Fillon persiste et signe sur le dimanche

François Fillon explique dans cet intéressant interview donné au Monde qu’il ne voit aucun lien entre le passage en force de la loi sur le travail du dimanche (et accessoirement les affaires Mitterrand et Sarkozy junior) et la baisse importante de popularité du Président. On l’a connu plus clairvoyant !

fillon et sarkozy[… ] Comment expliquer à mi-quinquennat que le président de la République soit si bas dans les sondages ?

Il faut regarder cela sur la durée. Hier le président américain perd deux élections partielles, nous, nous les avons gagnées. Le président de la République a engagé un train de réformes sans précédent, le plus important depuis 1958. Il n’est pas anormal qu’il y ait des interrogations, des critiques. C’est une telle rupture! In fine, les critiques disparaissent, lorsque les réformes sont mises en œuvre. Regardez l’université, les régimes spéciaux, le revenu de solidarité active (RSA) et même le travail du dimanche : qui oserait aujourd’hui revenir en arrière? Le bilan se fera à la fin du quinquennat, mais nous avons fait la démonstration que nous avons pu dégripper les moteurs du changement sans remettre en cause le modèle social et culturel français. […]


Entretien complet sur le lien lire la suite.

Nicolas Sarkozy est aujourd’hui à mi-quinquennat. Dans un entretien au Monde, le premier ministre, François Fillon, dresse le bilan des réformes accomplies depuis deux ans et demi et annonce vouloir réduire les déficits à partir de 2011, parallèlement à l’Allemagne. Opposé au conseiller de Nicolas Sarkozy Henri Guaino, il plaide pour un grand emprunt limité, compris entre 20 et 30 milliards d’euros, quand M.Sarkozy donne une fourchette comprise entre 25 et 50 milliards d’euros.

ENTRETIEN : DEPUIS DEUX ANS ET DEMI, NOUS TENONS NOS ENGAGEMENTS.

Le premier ministre appelle à la discipline dans sa majorité en recadrant la secrétaire d’Etat aux sports, Rama Yade, et l’ancien premier ministre,Jean-Pierre Raffarin. M.Fillon confie que le renvoi de Jacques Chirac devant la justice ne lui fait pas plaisir. Il juge anormal que le taux de disponibilité des centrales nucléaires d’EDF soit si bas. Et il nie que Matignon soit un « enfer ».

Votre coup de sang mardi devant le groupe UMP, était-ce contre le système Sarkozy ?

Ce n’était pas un coup de sang. La Ve République, ce sont des institutions très subtiles qui ne fonctionnent que si chacun est à sa place. Je m’efforce de rester à la mienne. Le débat doit avoir lieu d’abord dans l’enceinte de la majorité avant de se faire sur la place publique. Je pense être le premier ministre le plus présent auprès du Parlement et du groupe UMP. Ce n’est pas dans la presse que je dois apprendre qu’il y a une interrogation sur le volume de l’emprunt. Le président non plus.

Vous mettez en cause Henri Guaino, le conseiller de Nicolas Sarkozy, qui aurait suggéré cette tribune des parlementaires sur l’emprunt ?

Un parlementaire m’a expliqué que cette démarche avait été accomplie avec le soutien d’une partie de l’exécutif. Je l’ai corrigé en disant que l’exécutif – le président et le gouvernement – n’avait pas tranché cette question du volume de l’emprunt.

Les prises de parole des conseillers de l’Elysée ne vous irritent-elles pas ?

C’est un choix qu’a fait le président de la République que je n’ai pas à commenter. Je pense que le président de la République ne souhaite pas qu’on s’exprime en son nom sur un sujet, l’emprunt, sur lequel lui et moi avons une approche cohérente.

Quel doit être selon vous le montant de l’emprunt ?

Il ne faut pas que la crédibilité française diverge de celle de l’Allemagne. Le montant sera fonction des priorités d’avenir qui seront retenues et de notre capacité d’emprunt supplémentaire. Sur ce sujet, le Trésor évoque un ordre de grandeur de 20 à 30milliards en première analyse.

