Non au dimanche travaillé !

Le Pèlerin, 2/12/08

Le gouvernement souhaite libéraliser le travail le dimanche. Une proposition de loi en ce sens devrait être débattue à l’Assemblée avant Noël. Ce projet de réforme est dénoncé par l’opposition comme par la majorité ainsi que par de nombreux blogs associatifs et syndicaux.

Commerçants ou personnels de santé, restaurateurs ou agents des transports publics… Près de 3,5 millions de Français, salariés ou indépendants, travaillent déjà, régulièrement, le dimanche – sans toujours bénéficier d’une compensation financière – et quelque 7 millions « sacrifient » occasionnellement leur congé hebdomadaire. Et demain ? Le dimanche, consacré par une loi de 1906 jour de repos obligatoire, est-il condamné à devenir un jour comme les autres ? 

« Garantir le travail du dimanche par la loi »

On le sait, la volonté du gouvernement, dictée par celle de Nicolas Sarkozy, est d’« assouplir » un peu plus encore une législation minée par l’accumulation des régimes d’exception – 181 dérogations au total – et jugée inadaptée aux défis économiques que le pays doit relever. « Les modes de vie évoluent. Les modes de consommation également. Il faut donner davantage de liberté de choix et permettre à ceux qui veulent travailler le dimanche de pouvoir le faire tout en assurant des garanties par la loi », déclarait ainsi, à Pèlerin, le ministre du Travail, Xavier Bertrand en réponse aux nombreuses critiques formulées, tous azimuts, par des politiques, y compris de la majorité, des syndicalistes, des responsables d’associations familiales ou de l’Eglise catholique.

Le débat n’est pas nouveau. « En France, l’un des derniers pays européens à résister à la dérégulation du travail, il ressurgit régulièrement, surtout à l’approche des fêtes », souligne le sociologue Jean-Yves Boulin. Si la polémique prend, cette fois, un tour plus marqué, c’est sans doute qu’elle intervient pendant une crise économique et financière qui marque les limites d’une société tournée vers la consommation et le profit.

Et aussi parce que, pour avancer sur ce dossier, le gouvernement a préféré éviter le dialogue avec les partenaires sociaux, en s’appuyant sur une proposition de loi faite, en mai, par le député des Bouches-du-Rhône, Richard Mallié. C’est sur la circonscription de cet élu UMP que se trouve la zone commerciale de Plan-de-Campagne, 200 hectares dédiés à la consommation où règne la plus grande confusion. En tout cas, l’affaire du travail le dimanche est devenue, depuis, une « affaire d’Etat » qui divise, peu ou prou, la France en deux.

Sauvegarder du temps pour soi, sa famille…

Pour pousser le projet de réforme, les partisans du « libéralisme économique » alignent les chiffres – de l’emploi, des gains en salaires, du chiffre d’affaires des entreprises – et soulignent la nécessité d’une extension du travail dominical, si la France veut gagner des points de croissance. Ils arguent aussi du soutien de l’opinion qui serait prête, selon un sondage, à « travailler plus, pour gagner plus », y compris le dimanche.

Une société peut-elle se réduire à sa performance économique ? L’homme est-il simplement un consommateur ? A côté des lois du marché, n’y-aurait-il plus place pour la gratuité de l’échange ? rétorquent les défenseurs du dimanche chômé. « Pour les croyants, il s’agit de préserver le jour du Seigneur et celui de la messe pour l’ensemble de la société, l’enjeu est de sauvegarder le temps nécessaire pour soi, pour la famille et les enfants, souligne le sociologue Jean-Yves Boulin. Si nouvelle loi il y a, elle devra intégrer cette dimension nécessaire du temps commun, festif et convivial, dédié aux activités culturelles et cultuelles. »

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