La Croix : acharnement législatif

La Croix, 7/7/09

Il faudrait, en politique, recourir à la notion d’« obstination déraisonnable », comme on le fait en médecine. Mettre fin à l’acharnement législatif comme, en fin de vie, la loi demande aux médecins de renoncer à l’acharnement thérapeutique. C’est la quatrième version du texte de loi visant à étendre le travail dominical que l’Assemblée nationale examine à partir d’aujourd’hui ! Le gouvernement ne veut pas céder, malgré la coalition des oppositions, laïques – syndicales ou politiques (y compris au sein de la majorité) – et religieuses. Le dimanche, le président de la République ne veut pas se reposer.

De projet en projet, le texte s’est néanmoins rétréci ; il consiste plutôt aujourd’hui en un aménagement de la situation actuelle et permet d’élargir la possibilité d’ouvrir les commerces dans les « zones touristiques ». Il ne s’agit plus là de travailler plus pour gagner plus, car dans ces activités les employeurs n’ont pas toujours les moyens de payer davantage leurs salariés, contrairement aux enseignes de la grande distribution qui, elles, trouvent des volontaires parmi des catégories (étudiants, parents séparés…) qui veulent organiser leur temps de travail différemment et bénéficier de salaires plus élevés.

On peut avoir quelques doutes sur la capacité à contenir durablement le caractère exceptionnel… des exceptions, à endiguer les demandes de dérogation qui ne manqueront pas de se manifester. Et sur la liberté réelle des salariés à refuser de travailler le dimanche. D’autant que l’offre créant le besoin, plus la société s’organisera ainsi, plus le consommateur exigera de pouvoir tout acheter, à tout moment de la semaine et de la journée.

Pour le président de la République, le sujet est éminemment symbolique. Pour lui qui veut réhabiliter la valeur travail, il ne saurait être question de freiner la liberté de vendre et d’acheter. Mais honorer la valeur travail, c’est la mettre à sa juste place, en face des autres aspirations de l’homme à changer de rythme, à se retrouver en famille, à se reposer, à célébrer sa foi, à se cultiver, à s’engager dans la vie associative… Alimentation, santé, sécurité, transports, information : les services à rendre 7 jours sur 7 sont suffisamment nombreux pour ne pas ouvrir les vannes, même à demi.

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