La CFTC PARIS attaque le Préfet de Paris pour faire respecter le droit au repos dominical dans les entreprises.
A MESSIEURS LES PRESIDENT ET CONSEILLERS
COMPOSANT LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PARIS
REQUETE AFIN D’ANNULATION
A LA REQUETE DE :
L’Union Départementale des Syndicats CFTC de Paris, représentée par son Président, domicilié au siège social de l’Union Départementale 85 rue Charlot 75003 PARIS,
Ayant pour avocat Maître Vincent LECOURT
Avocat au Barreau du Val d’Oise
1, rue Séré Depoin 95300 PONTOISE
Tél. 01.30.38.72.12
Fax 01.30.30.33.50
cabinet.florentin.lecourt@wanadoo.fr
CONTRE :
Un arrêté de Monsieur le Préfet de PARIS en date du 9 janvier 2008 n°2008-9-2, fixant pour l’année 2008 des dérogations collectives au repos dominical pour trois établissements de la branche professionnelle des Grands Magasins.
PLAISE AU
TRIBUNAL
Rappel des faits
Dans le cadre de l’application des dispositions de l’article L.221-19 du Code du Travail, Monsieur le Préfet de Paris a procédé à la consultation des partenaires sociaux pour définir en concertation avec ces derniers les dimanches où il pourrait être dérogé à la règle du repos dominical.
C’est dans ces conditions que la CFTC a été saisie pour consultation, après que le Préfet ait obtenu les propositions des différentes organisations patronales sur les jours d’ouverture sollicités, et ce, par courrier daté du 22 novembre 2007.
Dans le secteur des Grands Magasins, la consultation a porté sur les dimanche 30 mars, 12 octobre, 7 décembre, 14 et 21 décembre 2008, comme il résulte de ce courrier et de son annexe.
Ensuite de cette consultation, Monsieur le Préfet de Paris a pris un arrêté en date du 11 décembre 2007 fixant à ces dates les jours de dérogation accordées au secteur des Grands Magasins.
C’est dans ces conditions que le Préfet a été saisi d’une nouvelle demande par certains magasins parisiens d’obtenir une dérogation pour la journée du 13 janvier 2008 afin de pourvoir à une opération commerciale.
Sans la moindre concertation et sans prendre l’avis des organisations syndicales, le Préfet de Paris a, par l’arrêté contesté, modifié les dates des dérogations pour satisfaire à cette demande pour trois établissements de la branche.
La requérante est fondée à prétendre que l’arrêté Préfectoral pris par Monsieur le Préfet est contraire à la Loi.
Textes applicables :
L’arrêté du 9 janvier 2008 méconnait en effet les exigences de l’article L.221-19 du Code du Travail.
L’article L.221-19 alinéa 2 du Code du Travail est ainsi rédigé :
« Dans les établissements de commerce de détail où le repos hebdomadaire a lieu normalement le dimanche, ce repos peut être supprimé les dimanches désignés, pour chaque commerce de détail, par un arrêté du maire (ou du préfet, s’il s’agit de Paris) pris après avis des organisations d’employeurs et de travailleurs intéressées. Le nombre de ces dimanches ne peut excéder cinq par an.
Chaque salarié ainsi privé du repos du dimanche doit bénéficier d’un repos compensateur et d’une majoration de salaire pour ce jour de travail exceptionnel, égale à la valeur d’un trentième de son traitement mensuel ou à la valeur d’une journée de travail si l’intéressé est payé à la journée. L’arrêté municipal (ou préfectoral, s’il s’agit de Paris) détermine les conditions dans lesquelles ce repos est accordé, soit collectivement, soit par roulement dans une période qui ne peut excéder la quinzaine qui précède ou suit la suppression du repos. Si le repos dominical est supprimé un dimanche précédant une fête légale, le repos compensateur est donné le jour de cette fête. »
La requérante est recevable et fondée à soutenir que l’arrêté pris par Monsieur le Préfet de PARIS est illégal et doit être annulé pour les motifs ci-après.
A – absence de consultation préalable
Il ressort des termes mêmes de l’arrêté préfectoral que les consultations préalables prévues par la Loi n’ont pas été effectuées avant de prendre cet arrêté.
La consultation opérée au niveau de la branche d’activité en novembre, ne concerne que le seul arrêté pris par le Préfet en décembre.
Cet avis préalable est une condition nécessaire à la légalité de la décision (Tribunal Administratif de Dijon – 13 janvier 1987).
Pour être valide, la consultation aurait dû être faite et devait nécessairement porter sur les dates proposées.
Celle opérée concerne d’autres dates que celles qui sont adoptées par l’arrêté.
Le Préfet, en ne procédant pas à la consultation a violé les dispositions légales.
Il ressort clairement des pièces versées aux débats que la consultation n’a pas porté sur la date du 13 janvier 2008.
Les organisations syndicales n’ont donc pu obtenir la moindre observation des sections syndicales avant que la décision n’ait été prise, plaçant les salariés, à quelques jours de la date retenue dans une situation d’autant plus inconfortable que la décision prise en décembre par le Préfet avait déjà été annoncée.
De plus, les organisations syndicales auraient pu rappeler que, pour répondre aux exigences du texte, l’arrêté doit concerner le secteur concerner dans sa totalité.
