Quand Jérôme Dubus chronique pour la Pravda

Il est des tentations auxquelles on ne résiste pas, comme celle de publier le texte paru sous la plume de Jérôme Dubus, conseiller de Paris et vice-président du groupe UMP, s’il vous plaît. Non pas dans la Pravda des années 50, pour lequel on jurerait qu’il a été écrit, mais le journal Le Monde, dont on peut regretter qu’il laisse publier des opinions aussi manifestement erronnées.

Cet excellent homme commence par nous faire peur : c’est à cause de « la crise », pour l’occasion transformée en Mère Fouettarde, qu’il faut faire travailler les salariés le dimanche. Pas de pot, les économistes, même à l’UMP, sont unanimes à dire que le travail du dimanche n’apportera strictement rien à la croissance.

Ensuite, dans un grand élan misérabiliste, il nous dit que c’est la faute à Internet : puisqu’Internet est ouvert le dimanche, il fallait bien ouvrir Casto, Ikea, et Leroy-Merlin tous les dimanche ??? Comprenne qui pourra. Si M Dubus poursuit sa « logique », il faudrait d’ailleurs qu’il milite pour l’ouverture de ces magasins la nuit, puisqu’Internet fonctionne en permanence. A moins qu’une nouvelle HADOPI ne vienne à en interdire l’usage aux insomniaques ?

Attendez ! C’est pas fini !

Après, il nous raconte qu’il fallait absolument que Paris s’y mette, parce que Paris était vraiment une capitale ringuarde, et que pour aller acheter une petite tour Eiffel qui clignote, ces pauvres japonais étaient obligés d’aller à Londre ou Madrid ! Manque de pot, il nous dit dans le même paragraphe que Paris est la première destination mondiale. Hé oui, M Dubus, même si Ikea est fermé le dimanche, Paris n’a pas eu besoin de la Loi Carabistouille pour devenir la première destination touristique du monde, et ce n’est pas la possibilité offerte aux Chinois d’acheter un canapé Conforama (Made in China) le dimanche qui en renforcera l’attractivité ! (M. Dubus a « oublié » de dire qu’avant la Loi Carabistouille, 7 zones touristiques bénéficiaient à Paris d’autorisation d’ouvertures dominicales).

Au passage, petite digression démagogique, il faut travailler le dimanche parce que « l’UMP ne veut pas augmenter les impôts ». Manque de pot (mais pas manque d’impôt), toutes les satistiques, disent le contraire : la pression fiscale ne cesse d’augmenter en France, l’UMP étant passée maître pour supprimer un impôt pour en créer dix nouveaux.

Attendez, le meilleur est pour la fin !!

Le Dubus (tiens, je vais appeler mon caniche comme ça) nous explique ensuite qu’il s’agit de « proposer une offre commerciale diversifiée le dimanche, tout en garantissant le respect des droits des salariés concernés ». Là, les salariés concernés apprécieront, puisque le passage en zone touristique, s’il avait lieu, les contraindrait, sans aucune compensation salariale ni de volontariat, à travailler le dimanche sous peine de licenciement !

Et pour ce qui est de l’offre diversifiée, notre Dubus nous explique que le Maire doit absolument ouvrir le Boulevard Haussmann et l’Opéra, entre autre, lieux où se situent les galeries Lafayette, la Samar, Confo, le BHV, tous détenus par des groupes proches du pouvoir. On voit que la « diversité » est bien cadrée ! Mais la ficelle un peu grosse.

Le Monde, 25/09/09

« Travail dominical : un atout pour Paris… et les Parisiens » (le Monde.fr)

par Jérôme DUBUS, Conseiller de Paris, Vice-président du groupe UMP

Inimitable pays que le nôtre ! Alors que le monde connaît une crise financière et économique sans précédent, le grand débat qui a animé la France cet été fut celui de l’ouverture des commerces le dimanche. La question a été quasiment réglée partout en Europe sauf dans notre pays. Le sacro-saint dimanche non travaillé ne pourrait-il survivre qu’en France ?

