Ouverture dominicale : faut-il également ouvrir les librairies la nuit ?

 

 

 

 

Actualitté, 6/5/15

Le SLF en désaccord avec une dérogation généralisée

Adopté hier au Sénat, un amendement propose de généraliser l’ouverture des commerces culturels de proximité, le dimanche et à l’ensemble du territoire. Si la chose fait l’affaire de l’enseigne Fnac, les librairies indépendantes, par la voix de leur syndicat, ne l’entendent pas de la même oreille. 

Entre le PDG de Fnac, Alexandre Bompard, et la librairie indépendante, les intérêts marchands semblent diverger. Alors que le premier a dû se féliciter de l’adoption de l’amendement en séance, la seconde voit d’un œil plutôt sceptique cette généralisation : « Sur les 3000 librairies françaises, seule une minorité ouvre actuellement le dimanche, là où l’activité ce jour-là le justifie, à savoir à proximité de marchés ou dans des zones touristiques », estime le Syndicat de la librairie française.

Et d’affirmer qu’en aucun cas, la librairie ne serait en demande d’une « dérogation généralisée au repos dominical ». Celle-ci n’aurait en effet aucune justification d’un point de vue économique. 

En effet, l’ouverture dominicale, en dehors des exceptions liées à la présence d’un marché ou d’une zone touristique, n’est pas rentable pour les librairies, commerces à forte intensité de main d’œuvre (deux fois plus d’emplois en librairie que dans les chaînes culturelles, trois fois plus que dans la grande distribution). L’ouverture dominicale entraîne une répartition différente des achats de livres sur la semaine davantage qu’une croissance nette du chiffre d’affaires, le temps de lecture n’étant pas extensible. 

En séance, Éliane Assassi, sénatrice d’Île-de-France, n’avait pas dit autre chose : « La fédération des artisans, le syndicat national des libraires sont aussi opposés à de nombreuses dispositions du texte. Tel est le bilan de la mission d’évaluation du travail du dimanche présenté au Conseil de Paris récemment. Mais ce n’est, hélas, pas une de vos lectures favorites. »

Que la dérogation soit introduite est d’autant plus délicat, selon le SLF, que les sénateurs n’ont proposé aucune définition de ce que pouvaient être les commerces de détail de biens culturels. Et l’on voit poindre à l’horizon le cavalier de l’apocalypse : « La grande distribution qui vend des biens culturels relève-t-elle de cette dérogation ? Les chaînes spécialisées sont-elles également concernées alors qu’elles ne réalisent plus qu’une part minoritaire de leur chiffre d’affaires avec les produits culturels (produits éditoriaux : livres, disques, DVD) », s’interroge le SLF. 

Car si les grandes chaînes, spécialisées ou non, obtenaient cette dérogation, c’est l’effet inverse que l’on observerait. « [L]es librairies se retrouveraient désavantagées par rapport à des chaînes qui pourraient ouvrir le dimanche avec un personnel réduit et des charges inférieures. » 

Et de réaffirmer surtout que la généralisation de l’ouverture dominicale n’apporte par de réelle réponse à une concurrence par rapport à la vente en ligne, « sauf à considérer qu’il faudrait également ouvrir la nuit ! »

Selon les données de l’industrie, il semblerait que la librairie indépendante soit actuellement en progression, tandis que la vente en ligne stagnerait. « Cette évolution prouve que c’est principalement en se distinguant d’Internet et en offrant un service de qualité au niveau de l’accueil, du conseil, de la diversité de l’offre et des animations que l’on peut développer sa clientèle et son chiffre d’affaires », en conclut le SLF.

 

 

 

 

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