La bataille continue à Paris sur le travail du dimanche

La Croix, 03/08/2010 10:55

La préfecture vient de refuser la demande de la mairie de Paris de transformer les zones touristiques en « périmètre d’usage de consommation exceptionnelle » (Puce), où le travail dominical est payé double

C’est une nouvelle manche dans une longue bataille. Selon une information du Parisien, confirmée par la mairie de Paris, la préfecture de Paris a envoyé la semaine dernière au maire Bertrand Delanoë un courrier pour lui notifier son refus de changer les règles de l’ouverture dominicale dans les zones touristiques, écrivant un nouveau chapitre dans la partie de ping-pong que se livrent la gauche et la droite sur le sujet.

Résumé des épisodes précédents : entre 1994 et 2005, Paris a créé sept zones touristiques, où seuls les magasins culturels et de loisirs avaient le droit d’ouvrir le dimanche. Au grand dam de la droite locale et de grandes marques, comme Vuitton, qui, depuis des années, dénoncent des situations ubuesques, les magasins de disques ayant le droit d’ouvrir dans ces zones, mais pas les boutiques de parfum ou de luxe.

Un statut spécial pour Paris

Le 9 août 2009, la loi Mallié réformant les règles du travail le dimanche, promesse de campagne de Nicolas Sarkozy combattue par la gauche, est promulguée. Entre autres changements, elle permet à tous les magasins des zones touristiques de faire travailler leurs salariés le dimanche, sans contrepartie salariale obligatoire. 

Elle donne aussi aux maires la possibilité d’étendre ces zones… sauf à Paris, où elle octroyait ce pouvoir au préfet, avant d’être retoquée le 6 août 2009 par le Conseil constitutionnel, défavorable à un statut spécial pour Paris. Depuis lors, le gouvernement et la droite locale plaident pour une extension des zones touristiques à Paris.

En France, « une douzaine » de zones de ce type ont été créées depuis 2009, selon Richard Mallié, le député UMP auteur de la loi. Parmi les propositions défendues pour Paris, celle de la chambre de commerce et d’industrie parisienne, qui plaidait pour une zone à cheval sur la Seine, comprenant les très grands magasins du quartier Haussmann.

Argument : « Alors que Paris subit de plein fouet la concurrence des autres destinations touristiques, cela aurait permis de renforcer les atouts de la capitale », explique Martine Namy-Caulier, élue UMP, qui rappelle que « beaucoup d’enseignes de ces zones paient déjà davantage leurs salariés travaillant le dimanche ».

Refus d’étendre les zones toutistiques

À l’inverse, au terme d’une consultation lancée en septembre 2009, la mairie socialiste de Paris a annoncé en juin son refus d’étendre les zones touristiques. Se fondant sur une étude montrant que 20 % des commerces parisiens sont déjà ouverts le dimanche, soit 12 000 à 15 000 établissements, dont 2 000 le sont toute la journée, ce qui représente « un niveau de service élevé quand on le compare aux autres capitales européennes ».

Bertrand Delanoë a au contraire mis en avant « les risques que ferait courir une telle évolution sociétale aux familles et en particulier aux enfants », dans une ville où 26 % des foyers sont monoparentaux. 

Le maire socialiste s’est en revanche montré ouvert à la possibilité d’autoriser « cinq à huit ou dix » ouvertures dominicales par an pour les grands magasins, alors que la loi n’en autorise aujourd’hui que cinq. Il a aussi dénoncé la multiplication, depuis la loi Mallié, des ouvertures illégales de supérettes, au-delà de l’horaire de 13 heures désormais autorisé pour les commerces alimentaires.

Un paiement double des heures dominicales

Mais, pied de nez à Nicolas Sarkozy, qui avait promis que le travail du dimanche serait proposé sur la base du volontariat et payé double, il a aussi demandé la transformation des zones touristiques en « périmètre d’usage de consommation exceptionnelle » (Puce). 

Créé par la loi Mallié, ce nouveau statut, qui permet désormais à 16 centres commerciaux d’ouvrir légalement tous les dimanches, conditionne cette ouverture dominicale au volontariat des salariés et à un paiement double des heures dominicales. « En refusant de permettre le classement en Puce, la préfecture de Paris montre bien que la promesse présidentielle n’était qu’un leurre », réagit Joseph Thouvenel, en charge de ces questions à la CFTC. Une réaction qui ne manquera pas de plaire à Bertrand Delanoë.

Nathalie BIRCHEM

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