Le Pèlerin a fait effectuer par TNS SOFRES un sondage exclusif les 16 et 17 janvier 2008, auprès d’un échantillon national de 1000 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus.
Les résultats sont toujours fortement biaisés par l’ambiguités des questions posées. Ainsi, le Pèlerin titre « 53% pour un assouplissement de la règle du dimanche » (tout en notant que la question ne porte que sur l’assouplissement, mais sans aller au bout de l’analyse), que le lecteur inattentif comprendra évidemment pour « 53% des gens sont faviorables au travail dominical » (d’ailleurs, c’est comme celà que nous l’avions nous même compris, aux premières annonces de la radio ;=)
En réalité, ce n’est pas DU TOUT le cas. En effet, la question est formulée de la manière suivante :
Question : Vous savez que certains types de commerce ont le droit d’ouvrir le dimanche. Vous personnellement, êtes-vous très favorable, assez favorable, assez opposé ou très opposé à un assouplissement de la législation pour permettre l’ouverture à d’autres types de magasins le dimanche ?
Posée comme ceci, la question insiste sur l’injustice supposée de conditions inégalitaires, sentiment renforcé par la péripétie scandaleuse de l’amendement Confokea. Comment ne pas répondre oui, bien sûr, assouplissons, surtout quand on ne connaît pas le dossier. Une formulation honnête aurait présenté les motifs des dérogations, et aurait présenté l’alternative logique, la remise dans la légalité des commerces ouvrant illégalement.
Parmi les très favorables à cet assouplissement, on trouve sans surprise les « ados » (18-24 ans), alors que parmi les plus défavorables sont, curieusement, les chômeurs. Une fracture semble se dessiner entre la droite, emmenée par le programme de l’UMP, et la gauche, favorable au repos dominical.
Une question plus claire, du type « Êtes vous favorable à l’extension progressive du travail du dimanche à tous les secteurs d’activité », aurait certainement reçu des résultats différents, car c’est bien là que l’on veut nous mener.
Même chose pour la seconde question, qui ne porte que sur l’ASSOUPLISSEMENT :
Question : Si l’on permettait à davantage de commerces d’être ouverts le dimanche, diriez-vous que …
Là, ils sont 65% à répondre que ce serait la perte d’un moment important pour la vie familiale et sociale, la perte d’un droit acquis. Pas de surprise.
L’argument économique ne convainc pas non plus, les opinions contraires s’équilibrant (ce sont surtout les classes les plus aisées, qui ne croient pas à l’interêt du travail du dimanche pour « libérer la croissance », selon l’expression chère à M Attali.
Ce sondage n’apporte donc pas grand chose de nouveau : on y trouve toujours le grand attachement des français pour ce moment important, avec le souhait un peu paradoxal, surtout pour les très jeunes des centres urbains, d’aller acheter des Nike le dimanche. Même chose, il serait intéressant de demander à ces mêmes très jeunes s’il sont très favorables, ou moyennement favorables, à la perspective de travailler le dimanche, qui comme caissier, qui comme vendeur, dans ces mêmes magasins…
Sur le lien lire la suite : l’analyse du Pèlerin, la dépèche Reuters
L’analyse du Pèlerin
Très favorable |
18 % |
Assez opposé |
21 % |
Assez favorable |
35 % |
Très opposé |
22 % |
Total favorable |
53 % |
Total défavorable |
43% |
« Les ‘favorables’ sont devenus majoritaires. C’est nouveau. Notons cependant que la question évoque un assouplissement (quelques dimanches de plus, dans certains secteurs) et non une ouverture systématique. Cela dit, les plus favorables sont les jeunes (72 % des 18-24 ans), les Franciliens (61 %) et la droite politique (63 %), bien qu’un tiers des gens de droite (33 %) ne soient pas ‘favorables». Les catholiques pratiquants se partagent presque à égalité entre ‘favorables’ et ‘défavorables’ » Jean Viard, sociologue.