Il y aura lieu d’annuler par conséquent l’arrêté du Préfet qui a méconnu l’obligation de consultation préalable.
B – L’absence de détermination des modalités de prise du repos compensateur
En outre, et quoi qu’il en soit, pour être valide l’arrêté aurait dû préciser les modalités de prises du repos compensateur et des compensations offertes au salarié.
La réglementation n’accorde donc aucune faculté mais est impérative.
Il a été jugé que les conditions du repos sont indissociables de l’arrêté qui autorise la dérogation à la règle du repos dominical.
« Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que l’arrêté en date du 30 août 2001 du maire de Pierrelaye ne précise pas les conditions dans lesquelles le repos est accordé aux salariés du magasin « la Halle aux chaussures » pour compenser les heures effectuées les dimanches ; que les dispositions relatives aux modalités du repos compensateur ne sont pas divisibles de l’arrêté accordant une dérogation à l’obligation du repos dominical ; que la circonstance, à la supposer établie, que les parties se seraient préalablement accordées sur lesdites modalités est sans influence sur la légalité de l’arrêté litigieux : qu’ainsi, la COMMUNE DE PIERRELAYE n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, par le jugement attaqué, a annulé l’arrêté de son maire en date du 30 août 2001 ; » (CAA VERSAILLES – 9 mai 2006 – Cne de PIERRELAYE – N°04VE02282)
En l’espèce, l’arrêté pris le 9 janvier prévoit en son article 3 que le repos compensateur accordé aux salariés sera pris par roulement dans la quinzaine qui suit ou précède la suppression du repos.
En l’espèce, le Préfet s’est contenté de reprendre la législation sans déterminer, comme la Loi le lui impose de manière précise les conditions d’octroi du repos compensateur.
Il faut ainsi noter qu’en prenant un arrêté le 9 janvier pour une dérogation prévue le 13, la prise du repos dans les conditions du texte était matériellement impossible.
Le seul fait de prévoir un repos par roulement ne répond pas à l’exigence de détermination des dates de repos compensateurs prévus par le texte.
A défaut de respecter le texte, il y aura lieu d’annuler l’arrêté pris par Monsieur le Préfet de PARIS.
C – L’impossibilité de cantonner la décision à certains établissements :
Le Préfet de PARIS a limité les effets de son arrêté du 9 janvier 2008 à trois Grands Magasins de la Branche, nommément désignés, faisant ainsi coexister deux arrêtés différents pour la même branche d’activité, en fonction des établissements concernés.
Ce dispositif prévoyant un cantonnement à une partie des établissements d’une branche d’activité a été jugé illégal et contraire à l’esprit de la Loi.
(CA
A VERSAILLES -23 juin 2005 – Cne de MAUREPAS – N° 02VE03550 mentionné dans les tables du recueil Lebon)
Il y aura lieu en conséquence d’annuler l’arrêté pris par Monsieur le Préfet de PARIS.
D – Les frais et dépens
En tout état de cause, du fait de l’annulation de l’arrêté préfectoral, il conviendra de condamner l’Etat à verser à la requérante la somme de 1.200 Euros au titre de l’application de l’article L.761-1 du Code de Justice Administrative.
En effet, alors que la défense collective de l’intérêt des salariés et de ses membres mobilise déjà les ressources de la requérante, le Préfet de PARIS, en se dispensant des contraintes de la législation appliquée, contraint à saisir le Tribunal Administratif pour obtenir l’annulation d’un arrêté illégal.
PAR CES MOTIFS
ET TOUS AUTRES A PRODUIRE, DEDUIRE
ET AU BESOIN A SUPPLEER D’OFFICE
Vu les articles L.221-5 et suivants du Code du Travail,
Vu l’article L.221-19 du Code du Travail,
Annuler l’Arrêté de Monsieur le Préfet de PARIS en date du 9 janvier 2008 n°2008-9-2,
Condamner l’Etat à verser à l’Union Départementale des Syndicats de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens de PARIS la somme de 1.200 Euros au titre des dispositions de l’article L.761-1 du CJA,
Fait à Pontoise,
Le
En six exemplaires,
Pour la requérante,
Son Conseil
Liste des pièces produites au soutien de la requête en annulation :
1 Arrêté préfectoral n°2008-9-2
2 Lettre de Monsieur le Préfet de Paris au secrétaire général du syndicat CFTC des employés du commerce et annexe (tableau des dimanches collectifs sollicités),
3 Lettre de Monsieur le Préfet de Paris au DRH des Galeries Lafayette du 9 janvier 2008,
4 Mandat en date du 30 janvier 2008 de Monsieur Léandre GUILLAUME d’engager un recours à l’encontre de l’arrêté préfectoral,
5 Extrait du compte rendu du Conseil de la CFTC de Paris en date du 18 janvier 2008,
6 Statuts de l’Union Départementale de la CFTC de Paris,
7 Règlement intérieur de l’Union Départementale de la CFTC de Paris,
8 Composition du Conseil de l’Union Départementale de la CFTC de Paris au 6 avril 2007,
9 Lettre de la Mairie de Paris relatif à l’enregistrement de la modification en date du 17 avril 2007
10 Certificat d’immatriculation de l’Union Départementale des syndicats CFTC de Paris en date du 24 janvier 2008