La CGT écrit au CAD

Intervention Conférence de Presse 24/11/2008
Par Michèle CHAY, Secrétaire Générale Fédération Cgt Commerce, Distribution et Services.

La dernière proposition de Loi sur le travail du dimanche du Député Maillé sera présentée très prochainement à l’Assemblée Nationale.

La Cgt est opposée à cette nouvelle déréglementation qui aura des conséquences désastreuses non seulement pour les salariés du commerce et des services, mais également  pour l’ensemble des citoyens.

Nous voilà placé devant le risque d’une banalisation du travail le dimanche à très court terme. Alors que les arguments avancés sont fallacieux et trompeurs, nous l’avons mainte fois répété.

Economiquement
En effet la relance de la consommation et de la croissance est directement liée au niveau des salaires et du pouvoir d’achat des citoyens. C’est une logique économique.

L’ouverture des magasins le dimanche serra donc sans effet sur une relance de la croissance. La hausse du pouvoir d’achat ne se décrète pas par l’ouverture des magasins le dimanche.

Un surcroît de consommation ne peut provenir que de l’augmentation des salaires. On voit mal comment les consommateurs dépenseraient le dimanche l’argent qui leur manque la semaine.

C’est bien d’augmentation de salaires que les salariés ont besoin. Un vrai salaire qui démarre à 1600 euros.

Emploi
Sur les prétendus effets positifs sur l’emploi : cela n’est pas attestés par aucune étude économique sérieuse. Par contre cela risque d’accentuer la précarisation des emplois. On verra au mieux des déplacements d’emplois stables en CDI vers des emplois précaires.

On peut noter également les effets pervers sur les petits commerçants et notamment ceux des centres villes.
Même le CREDOC dans une étude prévoit le risque que 15 à 35000 emplois pourraient être perdus dans le petit commerce.
L’UPA et la CGPME dénoncent également cette dérive et les effets de concurrence déloyale

On nous avance comme argument le travail des étudiants, alors qu’il est démontré que 40% des étudiants qui travaillent, abandonnent leurs études.
C’est d’une allocation d’autonomie permettant de financer leur étude, tout en évitant leurs paupérisations que les étudiants ont besoin.

Vie familiale
Le Député Maillé va jusqu’à avancer l’idée que des mères de familles puissent y trouver un avantage.
Pour les mères de familles et notamment les familles monoparentales le travail du dimanche n’est pas compatible.
Elles représentent 60% des travailleurs pauvres, elles sont nombreuses dans le secteur du commerce et des services, souvent à temps partiel imposé.
Ce n’est pas en leur proposant de travailler le dimanche que les conditions de vie et de travail vont s’améliorer.
C’est bien un emploi à temps plein et une augmentation du pouvoir d’achat qui est nécessaires pour faire face aux besoins.

Les familles souhaitent s’occuper de leur enfant et profiter de leur famille les dimanches. Et puis qui gardera les enfants ?

Les activités de services sont également concernées
Bien sur on peut toujours ouvrir les crèches comme l’avance Mr Châtel !
Dans les faits ce ne sont pas seulement les commerces qui sont dans le collimateur du gouvernement et du patronat, mais l’ensemble des activités de service.
Telle est l’ambition que se fixe la loi « Maillé ». Demain, les banques, les crèches, le nettoyage, le transport avec les livraisons supplémentaires etc.

Socialement
Pour la Cgt, le repos dominical doit rester un espace de repos commun à la majorité des citoyens/salariés.
C’est un moment de cohésion sociale structurant de la société française.
A l’inverse de la banalisation du travail dominical, n’avons nous pas préserver et à améliorer la vie familiale, associative, culturelle et sportive ?

Les aspects dérogatoires
Pour Le Député des bouches du Rhône, il s’agirait de mettre de l’ordre dans les multiples dérogations.
Hors cette proposition va créer un nouveau cas de dérogation, en instituant des « zones d’attractivité commerciale exceptionnelle » dans des « unités urbaines » de plus d’un million d’habitant. Paris, Marseille, Lyon et Lille.

On voit bien par cette manouvre une façon de régler le cas de plan de campagne et des zones commerciales en région parisienne, ouvertes sans autorisation et répondre à la volonté du Président Sarkozy qui s’étonne de la situation des Champs-Elysées.

Cette situation c’est Edouard Balladur, alors Premier Ministre, qui l’a créé en 1993 en inventant les « zones touristiques d’affluence exceptionnelle » et en faisant la liste des activités susceptibles d’autoriser l’ouverture tous les dimanches, (dans le même temps, le nombre d’ouverture des magasins est passé à 5 au lieu de 3 auparavant).

En définissant une Loi pour tous les commerces de détail, et non seulement ceux à dominante culturelle, récréative ou sportive, la proposition de Maillé mettrait fin à une situation qualifiée d’ubuesque par Sarkozy. Tous les magasins sur les Champs-Élysées pourront ouvrir !
Et bien sur cela permettrait aussi aux magasins qui ont ouverts illégalement de mettre fin aux contentieux juridiques en cours.

On nous dit volontariat et instauration d’un droit de refus en renvoyant à la responsabilité aux syndicats de vérifier. Sans que ceux-ci n’aient aucun moyen de le faire. Sans parler des entreprises dépourvues de représentants syndicaux qui sont très nombreuses dans ces secteurs.

On connait la faiblesse des salaires dans le commerce et les services, alors seuls sont volontaires, une minorité de salariés qui tentent de boucler leurs fins de mois.

Quand au droit de refus, cela n’est assortie d’aucune garantie.
Le travail du dimanche sera évidemment un critère d’embauche inscrit au contrat de travail, refuser de travailler constituera une faute.

Pour la Cgt , c’est bien un moyen de rendre obligatoire le travail du dimanche à très court terme.

