Travail le dimanche : "Ne nous oubliez pas !"

Un excellent article de Critica, le site « pertinent et impertinent » (bon, d’accord, l’accroche est vraiment ringue, mais l’article est très bien dans l’accroche !)

Critica, janvier 09 – Par Nathalie d’Armagnac

On a eu peine à le croire : hier, quelques centaines de manifestants ont défilé dans les rues de Paris aux cris de, « on veut travailler, le dimanche ! On veut travailler, le dimanche ! » On a cru rêver ! Puis y’a cette vidéo aussi, sur le site de nos confrères de l’Express, où Marceline nous explique le plus sérieusement du monde, pourquoi elle tient tant à ce que la loi autorisant le travail dominical soit adoptée, le plus vite possible. Chronique de l’évolution du combat social.

Dites-nous que c’est pas vrai ! A force de nous bourrer le mou avec son« travailler plus pour gagner plus », Sarko a fini par en convaincre quelques uns ! Hier, une poignée d’hurluberlus (« quelques centaines » selon les manifestants, au moins 80 000 selon la police – c’était quand même une manifestation pro-présidentielle !) a défilé dans les rues de Paris aux cris de « on veut travailler, le dimanche ! On veut travailler, le dimanche ! » Déjà, quand on a lu l’info, les yeux nous sont sortis de la tête (façon « loup de Tex Avery« quand il hallucine). Mais quand on a cliqué sur le lien vidéo, attaché à la brève dans l’Express web, on a carrément buggé !

Notre président a été assez persuasif pour convaincre des personnes dans le besoin que l’esclavagisme, ça a du bon : c’est payé double !

On a d’abord pensé aux petits rigolos des Manifestations de droite (allez faire un tour sur Dailymotion, histoire de vous faire une idée – sauf si vous êtes militant de droite, évidemment ! Auquel cas, vous voyez très bien de quoi l’on parle …). Mais il n’est pas concevable qu’un journal du sérieux de l’Express se fasse abuser de la sorte. Puis, le leitmotiv des manifestants n’était pas assez original : « On veut travailler, le dimanche ! »… C’est d’un banal à côté de, « Jésus reviens ! Avec Raffarin ! » ou « On n’est plus chez nous à Paris ! Rendez-nous Tibéri ! », les revendications habituelles de la bande de droitistes du dimanche. 
Il nous a donc bien fallu admettre que la vidéo était un vrai reportage, avec l’interview d’une vraie militante du travail dominical à l’intérieur.

Avec un grand « U », comme Ulcéré

Marceline (appelons-là comme ça, c’est neutre …) nous explique, sans broncher, qu’il faut absolument que la loi autorisant le travail le dimanche passe, et dans les plus brefs délais ! « Elle (la loi) a été présentée avant Noël, et la loi a été reportée, et maintenant elle est reportée à une date Ultérieure (avec un grand « U », comme Ulcéré)… Alors maintenant, on s’inquiète… On veut savoir… Parce que l’on a besoin de travailler ! Les gens qui travaillent, c’est vital pour eux : ils ont des crédits, ils ont des enfants, ils ont des étudiants …  et c’est vraiment très important ! Donc maintenant, on se manifeste pour dire « Ne nous oubliez pas ! » (…). Cette loi, c’est une régularisation. Parce que là, ce qu’on paye, c’est Force Ouvrière (!) qui paie les amendes, c’est personne d’autre… Mais eux, il le prend aussi dans la poche des salariés… parce que cet argent que nos employeurs payent, ça sera en moins… Alors, il nous attaque, il nous empêche de vivre décemment alors que c’est un syndicat qui doit défendre les salariés. »
Entendons-nous bien, on n’a rien contre le travail le dimanche : vous savez, dans nos professions… c’est (menue) monnaie courante – mais c’est pas pour autant qu’on est plus riche, foi de journaleuse ! Ce qui nous chagrine aux entournures, c’est que l’on écorne le symbole du jour de repos pour tous. Et que le « volontariat » dont on nous parle est forcé, contraint par la nécessité d’améliorer sa paye.

Le combat social a bien changé

C’est quand même dingue d’entendre un truc pareil ! Ce qui fait peur, c’est que cela veut dire que notre président a été assez persuasif pour convaincre des personnes dans le besoin que l’esclavagisme, ça a du bon : c’est payé double ! C’est le début de la résignation : au lieu de réclamer une augmentation, des conditions de travail décentes, l’arrêt des plans sociaux sauvages et des délocalisations féroces, on en est à supplier nos dirigeants de libéraliser encore plus un capitalisme qui, non content d’appauvrir les plus pauvres, leur pourrit la vie en les poussant à sacrifier leurs enfants, leur santé, leurs vieux, au nom de l’argent dont a besoin pour consommer, et ainsi contribuer à la relance de l’économie ! Et quand la relance sera sur la rampe, on nous filera la médaille du Travail et du Mérite ?
Décidément, le combat social a bien changé…

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