Jacques Remiller : "Un vote peu glorieux…"

Le CAD salue la sagesse de M. Remiller, sagesse que nous avions déjà eu l’occasion d’apprécier sur le dossier du lundi de Pentecôte, et dont les sénateurs feraient bien de s’imprégner.

Communiqués de presse Jacques Remiller, 17/07/09

La majorité doit-elle vraiment se féliciter de l’adoption « sans enthousiasme » de la proposition de loi Mallié (10 députés UMP contre, 15 abstentions et 17 qui n’ont pas souhaité prendre part au vote)?

Sur le fond en effet, le problème est toujours le même. Ce n’est d’abord pas parce que les magasins seront ouverts le dimanche, en plus des autres jours de la semaine, que les Français auront plus d’argent à dépenser!

En ma qualité de membre du groupe d’études sur les marchés, le commerce non sédentaire et le commerce de proximité, j’estime que ce texte risque de briser l’équilibre des territoires en faisant migrer le dimanche vers les grosses agglomérations des clients qui font ordinairement leurs courses en semaine dans les villes moyennes. Une telle mesure va fragiliser encore plus le commerce de proximité auquel les Français sont très attachés.

Le PUCE est un concept qui me laisse perplexe. Il est fondé sur le nombre et l’habitude, c’est à dire que ce qui est délictuel quelque part est légal ailleurs, pourvu que les contrevenants soient nombreux et qu’ils aient l’habitude de contrevenir à la loi. Il va permettre d’abord à Paris et sa couronne, à Lille et Marseille et leurs agglomérations d’ouvrir tous les dimanches, puis ce sera les autres villes, ne serait-ce qu’à cause de la rupture de l’égalité entre les citoyens. Pour l’instant, nous avons réussi à « épargner » l’agglomération lyonnaise, mais pour combien de temps?

Ensuite, il faut faire attention à ne pas réduire les Français au rang de consommateurs. Nos concitoyens peuvent faire un tas d’autres choses le dimanche plutôt que de flâner dans des magasins où tout est fait pour les tenter, et les familles surendettées ne me contrediront pas… Activités sportives, culturelles, religieuses, réunions familiales, ballades, ou même le plaisir de ne rien faire sont la marque même du dimanche et doivent le rester!

Quant aux salariés sensés être les grands gagnants de cette réforme, seront-ils vraiment plus heureux si pour gagner plus il leur faut sacrifier leur vie de famille ou associative? Comment feront-ils garder leurs enfants le dimanche? En faisant travailler les assistantes maternelles ? Car tous ne vivent pas à proximité des grands-parents… Et pourquoi ne pas accorder aux enfants le droit légitime de passer un jour sans école avec leurs parents?

On me dira que beaucoup de nos concitoyens travaillent déjà le dimanche. C’est vrai, mais ils travaillent EN TOUTE LEGALITE pour l’immense majorité d’entre eux, soit au titre de la nécessité, soit au titre de l’utilité, soit au titre de la culture, ce qui n’a rien à voir avec la question de régularisation de situations illégales, ce qui est clairement un des objectifs principaux de ce texte.

Faut-il, parce que certains travaillent déjà le dimanche étendre ces dérogations? Pour l’avenir et l’équilibre de notre société, je ne le pense pas.

Conscients que, malgré de nombreuses oppositions, cette proposition de loi allait être adoptée, nous avons déposé, avec ma collègue Marie-Christine Dalloz, plusieurs amendements.

Il s’agissait principalement :

  • de préciser que la constatation d’usage de consommation vise bien le dimanche, et pas le week-end (ou « fin de semaine ») dans sa globalité,
  • de s’assurer que l’usage de consommation est bien ancien au moment du vote de cette loi, afin que partout en France des centres commerciaux ne se mettent pas à ouvrir en espérant bénéficier du régime dérogatoire,
  • de rendre obligatoire la consultation par le préfet des organisations représentatives des employeurs et des salariés du département, dont la majorité doit approuver la proposition de PUCE.
  • de garantir véritablement la non discrimination à l’égard des salariés qui ne veulent pas travailler le dimanche.
  • et enfin, il nous semble essentiel qu’un rapport soit établi chaque année par le Gouvernement à destination du Parlement afin d’évaluer les conséquences de cette loi sur le plan économique et sociétal et sur les droits des salariés.

Il est bien difficile de donner tous les motifs d’opposition à ce texte en quelques lignes, mais voici les raisons principales qui m’ont poussé à ne pas voter ce texte.

J’espère maintenant que les sénateurs auront la sagesse d’amender au maximum ou de rejeter ce texte qui va à l’encontre de l’intérêt des Français.

Jacques Remiller
Député-maire de Vienne (Isère)

contact presse: Marie Milan 06 63 04 61 09

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