Le Parisien, Marie-Anne Kleiber, 09/11/08
Il vient juste de prendre sa retraite, vendredi. Et il « rempile» déjà, à partir de lundi, comme « consultant auprès du comité des Champs-Elysées ». Jacques Perriliat, tout récemment encore président de l’UCV – l’Union du grand commerce de centre-ville -, a accepté cette nouvelle mission.
« Je vais m’occuper de favoriser l’ouverture de tous les magasins de l’avenue le dimanche, c’est-à-dire mettre en forme législative une disposition relative aux Champs-Elysées et aux zones touristiques en France. Mais nous ne voulons pas d’une généralisation de l’ouverture partout le dimanche. » Pour réussir, il saura utiliser son carnet d’adresses d’ancien leader d’union patronale, et faire du lobbying auprès des députés et des sénateurs. Une proposition de loi a été déposée par Richard Mallié, député.
« Un trottoir touristique et un autre qui ne l’est pas »Le comité des Champs-Elysées qui regroupe 95 % des commerces de la « plus belle avenue du monde» veut mettre fin à une situation « absurde», selon Jacques Perriliat. Une situation dénoncée par le président de la République lui-même, qui ironisait fin octobre sur les Champs, où « ils ont trouvé le moyen de mettre un trottoir touristique et un qui ne l’est pas ». En fait, toutes les enseignes n’ont pas obtenu de dérogation de la préfecture (lire l’encadré ci-dessous ) .
« Certains commerces ont obtenu l’autorisation, parce qu’ils vendent des articles de sport. Vous pouvez donc trouver des montres dans ces magasins de sportswear, mais Swatch ou Oméga, deux marques prisées des touristes chinois, n’ont pas, elles, le droit de vendre le dimanche. Où est la logique? » demande Edouard Lefebvre, délégué général du comité des Champs-Elysées. Le comité de la rue des Francs-Bourgeois est sur la même longueur d’onde et parle aussi d’ « injustice» : « Un tiers des magasins a le droit d’ouvrir, les deux autres étant hors la loi, mais on ne comprend pas bien pourquoi Untel a le droit et l’autre pas», précise Patrick Boukrat, président de cette association de commerçants. Son comité est dans « l’attente d’une loi ».
La CGT « opposée à ces exceptions à la règle »En 2007, la préfecture a autorisé 31 nouveaux commerces à ouvrir dans les 7 zones touristiques de Paris, 15 en 2008. La liste des enseignes autorisées et de celles ayant reçu un avis défavorable peut surprendre: un magasin de lunettes de soleil a reçu un feu vert, ce qui n’est pas le cas d’un opticien. Une boutique de déco s’est vue interdite d’ouverture dominicale alors que des magasins d’antiquités et de mobilier d’art ont été plus chanceux. Autre surprise : une boutique d’astrologie a eu le droit d’ouvrir le 7 e jour.
« Nous sommes opposés à toutes ces exceptions à la règle, explique Karl Ghasi, secrétaire général de la CGT commerce de Paris. Ces exceptions génèrent des cas de concurrence déloyale dans les zones touristiques. Et ces situations bancales mènent par petites touches à la déréglementation complète ! Petit à petit, on veut faire travailler l’ensemble de la société le dimanche. » A la mairie de Paris, Lyne Cohen-Solal, l’adjointe chargée du commerce, est plus prudente: « Pour les Champs-Elysées, il faut regarder ce qui sera proposé, mais nous voulons voir les conditions sur les salaires, le volontariat. Pour nous, l’ouverture généralisée dans les zones touristiques provoquerait aussi une hausse encore plus importante des loyers, alors même que nous essayons de maintenir une diversité sur les Champs-Elysées. Notre souci, ce sont les cinémas ou les boulangeries dans le Marais, pas forcément les grandes chaînes! »