La loi voulue par Nicolas SARKOZY (tiens, et nous qui croyions benoîtement qu’il s’agissait d’une loi d’initiative parlementaire ? Aurions nous été dupés par le Dr Carbistouille, ou M. Dubus affabulerait-il ? NDLR), et votée par le Parlement, met fin à cette exception et adapte notre pays aux nouveaux modes de consommation. Il était temps : le développement de la consommation sous toutes ses formes, notamment électronique, imposait de transformer  un régime devenu injuste pour les commerçants, incompréhensible pour les consommateurs et historiquement dépassé. Qui pourrait encore admettre que l’on puisse acheter sur Internet tout le week-end sans pouvoir le faire dans les magasins ? Où était l’égalité ?

Paris a beaucoup souffert de cette législation. Avec 27 millions de visiteurs par an, notre capitale demeure la première destination touristique mondiale. 200.000 emplois directs et indirects dépendent de ce secteur d’activité soit près de 15 % des emplois parisiens. La région capitale draine chaque année 80 % des manifestations internationales qui se tiennent en France : 400 salons et 300 congrès y sont organisés. Voilà des chiffres qui devraient faire réfléchir celles et ceux qui, pour des raisons purement idéologiques, veulent s’opposer ou limiter l’extension des zones touristiques à Paris. Il suffisait de se rendre au départ des Eurostar, gare du Nord le samedi soir, pour voir le manque à gagner pour le commerce parisien entraîné par cette réglementation ubuesque. Il y a en effet déjà plusieurs années que le dimanche à Londres n’est plus une journée morte en matière commerciale. Nos vieux souvenirs d’étudiants, errants dans les villes anglaises le dimanche à la recherche de la moindre activité, relèvent désormais d’un passé bien révolu.

Dans la compétition féroce que se livrent les métropoles pour attirer les flux touristiques mondiaux, l’ouverture des commerces le dimanche est un atout indispensable, notamment pour Paris dont la renommée en matière de mode n’est plus à prouver.

Faut-il laisser Londres, Milan, Barcelone ou Berlin profiter du pouvoir d’achat des touristes étrangers ? Ce serait commettre une faute grave contre Paris mais aussi contre les parisiens eux-mêmes. Car, la crise frappe également durement notre capitale qui ne pourra maintenir son haut niveau de protection sociale qu’en restant dynamique sur le plan économique.

Nous refusons la logique facile et obsolète du recours à l’augmentation systématique des impôts locaux. Déjà, depuis 8 ans, et de manière subreptice, les commerces parisiens ont subi de nombreuses augmentations des recettes dites de «poche » : droits de terrasse, droits de voirie, taxe d’enlèvement des ordures ménagères, taxe sur les enseignes publicitaires, taxe de séjour, rien n’y a échappé.

Les dérogations au travail dominical relèvent d’une toute autre logique : augmenter les chiffres d’affaire pour augmenter les recettes municipales à fiscalité constante. En pariant sur la dynamique de consommation, on peut maintenir un haut niveau de qualité de vie pour les parisiens sans remettre en cause l’attractivité de la capitale en matière d’imposition : une toute autre voie que celle choisie par le Maire actuel.

Il faudra donc que Paris augmente rapidement le nombre de ses zones touristiques actuellement limitées à 7. Cinq nouveaux quartiers centraux devraient faire l’objet d’un examen tout particulier : Beaubourg, le quartier de l’Opéra, le boulevard Haussmann, le boulevard Saint-Michel, et les rues adjacentes des Champs Elysées. Tous sont porteurs d’une nouvelle dynamique économique permettant à Paris de proposer une offre commerciale diversifiée le dima
nche, tout en garantissant le respect des droits des salariés concernés.

Le Maire de Paris, qui s’est toujours opposé aux demandes de dérogations formulées par les commerces déjà situés dans les 7 zones touristiques actuelles (environ 130 demandes par an) prendrait une responsabilité particulièrement grave pour l’avenir économique de la capitale s’il persistait dans son refus actuel.

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