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Valeurs Actuelles, le 28/04/09, par Laurent Dandrieu, Rédacteur en chef adjoint Culture
Quelle mouche a piqué Brice Hortefeux ? Annoncer, à quelques jours des défilés syndicaux du 1er mai, le dépôt d’une nouvelle proposition de loi sur l’extension du travail le dimanche ; donner cette information un dimanche et, cerise sur le gâteau, que ce soit un ministre qui se charge d’annoncer ce qui est censé être une initiative parlementaire : tout cela ressemble à s’y méprendre à une provocation.
Si l’on ajoute que cette annonce pour le moins prématurée (la proposition de loi, qui n’a pas encore d’auteur bien qu’elle ait déjà un contenu, ne sera pas inscrite à l’ordre du jour avant juillet) coïncide avec une nouvelle montée des chiffres du chômage (63 400 chômeurs supplémentaires en mars, ce qui porte le total de demandeurs d’emploi à 2,44 millions), tandis que de plus en plus d’entreprises mettent partiellement leurs employés au chômage technique, cette nouvelle offensive contre le dimanche paraîtra pour le moins décalée.
Et même carrément surréaliste si l’on entend le ministre du Travail expliquer sur tous les tons sa volonté de « bien souligner qu’il ne s’agit pas d’une remise en cause du repos dominical ». On a beau être habitués, à chaque fois que l’Europe fait un pas vers la supranationalité, à entendre nos gouvernants nous expliquer que c’est pour mieux défendre l’Etat-nation, ce genre de grand écart orwellien n’en écorche pas moins les oreilles.
Sans revenir une fois encore sur la contradiction criante d’une politique qui se veut « de civilisation » tout en détricotant, maille à maille, tous les repères qui distinguent une société civilisée d’un simple agglomérat d’individus, on comprend mal au nom de quelle pseudo efficacité économique il faudrait consentir cette nouvelle entorse au principe du repos hebdomadaire : alors que la crise économique et financière met le pouvoir d’achat à rude épreuve, qui peut sérieusement croire que l’ouverture des hypermarchés un jour de plus va miraculeusement inciter les gens à dépenser davantage ?
La veille de l’annonce de M. Hortefeux, “le Monde” publiait en une un article montrant que « les consommateurs boudent les grandes surfaces », le directeur du Credoc y voyant même un signe de « la fin de l’ère de l’hyper-consommation ». Apparemment, au gouvernement, on n’est plus abonné au “Monde”…