Pour 65 % des Français, le travail dominical serait une perte pour la vie familiale
|
Total oui |
Total non |
Ce serait la perte d’un moment important pour la vie familiale et sociale |
65 % |
32 % |
Ce serait une réforme en adéquation avec les modes de vie actuels |
62% |
31 % |
Ce serait une atteinte au droit acquis du repos dominical |
61 % |
36 % |
Cela permettrait de favoriser la croissance et l’emploi |
47 % |
48 % |
« Pour les Français, l’extension de l’ouverture des magasins le dimanche, c’est d’abord la fin des valeurs familiales et sociales. C’est aussi pour eux (deuxième position), quelque chose de moderne, d’inéluctable, comme la mondialisation : il faut bien la subir puisqu’on n’y peut rien. On ne sent, en tout cas, aucun enthousiasme en faveur de l’ouverture. Les ouvriers (70%) sont les plus inquiets. Les catholiques pratiquants réguliers sont dans la moyenne (65%). Et là encore, les jeunes (71%) et les habitants des pôles urbains (65%) sont les plus nombreux à trouver l’ouverture « moderne ». Quant à favoriser la croissance et l’emploi par l’ouverture des magasins, l’argument n’a pas convaincu. »
Sondage exclusif réalisé pour Pèlerin les 16 et 17 janvier 2008, auprès d’un échantillon national de 1000 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus.
Sauvons le dimanche !
Extrait du dossier Travail dominical : Sauvons le dimanche !, réalisé par Philippe Demenet pour le Pèlerin n°6531. Photo : Jean-Manuel Simoes/Fedephoto.
René Poujo l, directeur de la rédaction |
Le sondage que nous publions dans ce numéro reflète bien les contradictions de notre société et une forme de résignation qui pose question. Les Français se disent plutôt favorables à un élargissement de l’ouverture des magasins le dimanche. Alors même qu’ils se révèlent partagés quant au bénéfice d’une telle mesure sur l’emploi. Et qu’ils y voient une atteinte au droit au repos dominical et un obstacle pour la vie familiale et sociale. Mais, estiment les mêmes sondés, cette évolution serait en adéquation avec les modes de vie actuels.
Tout est dit ! Le renoncement progressif à l’obligation du repos dominical irait dans le sens de l’Histoire… Encore heureux qu’on ne nous le présente pas comme une conquête des droits de l’homme.
Le rapport Attali sur la libération de la croissance, rendu public la semaine dernière, préconise une telle mesure dans sa « décision » n° 137. Et cela, sans tenir aucun compte de l’opinion de tous ceux qui, au Conseil économique et social comme parmi les organisations syndicales, les formations politiques ou les représentants des grandes religions, souhaitent que soit préservé, dans notre monde éclaté, ce jour commun de liberté où chacun puisse vivre à sa guise, délivré de l’unique obsession de produire et de consommer.
Il y a quelque paradoxe à entendre le président de la République plaider pour une « politique de civilisation », permettant de dépasser l’individualisme et la frénésie de consommation, et le voir aussi déterminé à faire sauter le verrou du repos dominical. Il y a quelque provocation à solliciter la parole des différentes religions dans nos débats de société, et à refuser de les entendre lorsqu’elles disent leur attachement à un droit défini par la loi, à leurs yeux essentiel. Il y a une forme de cynisme à vanter l’espérance dont seraient porteurs les croyants dans un monde qui désespère, et à soumettre à la concurrence du « gagner plus » ce temps de liberté où nombre d’entre eux peuvent précisément, en Eglise, nourrir leur espérance.
Oui, la France a besoin d’un regain de croissance. Oui, elle doit libérer des énergies nouvelles et, sans doute, oser ici et là la réforme. Mais les 300 décisions de Jacques Attali sur la croissance ne font pas un projet de société. Une communauté humaine a aussi besoin de symboles : le repos dominical est l’un d’eux. Protégeons-le !
L’analyse de Reuters
PARIS (Reuters) – Une majorité de Français se déclare favorable à un assouplissement de la législation sur l’ouverture des magasins le dimanche, révèle un sondage TNS Sofres à paraître dans l’hebdomadaire Pèlerin.
Selon cette étude, 53% des personnes interrogées se disent très ou assez favorables à une telle mesure, tandis que 43% y sont assez ou très opposées. Il y a 4% de sans opinion.
On trouve les plus grands partisans d’un assouplissement chez les jeunes de 18 à 24 ans (72%), chez les commerçants et chefs d’entreprise (58%) et chez les sympathisants UMP (63%).
Y sont en revanche particulièrement défavorables la tranche d’âge de 35 à 49 ans (52% de personnes hostiles), les chômeurs (52%) et les sympathisants du Parti communiste (72%).
Le sondage a été réalisé les 16 et 17 janvier sur un échantillon de 1.000 personnes représentatif de l’ensemble de la population française âgée de 18 ans et plus.
Pascal Liétout