L'État peut-il imposer le respect d'une loi de complaisance ?

L’actualité du dimanche est marquée par la volonté de Castorama et de Leroy-Merlin de s’affranchir de la légalité.

En toute connaissance de cause,  en l’occurrence le risque d’une amende qui paraîtra lourde au salarié sans retraite chapeau (120.000 euros par magasin ouvert illégalement), ces deux enseignes ont choisi de braver les lois de la République, avec un certain panache, ou un certain mépris, selon les interprétations.

S’ensuit un concert d’indignations : Taubira, Mélenchon, Bayrou, Hamon, Cazeneuve, NKM, Gattaz, tous s’indignent devant cette provocation des bricoleurs du dimanche, et appellent au respect de la loi.

Cependant, les indignés sont-ils davantage irréprochables que les délinquants ?

Force est de constater que la loi Mallié, source des difficultés présentes, est une loi de pure complaisance.

Historiquement, elle a été conçue par le député Mallié, avec la bénédiction du gouvernement de l’époque, pour résoudre le problème local de sa zone de Plan de Campagne, ouverte illégalement le dimanche. Idée de génie : pour supprimer le délinquant, il suffisait de légaliser le délit. M. Sarközy a enfourché ce cheval pour généraliser l’idée, et a contraint le Dr Mallié à revoir sa copie, pour aboutir au dispositif actuel des PUCE, très largement considéré comme un dispositif illisible, et générateur de conditions déloyales de concurrence. Et nous défions quiconque – y compris M Gattaz – de prouver qu’il a été, en création nette, créateur d’emploi. Injuste et illisible, la loi Mallié est de plus inefficace.

"Il y a des magasins qui peuvent ouvrir tranquillement le dimanche et d’autres qui doivent demander des dérogations. Il serait bien que tout le monde soit logé à la même enseigne", a déploré une porte-parole de Castorama.

Le premier devoir de l’Etat consiste à faire respecter la loi par tous, y compris les grandes enseignes, et même si la loi est injuste (en attendant de corriger la loi), au risque de créer un précédent fâcheux : une société dans laquelle chacun pourrait prendre ce qui l’arrange dans la Loi deviendrait vite invivable.

Mais le second devoir de l’Etat, tout aussi pressant, tout aussi indispensable, est l’abrogation pure et simple de la loi Mallié (ainsi d’ailleurs que du surréaliste amendement Debré à la LME, dit amendement ConfoKea), comme préalable à une simplification réelle du dispositif législatif encadrant le travail du dimanche, en s’appuyant sur des principes lisibles, équitables, s’appliquant à tous.

Le respect du principe d’un repos hebdomadaire étant admis, il faut maintenir la plupart des dérogations de bon sens existant déjà (services publics, industries à feu continu, commerces alimentaires, etc), complétées par cinq dimanches dérogatoires par an pour tous les secteurs, avec des salaires de 150% pour le travail du dimanche, et supprimer les dérogations de complaisance ajoutées par la loi Mallié. Car en quoi serait-il illégal d’aller acheter un marteau le dimanche, et pas un ballon de foot ? Ou un instrument de musique ? Ou un livre ? De proche en proche, la loi Mallié conduit par effet domino à l’ouverture totale de tous les secteurs.

Ce n’est qu’au prix de cette simplification, et de cette clarification, que la guerre récurrente du travail du dimanche pourra trouver un apaisement. Nous l’attendons tout particulièrement d’un gouvernement dont le Premier ministre, à l’époque, s’était brillamment illustré dans le combat contre l’instauration de la loi Mallié, et restons à sa disposition pour l’aider dans ce travail.

Etienne NEUVILLE
Secrétaire Général du CAD

29/09/2013 

 

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