Les magasins d'usine de Roubaix grappillent cinq dimanches par an

L’histoire de la loi Mallié oscille toujours entre Courteline et Kafka.

Ce matin, c’est plutôt tendance Kafka : Jean-Michel Bérard, au nom d’une prétendue « concurrence transfrontalière », vient d’autoriser les deus seuls centres commerciaux de L’Usine et de McArthur Glen à ouvrir dix dimanches par an, créant de fait une concurrence « intrafrontalières » avec les autres commerces, pour qui cette autorisation ne s’applique pas. Par ma chandelle bleue quel foutoire, madame Ubu !

travail dimanche nordLa Voix du Nord – 03-02-10 PAR JULIEN LÉCUYER (AVEC BRUNO TRIGALET)

La préfecture a ouvert une brèche, hier soir, dans le dossier du travail dominical, en créant le premier périmètre d’usage de consommation exceptionnelle dans le Nord, à Roubaix. Le « PUCE » demandé par Pérenchies a en revanche été refusé.

Pas sûr que ses camarades du Parti socialiste lui disent merci. Le maire de Roubaix, René Vandierendonck, avec l’aide du préfet de région, vient en effet de fêler sévèrement le bloc formé autour du refus du travail dominical dans la métropole lilloise.

Jean-Michel Bérard, préfet de région, a annoncé hier soir, par arrêté daté du 1er février, la création du huitième périmètre d’usage de consommation exceptionnelle (PUCE) de France, et le premier dans le Nord, à Roubaix. Avec cette précision importante, l’autorisation ne concerne que les deux centres commerciaux de L’Usine et de McArthur Glen, pour lesquels le conseil municipal de Roubaix avait sollicité une ouverture dix dimanches par an, le 15 octobre dernier. Pour tous les autres commerces, le rideau baissé reste la règle.

Le préfet a motivé sa décision en raison « de la proximité immédiate de la Belgique où il existe un usage de consommation dominicale qui génère de la concurrence sur les commerces implantés dans les deux secteurs géographiques visés et qui attire une clientèle régionale et transfrontalière ». Pile poil donc dans les clous de la loi sur le travail dominical parue au Journal officiel le 11 août.

Le PUCE ne devrait cependant pas bouleverser la donne. Les deux centres commerciaux s’étaient déjà vu octroyer par le conseil municipal cinq dimanches par an. Et les dérogations étaient d’usage pour permettre une ouverture un ou deux dimanches supplémentaires.

Pas de chance, en revanche, pour Pérenchies. Le préfet a refusé le PUCE demandé par le conseil municipal sur l’intégralité de son territoire, « dans la mesure où il ne cible pas de secteurs géographiques bien délimités où seraient concentrés des établissements de vente au détail de biens et services ». « Par ailleurs, poursuit le communiqué, la commune ne compte pas de zone commerciale attirant une clientèle régionale et transfrontalière. En outre, la moitié des entreprises et commerces de proximité bénéficient déjà d’une dérogation de droit à la règle du repos dominical… » Le maire de Pérenchies, Bernard Provo (sans étiquette), a pris acte hier de la décision du préfet. Il s’étonne néanmoins : « Il n’y a pas une distance plus courte entre McArthur ou L’Usine et les magasins belges qu’entre chez nous et Comines ou Warneton. » Plus étonnant encore, le maire de Pérenchies affirme avoir fait l’objet de pressions de la part de la communauté urbaine « pour que nous retirions notre délibération(municipale) au motif qu’en décembre 2008, j’avais voté une délibération communautaire opposée à l’ouverture du travail du dimanche ».

Bernard Provo poursuit : « C’est vrai que j’ai voté cette délibération par discipline de groupe mais, en tant que maire, quand j’ai découvert ce nouveau dispositif, j’ai voulu en faire profiter ma commune. » La position de René Vandierendonck est aussi fragile. Si le premier vice-président de la communauté urbaine s’est personnellement opposé à la loi sur le travail dominical, il a estimé qu’il ne pouvait pas non plus « ignorer la réalité » de la concurrence transfrontalière. Les élus roubaisiens devraient s’en expliquer aujourd’hui, au cours d’une conférence de presse. Cela suffira-t-il à apaiser les camarades ? •

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