Lorsque vous dites, à propos de Rama Yade, qu’il faudra tirer les conséquences de son attitude le moment venu, pensez-vous à son limogeage ?

Lorsque l’on est secrétaire d’Etat, on est sous l’autorité d’un ministre. C’est contraignant, mais c’est la règle du jeu. On ne peut pas être au gouvernement et en opposition avec la ligne du gouvernement. Les membres du gouvernement sont porteurs de l’intérêt général, pas seulement des intérêts qui s’expriment auprès de leur ministère.

La démarche des sénateurs, emmenés par Jean-Pierre Raffarin, est-elle légitime?

La méthode est contestable. Le débat sur la taxe professionnelle est difficile. Beaucoup de ceux qui demandent le report de la réforme n’ont pas trouvé la force dans le passé de l’engager. Il y a des marges de négociations au Sénat, mais le gouvernement a posé deux lignes rouges: la suppression de la taxe professionnelle devra être opérationnelle en 2010 et le barème d’imposition sera national, pour ne pas remettre en cause l’avantage donné aux entreprises.

Pourriez-vous engager votre responsabilité sur le texte ?

La question ne se pose pas, mais il y a des lignes rouges qui engagent notre responsabilité.

Comment expliquer à mi-quinquennat que le président de la République soit si bas dans les sondages ?

Il faut regarder cela sur la durée. Hier le président américain perd deux élections partielles, nous, nous les avons gagnées. Le président de la République a engagé un train de réformes sans précédent, le plus important depuis 1958. Il n’est pas anormal qu’il y ait des interrogations, des critiques. C’est une telle rupture! In fine, les critiques disparaissent, lorsque les réformes sont mises en œuvre. Regardez l’université, les régimes spéciaux, le revenu de solidarité active (RSA) et même le travail du dimanche: qui oserait aujourd’hui revenir en arrière? Le bilan se fera à la fin du quinquennat, mais nous avons fait la démonstration que nous avons pu dégripper les moteurs du changement sans remettre en cause le modèle social et culturel français.

Les affaires Frédéric Mitterrand et Jean Sarkozy ne remettent-elles pas en cause un style de gouvernance ?

La dignité avec laquelle les deux ont réagi renvoie leurs procureurs à la réalité de ces polémiques, c’est-à-dire peu de chose.
Tous les ministres qui ont défendu Jean Sarkozy ont-ils eu raison de tenir des propos peu amènes sur la presse? Il ne faut jamais tenir des propos peu amènes sur la presse. C’est inutile. [Rires.]

Souhaitez-vous rester à Matignon après les régionales ?

La question n’est pas de savoir ce que je souhaite. J’ai défendu que, sauf raison politique majeure, une équipe gouvernementale doit durer pour réussir. Aucune équipe soumise à des changements tous les ans, comme cela a été souvent le cas, ne peut réussir. C’est une situation qui n’existe nulle part en Europe.

Regrettez-vous d’avoir théorisé la disparition du premier ministre ?

J’ai écrit que j’étais favorable à un régime présidentiel, qui suppose la disparition du premier ministre. Mais ce n’est pas le choix qui a été fait dans la réforme de la Constitution. Tous ceux qui prétendent que le premier ministre hors cohabitation a imposé ses vues au président de la République sont soit mal informés, soit de mauvaise foi.

ous annoncez chaque semaine une nouvelle dépense.
N’auriez-vous pas intérêt à fixer un cap plus clair et rigoureux sur la gestion des dépenses publiques ?

Du fait de la crise, nous sommes victimes d’un recul de 20% des recettes fiscales. Depuis trois ans, toutes les dépenses de l’Etat sont maintenues à zéro volume, c’est la première fois dans la Ve République et nous allons continuer.

Nous avons engagé un effort de réduction de l’emploi public, qui suscite des critiques, mais qui est indispensable et générera à terme des économies importantes. Nous menons des réformes structurelles lourdes (justice, carte militaire, réforme hospitalière et collectivités locales). Enfin, nous avons une croissance des dépenses maladie réduite de moitié.

