Libération, 7/1/09 – Nathalie Raulin
Le gouvernement a reporté hier l’examen du texte à une date indéterminée.
Coup de théâtre à l’Assemblée nationale. Hier, à l’issue de la conférence des présidents, la proposition de loi sur le travail du dimanche, dont le chef de l’Etat avait en vain exigé l’adoption avant Noël, a purement et simplement disparu de l’ordre du jour. Entamé en fin d’année dans une ambiance électrique – une partie des députés UMP soutenant ouvertement la bronca de leurs homologues de gauche -, l’examen de ce texte devait reprendre le 15 janvier. Il est finalement repoussé sine die.
Aussitôt la nouvelle publique, les responsables de la majorité se sont relayés pour limiter la casse politique. Objectif : réfuter l’idée d’une reculade de l’Elysée. A peine sorti de la réunion du groupe UMP, le ministre des Relations avec le Parlement, Roger Karoutchi, explose : «J’ai jamais dit « sine die ». Je viens d’en parler avec Fillon. Il le sait que j’ai jamais dit « sine die ». On parle pas d’un renvoi aux calendes grecques, ça reviendra !» Le ministre du Budget, Eric Woerth, lui fait écho : «Ça reviendra. On va pas lâcher comme ça. Nous n’avons pas d’états d’âme.»
Ce nouveau report serait d’abord technique : «L’ordre du jour de l’Assemblée nationale est fixé pour trois semaines», explique Roger Karoutchi. «Cette semaine, c’est le plan de relance. A compter du 13 janvier, on attaque le projet de loi organique sur la réforme de la procédure parlementaire. Or, le PS a déjà déposé 10 000 amendements sur ce texte. Je peux difficilement prévoir moins de deux semaines de débats !» Bref, c’est la faute du PS. Quelques minutes plus tard, le chef de file des députés UMP, Jean-François Copé, suggère toutefois un ajournement plus durable : «Compte tenu des 7 500 amendements déposés par la gauche sur ce texte, on ne peut pas en discuter dans des conditions rapides, argumente-t-il. On va discuter avec le président de la République dès son retour du Proche-Orient. Il faut réfléchir tranquillement de la meilleure formule à adopter.»
Vœux. En réalité, le patron des députés UMP nourrit une arrière-pensée peu avouable. Une fois adopté le projet de loi organique sur la réforme de la procédure parlementaire, la capacité d’«obstruction» de l’opposition sera en effet considérablement amoindrie. A renvoyer le texte sur le travail dominical à fin mars ou début avril, la majorité s’épargnerait donc des débats aussi stériles qu’interminables. Ceci au cas où l’Elysée persisterait à inscrire cette réforme à son programme. Or rien n’est moins sûr. Lors de ses vœux du 31 décembre, Nicolas Sarkozy n’en a pas soufflé mot.
Couloirs. Les députés UMP ne semblent guère plus pressés de rouvrir le dossier. En réunion de groupe, Laure de la Raudière (Eure-et-Loir) a résumé le sentiment général : en pleine crise, les textes sur le logement ou l’hôpital sont autrement plus attendus que la proposition de loi sur le travail du dimanche… Dans les couloirs du Palais Bourbon, François Goulard (Morbihan) est plus explicite encore : «Débattre du travail dominical maintenant était tout à fait inopportun. C’était susciter beaucoup d’inquiétude chez les Français pour des dispositions de portée limitée. Si on le retire, cela fait un ennui de moins.»
La gauche, elle, savoure sa victoire. «La pression populaire contre ce texte a été très forte, jubile le député socialiste Christian Eckert (Meurthe-et-Moselle). On va rester vigilants. La réponse à la crise, ce ne peut pas être de demander aux gens de travailler le dimanche.»
Voir aussi sur le lien « Lire la suite » :
– article du Figaro
– article du Parisien
Le travail du dimanche renvoyé aux calendes grecques
Le Parisien 7/1/09 – Nathalie Segaunes (avec Léa Lejeune)
Nicolas Sarkozy, au Proche-Orient, l’a appris par une dépêche d’agence hier matin : le texte sur l’assouplissement du travail le dimanche, qu’il avait souhaité voir entrer en application au plus vite, et qui avait déjà été repoussé en décembre à cause des longueurs du débat sur l’audiovisuel, est cette fois reporté « sine die », annonce l’AFP hier matin. L’examen du texte , de fait, ne figure pas à l’agenda de l’Assemblée pour le mois de janvier.
« Le président a appelé pour demander ce que signifie sine die », confie Roger Karoutchi, secrétaire d’Etat chargé des Relations avec le Parlement… Le texte qui a divisé lUMP avant d’être vidé de sa substance, et contre lequel l’opposition a déposé 7 500 amendements, n’est pas renvoyé aux calendes grecques, assure Karoutchi, mais simplement retardé. « Cela ne signifie pas que le texte sur le travail le dimanche est mort », lance François Fillon hier matin devant les députés UMP, alors que l’opposition ironise sur la « reculade » de la majorité. « Une grande partie des députés UMP aujourd’hui considère qu’il y a d’autres priorités que le travail le dimanche », affirme le villepiniste Hervé Mariton.
