Interrogations sur le travail du dimanche dans les commerces

Le Journal du Pays Basque, 23/12/08 – Yann Emmanuel


La CGT distribue des tracts contre le travail du dimanche à St Jean de Luz

Alors que l’examen de la loi sur le travail du dimanche a été reporté à la mi-janvier, le recours à celui-ci est très usité en cette période de fêtes, particulièrement sur la zone d’achalandise du BAB et à St-Jean-de-Luz, classée zone d’exception touristique.

Ouvertures sur le BAB

À Carrefour Anglet, le magasin a été ouvert deux dimanches les 14 et 21 décembre. La direction de l’hypermarché demandait trois ouvertures. Les salariés de Carrefour, rejoints par ceux de Castorama et de Casino sont intervenus auprès du maire Jean Espilondo, pour refuser celles-ci, ce qu’il a fait concernant celle du 28 décembre. «Les ouvertures du dimanche vont à l’encontre de la vie familiale des salariés» explique Viviane Dichary, déléguée CFDT à Carrefour «de plus il faut y rajouter les frais de garde des enfants, les trajets etc. Cela remet en cause les activités sportives et culturelles». «Si aujourd’hui c’est généralisé, les salariés doivent prendre conscience que le patronat ne paiera plus comme aujourd’hui 200 ou 300 %» (ce qui est le cas à Carrefour). Pour la déléguée, le dimanche ne constitue qu’un report du chiffre d’affaires de la semaine «Quand on a 100 euros en poche pour la semaine on ne va pas dépenser 101 euros le dimanche» souligne-t-elle. «De plus, derrière ce sont d’autres secteurs qui doivent travailler : entreprises de nettoyage, de gardiennage, de transports… Dans celles-ci les salariés ne sont payés que 20 % de plus» argue la déléguée. La CFDT demande des augmentations de salaires pour éviter ce qu’elle qualifie de «volontariat forcé» due à la précarité des salariés.

St Jean zone d’exception

À St-Jean-de-Luz, l’exception est déjà la règle. La directive départementale du 10 décembre 2007, réglementée par le Préfet des Pyrénées-Atlantiques et la Direction départementale du travail, a été prise unilatéralement en l’absence d’accord entre les partenaires sociaux. Elle définit une zone d’exception touristique au droit du travail, en autorisant les commerces luziens à ouvrir leurs portes 42 dimanches par an (sur 52), dans les mêmes conditions pour tous les commerçants. Les salariés doivent être payés double ce jour-là et bénéficier d’un jour de repos en semaine. En 2000, la mairie de St-Jean-de-Luz avait pris un arrêté permettant d’ouvrir les magasins tous les dimanches, mais qui a été retoqué par la Direction départementale du travail.

Action de la CGT rue Gambetta

Hier dans la cité corsaire, à la réaction des commerçants, on aurait pu penser que «les rouges» étaient revenus. À défaut de couteau entre les dents, c’est habillés en Père Noël qu’une vingtaine de militants de la CGT ont distribué des tracts rue Gambetta contre le travail du dimanche. «On a choisi St Jean car c’est un bon exemple de ce que veut imposer le gouvernement» souligne Christophe Punzano, salarié CGT du commerce d’une enseigne du BAB. «C’est une mesure purement idéologique qui vise à la déréglementation totale» argue le syndicaliste.

Le cortège est pris à partie par 3 personnes se présentant comme des salariés, et qui montrent 80 signatures «de salariés» pour l’ouverture. Ceux-ci démentent être manipulés par leurs employeurs : «On veut plus de flexibilité et la liberté de travailler» argue Yvan Garcia, salarié dans la rue Gambetta. La discussion est vive et tourne à l’invective avec les syndicalistes, alors que les commerçants refusent vivement les tracts distribués par les salariés.

Christophe Punzano rejoint la CFDT sur la nécessité d’ouvrir des négociations sur les salaires : «les salariés ont besoin d’argent. Si les salaires étaient mieux payés en semaine, personne n’aurait besoin de venir travailler le dimanche» conclut le syndicaliste.

L’examen de la loi sur le travail dominical reporté au mois de janvier

Après avoir soulevé l’opposition frontale des partis de gauche et des syndicats, c’est au sein même de la majorité présidentielle qu’apparaissent les fissures sur le projet de loi sur le travail dominical. Du coup, le gouvernement, après un débat virulent à l’Assemblée nationale, a décidé de reporter l’examen de la loi Mallié à la mi-janvier et a annulé les sessions prévues à cet effet. Le projet de loi, tel qu’il est à ce jour, légalise les pratiques illégales d’ouverture du dimanche et permet aux maires d’autoriser l’ouverture dans sa commune huit dimanches par an (contre 5 aujourd’hui). La loi prévoit le doublement du salaire ces jours-là, mais uniquement pour les entreprises ne bénéficiant pas d’accords collectifs. Une disposition très contestée par les syndicats de salariés. Autre disposition qui fâche, celle de donner au Préfet les pleins pouvoirs pour ouvrir les dimanches, sans passer par l’avis du maire, dans les zones dites «touristiques».

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