Les députés relancent le travail du dimanche

La Vie 08.07.09 – n° 3332 par Laurent Grzybowski

Le projet de loi sur l’ouverture des magasins le dimanche est de retour cette semaine à l’Assemblée. Il pourrait bien, insidieusement, généraliser le travail dominical.

Au prétexte d’une modeste adaptation de la règle du repos dominical dans les communes et zones touristiques, le gouvernement se lance, pour la quatrième fois, dans une nouvelle bataille parlementaire. Tandis que l’opposition dénonce une « généralisation » masquée du travail le dimanche, la majorité, dont une partie reste réticente, va devoir serrer les rangs pour voter cette réforme chère à Nicolas Sarkozy. Après l’échec des trois premières tentatives, cette nouvelle mouture est présentée comme plus restrictive. Elle comporte deux volets.

Le texte légalise la situation des zones frontalières, comme à Lille, et des agglomérations de plus d’un million d’habitants ayant des « habitudes de consommation » le dimanche : Paris et Marseille, mais pas Lyon, où de nombreux élus y sont hostiles. Pour ces zones, la proposition de loi consacre le principe du repos dominical et impose, à moins d’accords préexistants, des contreparties aux salariés : volontariat, doublement de salaire, repos compensateur. Le second volet du texte, consacré aux « ­communes et zones touristiques et thermales », est le plus critiqué. Selon l’opposition, il élargirait trop les possibilités d’ouverture le dimanche. Dans ces sites, qui pourront être classés « touristiques » par le préfet à la demande du maire, les dérogations deviennent « de droit » pour tous les commerces, et de manière permanente. C’est-à-dire qu’elles ne sont plus liées à la saison touristique. Mais, surtout, aucune contrepartie n’est prévue, ni volontariat, ni doublement de salaire. L’opposition, qui crie à l’« escroquerie sociale », dénombre plus de 6 000 sites concernés, alors que le gouvernement n’en compte que 500.

Les syndicats sont vent debout, comme lors des précédents débats parlementaires. La CFTC exige une étude d’impact visant à « cerner les risques pour le petit commerce non alimentaire et les conséquences sur l’emploi ». La CGT dénonce « un texte qui, d’exception en dérogation, conduira à la généralisation du travail du dimanche et ceci, malgré les affirmations des promoteurs de la loi ». La Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) estime que « le dimanche est depuis longtemps un jour permettant de consolider la cellule familiale et de privilégier les activités culturelles et sportives ».

Si les évêques de France n’ont pas pris position sur cette quatrième tentative, le collectif des Amis du dimanche, dont la pétition revendique plus de 83 000 signatures, rappelle son opposition à « un monde transformé en une immense galerie marchande aseptisée » et se réjouit que 55 % des Français, selon un sondage Viavoice, se disent opposés à ce nouveau projet. Le Comité protestant évangélique pour la dignité humaine rappelle que « privilégier les intérêts mercantiles au détriment du lien social reviendrait, une fois de plus, à instrumentaliser l’humain » et dénonce « la manipulation politique du débat » : Nicolas Sarkozy a en effet assuré avoir lui-même fait ouvrir des magasins pendant le récent séjour parisien de la première dame des États-Unis, Michelle Obama, qui voulait faire du shopping un dimanche. Obama à la rescousse d’un président français en mal d’arguments ? Yes, week-end !

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