Travail du dimanche: Leroy-Merlin le désenchanteur

Huffington Post 02/10/2013 11h30 par Christophe Najdovski Candidat EELV à la mairie de Paris

Travail Dimanche

Branle-bas de combat ! Les grandes enseignes du bricolage, Leroy-Merlin et Castorama, sonnent la charge contre l’interdiction du travail dominical et défient la loi pour, disent-elles, « ne pas pénaliser nos équipes et nos clients ». Ce serait donc par pur altruisme que les chevaliers de la table de bricolage auraient levé leurs armées de salariés et de citoyens bricoleurs. Sus au code du travail archaïque et sus à une loi dite incompréhensible alors qu’elle leur interdit clairement d’ouvrir le dimanche ! Pourtant, pour ne pas pénaliser équipes et clients, n’y aurait-il d’autres moyens que de défier la justice ? Pourquoi en effet contraindre les employés à solliciter un jour de travail supplémentaire pour arrondir leurs fins de mois ? Quant aux clients, sont-ils tant pénalisés si on les prive, un jour par semaine, de la tentation de faire des dépenses ?

La quête de Leroy-Merlin et de Castorama manque ainsi singulièrement de sincérité et il paraît évident qu’ils n’ont d’autre graal que de vendre leur marchandise et d’augmenter leur chiffre d’affaire.

Au-delà de la croisade mercantile de ces chevaliers bricoleurs, le travail du dimanche représenterait également un enjeu pour l’emploi. Certaines personnalités politiques, telle NKM promettant 10 000 emplois supplémentaires – et pourquoi pas 100 000 ? – à Paris grâce à l’ouverture dominicale, ont ainsi allégrement enfourché ce cheval de bataille. Or, l’argument de la création d’emplois est totalement fallacieux. 
Ainsi, en 2008, une étude du CREDOC établissait quatre scénarios d’effets sur l’emploi. Seul un scénario sur quatre prévoyait un bénéfice, très faible, de création d’emplois. Les trois autres scénarios prédisaient en revanche des répercussions négatives, le nombre d’emplois créés dans les grandes enseignes étant inférieur au nombre d’emplois détruits dans les petits commerces. 
Impact sur l’emploi nul ou négatif, intérêt pour les grandes enseignes au détriment du petit commerce, négation des équilibres de vie des salariés, la lutte entamée pour l’ouverture du travail dominical n’apparaît ainsi que pour ce qu’elle est : une énième offensive de libéralisation du travail au profit des plus puissants et au mépris d’enjeux sociétaux qui sont, eux, inquantifiables. 
Avoir un jour de repos commun, permettre aux citoyens de s’affranchir de la consommation, profiter de son temps libre ailleurs que dans les centres commerciaux, est en effet essentiel pour le bien-être de nos sociétés. Le dimanche est le jour où parents et enfants, familles et amis, peuvent se retrouver, le jour où tant de sorties sportives, festives ou culturelles sont organisées. Déconsidérer le dimanche, le banaliser, équivaudrait à rendre plus rares ces moments, à en complexifier l’organisation et, de fait, à porter un grave préjudice à la cohésion et la vie sociales. 
Nous ne voulons pas d’une société frénétique, où les relations humaines seraient sacrifiées sur l’autel du commerce. Nous voulons, un jour dans la semaine, pouvoir respirer, jardiner, faire l’amour, manger, méditer, lire, bricoler (bien entendu), courir, regarder, écouter, marcher, jouer… Souffler… Laisser du temps au temps… Ralentir… Cultiver notre écologie mentale… Laisser les villes se désengorger… Laisser les campagnes s’animer… Une fois par semaine, ce n’est pas de trop. 

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