Quelle caissière, quel vendeur osera dire non à son employeur sans craindre les représailles, ou la peur de perdre son emploi tout simplement ?

En utilisant le soi-disant « gagner plus. » et en dévoyant le soi-disant « volontariat » on construit une société où la mise en concurrence des salariés est inacceptable.

Le droit de refus ou la notion de « volontariat » n’a aucun sens pour le travail le dimanche, pas plus que pour les heures supplémentaires, ni pour l’allongement du temps de travail jusqu’à 70 ans.
C’est tout simplement une remise en cause générale de la durée du travail.

Paiement double !
On nous dit majoration des salaires, alors là, on touche à un mensonge honteux.
La proposition de Loi dans les faits ne prévoit pas de « socle minimum » concernant les contreparties qui s’appliqueraient à tous les salariés et renvoie à la négociation collective.

La cerise sur le gâteau.
Le paiement double est prévu seulement dans les entreprises dépourvues de Délégué Syndical où aucun accord collectif n’est applicable.

Il n’y aura donc pas de paiement double à l’ensemble des salariés, contrairement à ce qu’annonce le Gouvernement.

Pire, ce paiement double ne concernera qu’une infime minorité du salariat !
Belle façon de recommander le dialogue social et rendre celui-ci inefficace. Ce n’est pas acceptable.

D’autant que cela va introduire encore des inégalités, inégalités dans les territoires, inégalités dans les salaires pour des salariés travaillant dans une même enseigne.

Prenons l’exemple des magasins d’ameublement, la convention collective prévoyait u
ne majoration le dimanche quand celui-ci été exceptionnel. Depuis la Loi Châtel du 3 janvier 2008 le travail du dimanche n’est plus exceptionnel donc plus aucune majoration n’est accordée.

Mais également dans les magasins à prédominance alimentaire où l’accord collectif de branche ne prévoit pas le doublement de salaire pour un travail habituel le dimanche.

Le dimanche a pourtant la même valeur d’un territoire à l’autre, d’une enseigne à l’autre.

A terme, il n’y aura plus aucune majoration car là aussi, il faudra mettre de l’ordre, cela reviendra à faire du dimanche une journée comme les autres.

L’utilisation des sondages
Le gouvernement s’appuie sur des sondages orientés et manipulés qui sont eux-mêmes contrariés par d’autres sondages.

Notons les résultats du dernier sondage de BVA :

  • 81% des sondés sont POUR le maintien du dimanche comme jour de repos commun, 
  • 68% ne veulent pas travailler régulièrement le dimanche, 
  • 72% n’iraient pas davantage dans les commerces s’ils étaient ouverts,
     77% opposés à l’ouverture du dimanche.

On ne gouverne pas et on ne crée pas des Lois avec des sondages.

Deux autres arguments en contradiction avec cette proposition de Loi.
L’impact environnemental, le surcroît de consommation énergétique en nette contradiction avec le Grenelle de l’environnement qui privilégie une économie de proximité.
Mais aussi l’impact sur les prix.

Pour la CGT, le repos dominical à une majorité de salarié est, et doit rester un repère collectif dans la société.

C’est un élément constituant du vivre ensemble.

Nous ne pouvons accepter une nouvelle déréglementation du temps de travail, après les RTT, la journée de solidarité ce serait les dimanches ?

Alors que l’amplitude des ouvertures varie entre 70 et 80 heures par semaines, que les nocturnes se multiplient comme aux Galeries Lafayette bld Hausmann. Les salariés refusent cette nouvelle attaque qui déstructure leur vie, augmente la pénibilité et le stress au travail.

Les Français comme les salariés du commerce aspirent à préserver cet espace de liberté au bénéfice de la vie familiale, associative, culturelle, sportive, que ce soit à Paris ou dans les autres villes.

Un front divers et large s’exprime contre cette banalisation du travail du dimanche.
L’ensemble des organisations syndicales de salariés y sont opposés.

La Confédération des commerçants de France, l’UPA, la CGPME, sont opposés au travail dominical.
Par ailleurs, plus de 55 députés UMP viennent de sortir une tribune «Touche pas à mon Dimanche» nouveau couac gouvernemental alors que Coppé affirmait un « accord extrêmement large ».

Il est urgent que les organisations syndicales s’expriment d’une seule voix contre ce projet de Loi.

La CGC et la CGT ont décidé en commun d’adresser une lettre ouverte au Président de la République appelant à un grand débat national, pour confronter avec les représentants de la Nation, mais aussi ceux des consommateurs, des familles, de la société civile, de l’enjeu que représente le dimanche, ce temps de repos commun à la plus grande majorité des salariés.

Ce débat doit à notre sens, précéder toute modification de la législation sur les ouvertures des magasins, afin de préserver le repos dominical.

C’est l’ensemble de ces arguments que la Cgt va développer lors de son audition auprès de la Commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale et des Groupes Parlementaires.

Notre campagne de pétition contre la banalisation du travail le dimanche a recueilli plusieurs milliers de signatures que nous irons remettre
le 26 NOVEMBRE A 11H à « l’Assemblée Nationale ». Les députés ne doivent pas voter cette Loi ficelée dans l’urgence pour répondre à quelques lobbies des grandes enseignes.
Des initiatives auront lieu également dans les départements en direction des préfectures.

Nous appelons l’ensemble des salariés et des citoyens à rejoindre ces rassemblements.

En utilisant le bulletin Cgt pour les élections prud’homales du 3 décembre, les salariés du commerce et des services se feront entendre et feront la démonstration qu’ils ne se laissent pas abuser par cette nouvelle proposition qui est un recul social et sociétal.

Je vous invite le 26 novembre à 11h Place Edouard Herriot Paris 7ème pour la remise des pétitions.

Je vous remercie.

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