Compte rendu analytique officiel du 8 juillet 2009 : seconde séance

M. le président. La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. En cette fin d’après-midi, après l’intervention d’Alain Vidalies, de nombreuses interrogations doivent se faire jour – non seulement dans la majorité,…

M. Roland Muzeau. C’est sûr !

M. Alain Néri. …mais aussi dans l’esprit de M. le rapporteur…

M. Richard Malliérapporteur. Pas du tout !

M. Alain Néri. … et dans l’esprit des membres de la commission et de M. le ministre du travail.

J’approuve pour ma part entièrement ce que vient de dire Alain Vidalies, et ce que d’autres ont dit avant lui. Nous sommes dans une logique de démantèlement du droit du travail et des droits des salariés. Voilà qui est grave.

Votre proposition de loi met en cause une partie importante des liens sociaux qui unissent nos concitoyens. Sur le plan économique, votre proposition ne servira à rien. Votre maître à penser, M. Sarkozy, parlait de « travailler plus pour gagner plus » – on incite d’ailleurs les salariés à travailler plus, mais où a-t-on vu qu’ils gagnaient plus ?

Vous nous dites aujourd’hui de consommer plus. Mais pour consommer plus, chers collègues de la majorité, encore faudrait-il avoir en poche de quoi consommer davantage ! Or qui peut aujourd’hui affirmer raisonnablement devant l’Assemblée qu’il n’y a pas aujourd’hui en France une baisse catastrophique du pouvoir d’achat d’un grand nombre de nos concitoyens ?

Monsieur le ministre, si vous aviez la volonté d’aider les plus modestes à accéder à la consommation, on pourrait peut-être vous suivre dans votre raisonnement. Mais vous aviez l’occasion de donner à un certain nombre de nos concitoyens la chance de disposer d’un pouvoir d’achat supplémentaire : vous pouviez donner un coup de pouce au SMIC.

Mais vous avez refusé ! Vous avez refusé de donner à un certain nombre de nos concitoyens le droit de consommer plus – et pourtant, ils en avaient bien besoin.

Quant aux créations d’emplois – je vois bien que ce n’est pas votre problème, puisque vous discutez avec M. Darcos, mais nous, c’est bien notre souci – votre proposition ne créera pas d’emplois, et vous le savez bien.

M. Richard Malliérapporteur. Je n’ai jamais dit le contraire, monsieur Néri.

M. Alain Néri. Vous ne créerez pas d’emplois, car il n’y aura pas d’augmentation de la consommation – dès lors que les gens pourront consommer le dimanche, ils ne consommeront pas le lundi. Vous allez peut-être être obligés de demander la fermeture des magasins le lundi et le mardi, puisqu’ils seront ouverts le dimanche.

Votre argumentation ne tient donc pas.

Monsieur Darcos, vous étiez ministre de l’éducation nationale.

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Et dans ces fonctions, je vous ai déjà souvent entendu. (Sourires)

M. Alain Néri. Eh bien, nous allons continuer l’échange.

Vous aviez dit qu’il fa
llait absolument libérer le samedi, pour que les familles puissent éduquer leurs enfants, pour que ceux-ci aient une véritable vie de famille puisque, le samedi, les parents ne travaillent pas.

Monsieur le ministre, c’était peut-être une bonne idée – encore que j’aurais souhaité que vous envisagiez qu’on puisse quand même instruire les enfants le mercredi : peut-être pourriez-vous conseiller à votre successeur de revenir aux neuf demi-journées et de faire en sorte que l’on puisse avoir le mercredi matin des activités éducatives, sous le contrôle de l’Éducation nationale.

M. Xavier Darcos, ministre du travail. Je ne l’ai jamais interdit !

M. Alain Néri. Vous dites, monsieur le ministre, qu’il est très important que les familles agissent pour l’éducation des enfants. Il est vrai que vous n’avez pas rencontré un grand succès quand vous avez milité pour cette action éducative – mais au moins avez-vous essayé. Pensez-vous que ce sera encore possible si les parents travaillent le dimanche ?

Il faut garder à l’esprit cette question de l’éducation et souligner l’importance de l’action des familles.

Vous savez parfaitement que, le dimanche – et j’espère qu’il en va dans vos communes comme dans celles du Puy-de-Dôme –, il y a de nombreuses activités culturelles, sportives et éducatives. Il est souhaitable que, lorsque les enfants pratiquent de telles activités, les parents puissent les accompagner et participer.

Mme Catherine Génisson. Très bien !

M. Alain Néri. Allez-vous priver un certain nombre de nos concitoyens d’activités sportives qui se déroulent souvent le dimanche parce qu’ils seront, eux, contraints de travailler ?

Vous devez réfléchir à cette question, monsieur le ministre. En effet, à une époque où l’on parle beaucoup du lien social, ouvrir les magasins le dimanche, c’est participer à rompre cet indispensable lien social !

Imaginons, monsieur le ministre, que votre proposition de loi débouche sur une augmentation de la consommation.

M. Jean Mallot. Admettons !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C’est impossible !

M. Alain Néri. Aujourd’hui, pour consommer, je vous le disais tout à l’heure, il faut avoir un peu de monnaie dans sa poche. Si vous incitez à la consommation un certain nombre de nos concitoyens qui n’en ont pas les moyens, je crains que vous ne contribuiez à leur surendettement ! Nous devrons alors de nouveau faire face au surendettement lié au crédit à la consommation pour l’alimentation. En effet, certains de concitoyens ne peuvent plus subvenir à leurs dépenses alimentaires normales sans recourir au crédit à la consommation. Nous aurons l’occasion de discuter de ce sujet.

Enfin, et certains collègues l’ont souligné, chacun doit avoir la possibilité de pratiquer sa religion. Or cela a effectivement souvent lieu le dimanche.

Monsieur Mallié, vous présentez la quatrième mouture de votre proposition de loi. Vous avez donc déjà fait quatre actes de contrition, faites le dernier : retirez votre texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Roland Muzeau. Très bien !

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