En finir avec l’obstruction de l’opposition
L’embarras de Jean-François Copé, patron du groupe UMP, est évident. « Il ne s’agit pas d’un ajournement sine die, maintient-il. Mais on ne pourra pas discuter ce texte rapidement, et s’il s’agit de prendre trois, quatre ou cinq semaines, ce n’est pas possible. On va en parler avec le président dès son retour ». Copé dénonce une nouvelle fois « l’obstruction » de la gauche: « Si on ne réforme pas notre règlement intérieur, l’opposition est en situation aujourd’hui de bloquer toutes les réformes, puisqu’il n’y a plus de 49-3 », souligne-t-iI. La réforme du règlement de l’Assemblée justement, actuellement en discussion, apparaît à droite comme l’occasion d’en finir avec l’obstruction de l’opposition. « On passera le travail le dimanche une fois le règlement intérieur modifié, quand la gauche n’aura plus aucun moyen de faire de l’obstruction », glisse Chantal Brunei, député UMP de Seine-et-Marne, dont l’électorat, dit-elle, « tient aux réformes ». Ayant bien compris l’intention du gouvernement de restr
eindre le droit d’amendements pour en finir avec les débats à rallonge, le PS débarque en nombre en commission des Lois en fin d’après-midi. « Vous avez tous les pouvoirs, il n’est donc pas absurde de considérer que l’Assemblée doit rester le lieu où l’on parle, lance Manuel Valls. Il est assez logique que l’opposition garde cette capacité à faire durer le débat ». « Trouvezvous choquant que nous ayons passé 70 heures, c’est-à-dire SOmme toute deux fois 35 heures, sur la réforme de l’audiovisuel? » interroge Jean-Marc Ayrault, exigeant le retrait du projet de loi. Même le Nouveau Centre est sceptique : « Vous ne prenez pas la bonne méthode, lance Jean-Christophe Lagarde. Vous avez bien d’autres moyens de rationaliser notre temps ». Le débat sur le travail parlementaire est lancé.
Travail dominical : l’examen du texte reporté sine die
Le figaro.fr avec AFP 06/01/2009
La proposition de loi controversée a disparu de l’ordre du jour de l’Assemblée fixé mardi matin par la Conférence des présidents.
L’ouverture des magasins le dimanche aura donné bien du fil à retordre au gouvernement comme à la majorité. L’examen du texte, initialement inscrit le 15 janvier au menu des députés, est reporté sine die, selon l’ordre du jour de l’Assemblée nationale fixé par le gouvernement jusqu’au 25 janvier et communiqué mardi.
Le gouvernement, semble-t-il, cherche à calmer les esprits. Soutenue par le chef de l’État, la proposition de loi de Richard Mallié (UMP), déposée en avril dernier, a subi de nombreuses modifications visant à amoindrir son contenu, en raison de l’hostilité résolue d’une trentaine de députés UMP. Les négociations internes à la majorité, profondément divisée sur la notion même de repos dominical, n’ont fait que renforcer la combativité des députés socialistes, qui ont déposé plus de 7000 amendements contre ce texte. Deux semaines entières de débats -au lieu d’une initialement- sont d’ores et déjà prévues sur ce texte.
Ambiance électrique
Jusqu’à présent, sa discussion à l’Assemblée nationale -dont le président Nicolas Sarkozy avait exigé qu’elle débute avant Noël pour ne pas donner l’impression de reculer- a été purement symbolique. Les débats n’ont en effet duré que deux petites heures en soirée, le 17 décembre, dans une ambiance électrique qui a obligé la majorité à battre en retraite.
Sur RTL, le secrétaire d’Etat chargé de l’Industrie et de la Consommation, Luc Chatel, a réfuté toute idée de reculade de la part du gouvernement, préférant invoquer un «décalage matériel lié au fait que deux textes qui vont prendre beaucoup de temps arrivent au Palais Bourbon».
A la place de ce débat, l’ordre du jour présenté par le secrétaire d’Etat aux Relations avec le Parlement Roger Karoutchi consacre deux semaines au projet de loi organique sur la réforme de la procédure parlementaire, dont l’examen se poursuivra jusqu’au 22 janvier.
François Sauvadet, président du groupe du Nouveau centre, a estimé que le texte avait été reporté du fait de l’actualité, en particulier les conséquences de la crise financière. Pour François Bayrou en revanche, l’idéal serait «que le sine die dure le plus longtemps possible».
(NDLR : Le Figaro, s’appliquant à mériter son surnom de « Le Figaro-La Voix de son Maître », en est toujours à affirmer l’existence d' »une majorité de français pour l’ouverture des magasins le dimanche » !)