La Voix du Nord, 20/02/09
Dans les archives de la « Tribune du mineur », la contribution historique à l’opposition au travail du dimanche…
Les fêtes et les soldes passées, on parle un peu moins du travail du dimanche. Il serait toutefois naïf de croire le débat enterré. Il reviendra au sommet de l’actualité lorsque le moment sera venu. Un rapide coup d’oeil en arrière permet de le penser.
Le repos dominical a toujours fait partie des préoccupations ouvrières, pour des raisons religieuses parfois, mais aussi parce qu’il était une soupape indispensable lorsque les journées de travail étaient interminables. On sait l’attachement que portent Marcel Barrois et l’association « Mémoires et Cultures de la Région minière » aux très riches archives que détient la Maison Syndicale.
Retour en arrière
André Démarez, journaliste honoraire, aime les compulser et il a mis la main sur un numéro clandestin de « La Voix des Mineurs », une petite feuille ronéotypé et distribuée sous le manteau en 1941 qui évoque le travail du dimanche.
Général Niehoff |
Revenons en arrière pour mieux comprendre les faits. La profession minière dans son ensemble a mené en mai-juin 41, une grève très importante avec plus de 65 000 mineurs participants rien que dans le Pas-de-Calais qui faisait alors partie de la zone interdite.
La baisse de la production qui en a résulté a rendu les occupants fous de rage et le général Niehoff voulait imposer le travail du dimanche afin de rattraper les quotas. C’est devant cette situation que Cyprien Quinet et Nestor Calonne ont signé pour le bureau illégal du syndicat des mineurs ce tract dont nous vous donnons des extraits.
Le style est celui de combattants qui n’ont pas à ménager leurs adversaires. « … Les compagnies minières, pour satisfaire aux exigences de leur maître Hitler s’apprêtent à nouveau à vous faire travailler demain dimanche. Mineurs ! Plus un morceau de charbon le dimanche. Vous avez démontré que malgré les boches et les nazillons de Vichy, la grève est possible, et que vos revendications peuvent aboutir quand vous passez à l’action…. Aussi, refusez de travailler le dimanche. Dès votre arrivée au fond, organisez de larges comités de grève, établissez des cahiers de revendication, faites les parvenir à la direction… Pour la libération de tous vos camarades emprisonnés, pour la journée de repos tous les dimanches, pour de véritables mesures de sécurité… Mineurs du Nord-Pas de Calais en avant ! plus une gaillette de charbon le dimanche… » Dans le contexte répressif qui a suivi la grève (des centaines d’arrestations, les premiers déportés en Allemagne), il fallait du courage et de la détermination pour afficher une telle attitude qui fut payante, puisque les allemands devant cette menace rapportèrent leur décision.
Cette contribution historique met l’accent une fois de plus sur le fonds d’archives très important de la Maison syndicale. Il permet aussi de se rendre compte que le travail du dimanche a toujours été d’une actualité brûlante. •
JACQUES DELIGNE (CLP)