Le Républicain Lorrain, 15 décembre 2007
Il émerge parfois au Parlement des amendements « cavaliers », hors contexte du projet de loi en cours d’examen. C’est le cas de celui adopté dans la nuit de jeudi à vendredi au Sénat dans le cadre du projet de loi sur la consommation et visant à autoriser l’ouverture le dimanche des commerces de détail de vente d’ameublement. Présenté par l’UMP, cet amendement a été soutenu par le gouvernement en raison de son « urgence ». Une urgence surtout soulignée par les grandes enseignes de ce secteur qui cumulent depuis des semaines plusieurs centaines de milliers d’euros d’astreintes en persistant à rester ouvertes le dimanche en dépit de la loi sur le « repos dominical ».
Cette autorisation surprise répond d’abord aux fortes pressions du lobby surnommé « Confokea » qui agite depuis des semaines la menace de suppressions d’emplois en cas de maintien de l’interdiction. Mais elle est aussi un signal politique clair et un ballon d’essai à l’approche d’un débat général sur une déréglementation accrue du travail le dimanche. Vieux de plus d’un siècle, le repos dominical n’est déjà plus un dimanche pour tous. Près d’un quart des Français actifs travaillent le dimanche en fonction des dizaines de dérogations concernant les activités à « feux continus », les zones touristiques ou les périodes de fêtes. Un pas supplémentaire devrait être franchi avec la prochaine conférence sociale convoquée par Nicolas Sarkozy, favorable au travail dominical « sur une base volontaire et payé double ».
Cette perspective promet d’être polémique. Car même si le travail le dimanche a tendance à se banaliser, la crainte est forte parmi les Français de voir progressivement disparaître le seul jour de la semaine pleinement consacré aux activités familiales. Les prétendues vertus économiques du dimanche travaillé, en termes de croissance, sont également remises en cause par les syndicats et les petits commerces s’estimant menacés de mort par une ouverture profitant essentiellement aux grandes surfaces.
Alors que la commission Attali sur la croissance préconise une déréglementation totale, Jean-Pierre Raffarin assure déjà qu’il n’y aura pas de majorité parlementaire pour voter la suppression du repos dominical. Dans ce contexte sensible, la sagesse recommande une démarche pragmatique évitant l’acceptation aveugle du fait accompli et privilégiant l’expérimentation et le retour d’expériences.
Louis BIGOT.