Nouvelles du front judiciaire en Val d'Oise

La rébellion ouverte des grandes enseignes

La société CASTORAMA qui a ouvert ses portes dimanche dernier malgré l’injonction judiciaire et la Loi qui lui interdit d’employer des salariés le dimanche est assignée en liquidation d’astreinte par Force Ouvrière devant le juge de l’exécution le 3 avril prochain.

C’est en effet la seule des quatre sociétés condamnées vendredi dernier a avoir bravé l’interdiction judiciaire dimanche en ouvrant ses portes et en continuant à employer des salariés dans l’illégalité.

FO a également assigné la société LEROY MERLIN devant le juge des référés le 18 avril puisqu’il semble bien qu’il faille, à chaque fois, aller jusque devant le juge des référés pour qu’une enseigne applique la Loi alors même que les autres enseignes sont pourtant condamnées.

Le seul exemple qui semble avoir été retenu par les grandes enseignes est la manière dont le secteur de l’ameublement a tiré profit du fait de son ouverture contre la loi et les décisions de justice pour arriver à obtenir la régularisation de sa situation par une loi sur mesure qui ne donne plus désormais place ni au volontariat ni à une majoration pour les salariés concernés.

Cela donne à réfléchir sur l’Etat de droit où le seul exemple retenu est celui de la violation de la Loi et non son application…

 

La situation concurrentielle du secteur de l’électro-ménager.

Le secteur de l’électroménager, dans un bel ensemble a attendu que les grosses enseignes soient toutes condamnées pour fermer. Cela ne les empêche pas de crier à la concurrence déloyale du fait des effets pervers de la Loi Chatel.

Leur logique est simple : Le secteur de l’ameublement qui constitue une nouvelle dérogation à la règle du repos dominical ne se gêne pas pour vendre d’autres produits, notamment de l’électro ménager. Pourquoi diable les autres enseignes qui vendent de l’électroménager n’auraient t’elles pas le droit de faire de même ?

La réponse est pourtant juridiquement simple. Une dérogation à un principe s’apprécie toujours strictement pour les juges. Le secteur de l’ameublement concerné devrait donc être considéré strictement, c’est à dire ne s’appliquer qu’au commerce de détail spécialisé de meubles.

La nouvelle nomenclature des activités françaises qui vient d’être adoptée devrait aider le législateur. Il se remettra à l’ouvrage au Printemps selon les annonces gouvernementales (après les élections naturellement).

 

L’Etat : aux abonnés absents.

Nul doute que l’expérience de l’amendement Debré déposé à la va-vite, sans concertation, sans attendre les résultats des travaux du Conseil Economique et Social, sans comprendre les impacts et sans mesurer les effets juridiques restera une expérience à ne pas renouveler. Je n’ai jamais eu de réponse d’ailleurs à la lettre ouverte envoyée à Madame la sénatrice Debré en décembre. Je regrette qu’elle n’ait pas rectifié son erreur qu’elle a pourtant publiquement reconnue en renvoyant la responsabilité sur un juriste inconnu qui l’aurait mal renseignée.

Nous n’avons toujours aucune nouvelle de la Direction Départementale du Travail, de l’Emploi et de la Formation Professionnelle du Val d’Oise. Un simple constat.

A ce jour, à ma connaissance, aucun des inspecteurs du travail sur le département du Val d’Oise n’a utilisé le référé dominical.

Seuls des contrôleurs du travail, qui n’ont pas la possibilité d’utiliser le référé dominical et dont le champ d’action se limite aux petites entreprises, ont relevé par constat des infractions qui ont été transmises au Parquet de Pontoise, mais il n’y a pas de date d’audience pour le moment.

Pour mémoire, chaque société concernée risque une amende pénale recouvrée au profit du Trésor Public (de l’Etat) de 7.500 Euros par salarié employé illégalement le dimanche (le délai de prescription est d’un an). Si une enseigne emploie 50 salariés en moyenne le dimanche pendant 52 dimanches, elle risque donc, si les infractions sont relevées, la bagatelle de 19.500.000 Euros d’amende par an.

L’Etat, qui n’est pas sans rappeler régulièrement que ses caisses sont vides, ce qui l’empècherait de financer certaines mesures sociales attendues, en exigeant le respect du Code du Travail, trouverait ici une source intéressante de revenus complémentaires, à des frais de beaucoup inférieurs au développement du réseau des radars routiers : le coût d’un référé dominical est d’environ 150 euros de frais d’huissier.

Que doit on en déduire ? Pas de financement ou pas de volonté ?

Le Préfet du Val d’Oise a refusé à certaines enseignes des dérogations. Les enseignes concernées Boulanger et Castorama ont pourtant continué à ouvrir sans être inquiétées par les services de l’Etat.

Que doit on en déduire ?

L’Etat est capable de mobiliser 1000 policiers et gendarmes dans certains cas sur le département.

Que doit on déduire de sa carence à faire respecter la règle commune lorsqu’il s’agit du Code du Travail ?

La responsabilité de l’exécutif qui ne fait pas appliquer la loi me paraît aujourd’hui largement engagée. Il ne peut pas prétendre ignorer une situation dénoncée et autant médiatisée.

Quel recours existe t’il aujourd’hui pour qu’un syndicat puisse demander l’application de la Loi ?

Maître Vincent Lecourt

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