Je présenterai début 2010 au Parlement une stratégie de finances publiques qui nous donnera les moyens de descendre en dessous des 3% de déficit à l’horizon de 2014, au prix d’ajustements très importants, puisqu’il faudrait faire un effort de réduction de plus de 1% par an. L’objectif est de progresser parallèlement à l’Allemagne, qui s’est fixé comme objectif un équilibre en 2016.

Allez-vous inscrire l’équilibre dans la Constitution ?

Je crois moins à la contrainte constitutionnelle qu’à une vraie prise de conscience nationale sur les efforts à conduire. C’est ce à quoi je m’engage avec le président de la République. En 2010, nous ouvrirons le débat sur les retraites et nous prendrons des décisions. Nous poursuivrons l’effort de maîtrise des dépenses d’assurance-maladie.

Nous avons à peu près les solutions pour maîtriser les dépenses de l’Etat. Si on a un peu de croissance et que les dépenses de l’Etat n’augmentent pas, cette question peut être réglée assez vite. Et je souhaite qu’elle le soit en partenariat avec les collectivités locales, qui doivent partager cet effort.

C’est douloureux… Il faut que chacun regarde ce qui se passe dans le monde. Notre principal concurrent, c’est l’Allemagne, qui perd beaucoup moins de parts de marché au profit de l’Asie. L’industrie automobile française en 1981 avait 10% du marché mondial. Elle en a aujourd’hui 5%. Dans le même temps, l’industrie automobile allemande s’est maintenue, passant de 11% à 10%. Il est donc indispensable de conduire ces réformes pour que notre industrie soit plus compétitive.

Allez-vous prendre des initiatives franco-allemandes ?

Nous avons le projet de conduire de manière cohérente nos politiques financières et économiques. L’Allemagne a fait le choix très courageux de soutenir la croissance avec une politique de baisse d’impôts, qui valide d’une certaine façon les choix que nous avons faits d’accepter des déficits un peu plus importants pour soutenir la croissance. Il faut qu’on garantisse, à l’avenir, une meilleure convergence des politiques française et allemande.

Areva est confronté à un problème de fiabilité du système de sécurité de son réacteur EPR. Un tiers des centrales d’EDF sont arrêtées. Maintenez-vous votre confiance dans leurs dirigeants ?

Les dirigeants ont la confiance de l’Etat. Il n’y a pas de problème Areva. Nous avons un dialogue permanent entre autorités de sûreté nucléaire et exploitants d’installations. Nous sommes en train de construire les réacteurs de nouvelle génération. Il est absolument normal qu’il y ait un débat: la nouveauté, c’est que ce débat est transparent.

La technique de l’EPR n’est pas en cause. Il y a nécessité d’une extrême rigueur en termes de sûreté. Je n’ai aucun doute sur le fait que les problèmes posés par l’Autorité de sûreté vont être résolus et que les réacteurs français vont figurer parmi les meilleurs et les plus sûrs du monde.

S’agissant d’EDF, il n’est pas normal que le taux de disponibilité de nos centrales soit tombé à 80%. Ce n’est pas seulement un problème technique, mais d’organisation et de calendrier de maintenance.

Soutenez-vous M.Van Rompuy pour devenir président du Conseil européen ?

La France n’a pas encore de candidat officiel. Le Conseil européen devrait trancher vite, désormais. La France et l’Allemagne auront un candidat commun.

Craignez-vous une hausse des taux d’intérêt ?

Non. Il n’y a pas de pression inflationniste. Je m’en suis entretenu mardi avec Christian Noyer, le gouverneur de la banque de France.

Allez-vous réviser à la hausse vos prévisions de croissance?

Sans doute, mais rien ne presse.

Etes-vous candidat à la Mairie de Paris ?

Je m’interdis d’avoir des projets. Cela voudrait dire que je ne suis pas complètement à la tâche qui est la mienne. Nous avons tous des désirs, notamment de vivre une vie plus normale. Mais je m’inscris en faux contre l’idée que Matignon est un enfer. Servir son pays est un privilège.

Propos recueillis par Françoise Fressoz, Sophie Landrin et Arnaud Leparmentier

Laisser un commentaire