La loi qui va abolir le repos du dimanche

Le journal du Pays basque, 11/07/2009 Antoinette PAOLI

Ambiance tendue cette semaine à l’assemblée nationale à l’occasion du débat sur le projet de loi sur un sujet épineux : travailler le dimanche. Un projet qui avait été rangé au placard depuis plusieurs mois, mais revenu sur le devant de la scène politique car il fait parti des réformes de N. Sarkozy.

Les députés se prononceront par vote solennel, mercredi 15 juillet, sur la proposition de loi UMP concernant les dérogations au repos dominical. L’examen du texte a commencé, mardi 7 juillet, à l’Assemblée.

Elle a été présentée dans une ambiance tendue. Plusieurs amendements ont été intégrés au texte, avec l’assentiment du Gouvernement, pour tenter de rassurer les députés UMP. L’un a substitué à la notion de «commune touristique», qui donne lieu à des interprétations contradictoires, celle de «commune d’affluence touristique», plus restrictive.

Le texte permet en effet à tous les commerces de détail de ces municipalités d’ouvrir, sur demande du maire et décision du préfet, tous les dimanches de l’année, sans contrepartie obligatoire pour les salariés. Et c’est là que ça coince.

Quelles sont les zones géographiques concernées par l’ouverture des magasins le dimanche ? Les zones touristiques et thermales ; les «périmètres d’usage de consommation exceptionnel» les «puces» pour les unités urbaines de plus d’un million d’habitants, et les zones frontalières. Autant dire que le Pays Basque rentre en plein pour deux des critères sus-cités. Quelque 500 communes sont concernées, selon le Gouvernement, mais le PS estime leur nombre à 6 000.

Autre mesure adoptée en commission : l’obligation d’une négociation entre les organisations de salariés et les organisations patronales, afin de prévoir des contreparties. Xavier Darcos, ministre du Travail, a défendu un texte qui «protège les salariés», «soutient les entreprises» et «répond aux attentes de la très grande majorité des Français». Un sondage paru dans Libération mardi montre cependant que 55 % se disent contre le travail le dimanche.

Une «arnaque de plus»

Les syndicats «ne sont pas dupes» et «dénoncent une arnaque de plus du gouvernement».

LAB dénonce depuis plusieurs années les pratiques de certaines entreprises du Pays Basque, en particulier dans la grande distribution : «Plus on va vers la côte, plus le travail du dimanche se banalise, et cela depuis plusieurs années, notamment à Hendaye.» explique Eñaut Arramendi, délégué syndical de LAB.

Pas de caddie le dimanche

Un supermarché Champion à Hendaye s’était fait contrôler en 2007 en flagrant délit de travail le dimanche au-delà des heures légales, soit après 12 heures, heure à laquelle les employés doivent quitter leur poste. Même problème au ED d’Hasparren, dans le collimateur des syndicats pour la même raison : «Hasparren n’est pourtant pas une commune touristique», ironise Eñaut, «le magasin ouvre tous les dimanches, hiver comme été, et les salariés sortent généralement à 13 heures au lieu de 12 heures».

Régression

Mme Delopeteguy est secrétaire générale au Syndicat des Services de la CFDT. En tant qu’employée à Carrefour St-Jean-de-Luz, elle mène une guerre acharnée depuis des années contre le travail dominical. Pour elle, la future loi est une régression et risque de saper la lutte en faveur des salariés : «Nous avions obtenu d’ouvrir que deux dimanches dans l’année, à la période de Noël, mais la loi va faire basculer la question du volontariat. Autrement dit, les employés n’auront le choix que de travailler le dimanche». La question du «libre choix» du salarié auquel l’employeur demande de travailler le dimanche reste posée, compte tenu du lien de subordination de l’un à l’autre.

Les syndicats affirment en bloc que «c’est les salaires qu’il faudrait augmenter, et qu’on laisse les gens tranquilles le dimanche».

Mme Delopeteguy dénonce également les pratiques de certains commerces de la rue Gambetta à Saint-Jean-de-Luz, habitués à ne pas respecter la majoration de salaire. Argument démenti par Mme Tortes-Saint-Jammes, Adjoint Délégué à l’économie luzienne qui affirme que la dérogation spéciale et les dimanches payés double sont respectés, en assurant que «nous condamnerons tous les abus». Seule la ville d’Anglet s’est fermement mobilisée contre le travail dominical.

Mais l’argument qui risque le plus de semer le trouble chez les parlementaires de la majorité est celui de la qualité de vie. Le dimanche est un jour fondamental pour la vie de famille, sportive, culturelle ou spirituelle selon de nombreux salariés. Plus question de droite, de gauche, d’ouvriers, de cadres, de jeunes ou de vieux : le dimanche, c’est le jour où l’on veut oublier le boulot, la crise, le chômage.

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