendeuses, alors qu’en France ils sont encore 6000 et qu’en Italie où il n’existe aujourd’hui que 500 hypermarchés, ils sont encore 22 000 chausseurs (chiffre officiel européen).

La proposition de loi Maillé aura, donc pour effet d’amplifier les déplacements d’actes d’achat dans les PUCE au profit des centres commerciaux de périphérie au détriment des commerces de centre-ville qui verront leur chiffre d’affaires diminuer. Certains se contenteront de licencier du personnel, d’autres fermeront définitivement entrainant d’importantes pertes d’emplois.

1.2. De plus en période de crise, il est impensable que l’on favorise la hausse des prix ; or ouvrir 7 jours sur 7 au lieu de 6 jours sur 7 amènera forcément 1/7e de charge supplémentaire donc une hausse systématique de 15 % ceci à salaire égal.

Des spécialistes, comme le PROCOS, estiment que si les salaires doivent être majorés de 100 %, ainsi que le prévoit la proposition de loi Mallié, les prix devront être augmentés de 27 % pour qu’un magasin reste rentable.

Les hypermarchés le savent bien, c’est la raison pour laquelle ils sont opposés à l’ouverture dominicale en dehors des dimanches de décembre et le premier dimanche des soldes d’été et d’hiver.

Il est à remarquer que les hypers et les commerces de proximité sont tout-à-fait d’accord pour limiter très strictement les ouvertures du dimanche car du point de vue économique il faut choisir entre majorer les prix au détriment du consommateur ou supprimer des emplois en raison des charges supplémentaires.

1.3. La proposition de loi de Richard Mallié va à l’encontre des propositions du Conseil Economique et Social qui est de réserver cette possibilité qu’aux seules petites surfaces de vente de proximité et de centre-ville en deçà de 300 m2 (comme le modèle espagnol). Selon son cette étude, c’est seulement dans cette hypothèse que l’ouverture dominicale pourrait être bénéfique pour l’économie ; alors que la présente proposition de loi propose l’inverse l’ouverture des centres commerciaux de périph
érie….

1.4. Autre erreur contenue dans la proposition de loi Mallié, elle considère, à tort, qu’à LILLE, il existerait un Périmètre d’Usage de Consommation Exceptionnel. Il y est prétendu que les commerces belges feraient concurrence aux commerces lillois. Ceci est faux et ne repose sur aucune preuve.

Aucun centre commercial n’est ouvert en Belgique et aucun commerce de centre ville frontalière comme Courtrai, Mouscron ou Tournai ne sont ouverts pas plus qu’en France hormis – comme en France – les commerces alimentaires, les fleuristes, les restaurants, et dans les zones touristiques.

Aucune forme de distribution n’est ouverte le dimanche dans le Nord en toute illégalité à l’inverse de Paris ou Marseille (Plan de campagne). La région Nord a toujours été exemplaire à ce sujet. Il suffit qu’une enquête soit diligentée sur l’agglomération Lilloise pour le constater.

1.5. De même, les développements de la proposition de Loi Mallié concernant le volontariat, outre le fait qu’ils sont juridiquement inexacts, sont illusoires, car la notion de volontariat est antinomique, la notion de contrat de travail repose sur un lien de subordination.

Les baux des commerçants installés dans les centres commerciaux de périphérie contiennent une clause les obligeant à ouvrir le dimanche faute de quoi ils se verront expulser sans indemnités. Que deviendront tous ces commerçants qui ne pourront pas respecter leurs obligations ? Seront-ils expulsés et en même temps spoliés ? Légalement OUI, hélas.

1.6. Par ailleurs, en matière de rémunération, la proposition de Loi Mallié conduit à une distorsion de concurrence entre les commerces d’une même ville (inclus dans une PUCE) et a une injustice pour les salariés. Où est l’égalité de concurrence entre les commerces et entre les commerces d’une même branche d’activité ? Où est l’égalité de traitement pour les salariés ?

1.7. Enfin, la proposition de Loi Mallié constitue, contrairement à ce qu’elle prétend, une remise en cause du principe même du repos dominical. En effet, par effet de capillarité (application du principe d’égale concurrence entre les commerces d’une même branche d’activité appliqué par le Conseil d’Etat) de très nombreux autres commerces – que ceux visés par la présente proposition de loi – pourront ouvrir le dimanche. Il suffira qu’ils soient en situation de concurrence avec un commerce bénéficiant d’une dérogation à la règle du repos dominical, c’est-à-dire implantés dans une Commune touristique ou thermale, dans zone une touristique d’affluence exceptionnelle, ou dans une PUCE…

En résumé cette proposition de loi :

  • Va désertifier les centres-villes au profit des centres commerciaux de périphérie (allant ainsi à l’encontre des mesures prises dans le Grenelle de l’environnement pour limiter les rejets de CO2),
  • Induira des dépenses très importantes de la part des Communes pour reconstruire leurs centres-villes
  • Emportera une diminution des commandes auprès des industriels français car les commerces de proximité et de centre ville sont leurs principaux clients,
  • Aura un impact négatif sur l’emploi dans les secteurs du commerce et de l’industrie,
  • Induira une augmentation des prix,
  • Sera source d’inégalité entre les salariés certains seront payés double, d’autres non,
  • Aura un impact négatif sur les secteurs du tourisme car il sera difficile pour la France de conserver sa place de première destination touristique au monde si ses centres-villes sont désertés de leurs commerces.

En conclusion, la Confédération des COMMERCANTS DE FRANCE est contre la proposition de Loi Mallié. En revanche, elle d’accord pour moderniser les textes en matière d’ouvertures des commerces le dimanche, mais de manière juste et équitable pour l’ensemble des commerçants et des salariés.

Ne modifions pas un modèle qui contribue à l’attractivité de la France et à sa renommée mondiale par ses commerces de créativité et de conseils.

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