Travail le dimanche : vers un projet allégé ?

Nous émettons les plus expresses réserves sur l’intention du gouvernement qui serait de « ne pas généraliser le travail du dimanche ».

En effet, c’est une tactique classique que de dire que l’on ne veut faire qu’une « très modest chose », pour faire passer un texte qui est le cheval de Troie des évolutions futures. Comment croire aux « intentions modestes » d’un gouvernement quand le chef de celui-ci lance « vas-y à fond » à Luc Chatel, ou que deux ministres se déplacent en personne pour soutenir les déliquants économiques de Thiais ou Plan de Campagne.

Cet article note la proposition du député vert François de Rugy, qui demande la création d’une commission d’enquête parlementaire pour qu' »avant de changer la loi » on fasse « un bilan précis avec tous les acteurs concernés, à commencer par les salariés et les commerçants« . Réfléchir avant d’agir.

LCI – O. L. avec agences – le 12/11/2008

  • Malgré les déclarations musclées de Nicolas Sarkozy, le gouvernement de François Fillon ne veut pas généraliser le travail le dimanche.
  • La vive opposition de certains députés UMP a semble-t-il eu raison d’un texte plus ambitieux.

« Le travail le dimanche » est devenu à tel point un des chevaux de bataille de Nicolas Sarkozy que les caricaturistes se plaisent à le présenter comme un sketch à succès du chef de l’Etat, rappelant à loisir l’anecdote du président allant faire ses courses sur les Champs-Élysées. Les leaders de l’UMP ont pourtant tendance ces derniers jours à vouloir freiner des quatre fers sur le sujet. En cause : les fortes réserves au sein de la majorité, en particulier du côté des députés ruraux.
 
Le gouvernement ne veut donc pas généraliser le travail le dimanche mais simplement réserver cette possibilité à certaines zones, notamment touristiques, ont précisé mercredi le Premier ministre et le ministre du Travail. Dans un entretien avec les lecteurs du Parisien, François Fillon souligne que cet assouplissement « est un sujet très controversé« , y compris au sein de sa famille politique.  « Notre idée consiste à réserver les autorisations de travail le dimanche à quelques secteurs, où les gens travaillent déjà le dimanche« , explique-t-il. « Ce ne sera pas une généralisation du travail le dimanche mais son maintien sur des secteurs très précis: le coeur de Paris, quelques grandes zones touristiques« , ajoute-t-il. »Cela permettrait une expérimentation en vue de répondre à des besoins nouveaux« , poursuit François Fillon.
 
Volontariat et rémunération doublée
 
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a déclaré de son côté sur Canal+ que 3,5 millions de Français travaillaient déjà tous les dimanches et que sept millions le faisaient occasionnellement. « Ça ne voudra pas dire que tout le monde travaillera tous les dimanches bien évidemment, mais qu’il y a des zones touristiques, où il faut mieux définir les choses, et des grandes zones d’attractivité commerciale, je pense à l’Ile-de-France, aux Bouches-du-Rhône avec Plan-de-Campagne« , a-t-il ajouté. Selon lui, l’assouplissement se ferait suivant deux principes: le volontariat et une rémunération doublée là où le travail le dimanche n’est pas déjà en vigueur.
 
Le sujet avait été discuté il y a une semaine par les députés UMP et leur président, Jean-François Copé, avait alors reconnu que ses troupes n’étaient pas encore « vraiment au clair« . Les avis sont ainsi « très différents« , notamment entre élus ruraux et élus urbains ou encore entre ceux à sensibilité démocrate-chrétienne et les libéraux. Au printemps dernier, le député UMP Richard Mallié – élu des Bouches-du-Rhône, dans la circonscription abritant Plan-de-Campagne, l’une des principales zones commerciales en France – avait déposé une proposition de loi prévoyant une « dérogation au repos dominical » qui serait expérimentée pendant « cinq ans » dans certaines « régions agglomérées« .
 
Entre Dieu et le tiroir-caisse
 
Face à l’hostilité de nombreux élus UMP à cette expérimentation, prélude selon eux à une généralisation du travail dominical, le gouvernement avait choisi la prudence en mettant ce texte sous le boisseau. Mais le débat a été remis sur le tapis la semaine dernière quand le chef de l’Etat a demandé aux parlementaires de se saisir « maintenant » et « sans tabous » du texte, qui sera toutefois réécrit dans les semaines à venir dans le cadre d’un groupe de travail UMP. « Nous sommes invités à la coproduction législative… Nous allons travailler d’arrache-pied » et « trouver une solution » avant la fin de l’année, avait  assuré Jean-François Copé, le gouvernement ayant prévu d’inscrire le texte à l’agenda du Parlement début 2009.
 
Le principe de l’expérimentation est désormais abandonné et, devant le groupe UMP, Richard Maillé a évoqué plusieurs pistes: « ouverture possible, pour tous les commerces de détail, dans les zones touristiques« , « dérogations accordées par le préfet » ou le président d’agglomération ou le maire « dans les grandes agglomérations » et « ouverture des commerces alimentaires jusqu’à 13 heures« . Des propositions fraîchement accueillies par ses collègues qui s’appuient sur la tradition chrétienne de la France ou la volonté de défendre le petit commerce.  L’ex-ministre Christian Jacob a souligné qu’il fallait prendre garde à « un enchérissement du coût de la consommation » et veiller à « l’égalité des droits » en termes de compensations financières entre tous ceux qui travaillent le dimanche. « Les valeurs de la France sont d’inspiration chrétienne et le dimanche doit conserver son statut particulier de repos hebdomadaire, un jour qui permet à la famille de se retrouver« , a estimé le député Jérôme Chartier. « Même si on n’arrive pas à un résultat glorieux, il faut régler le problème d’ici à la fin de l’année« , a confié, pragmatique, le vice-président du groupe UMP, Jean Leonetti.

Dans les autres partis, François Sauvadet, président du groupe Nouveau Centre (NC) à l’Assemblée nationale, s’est dit « favorable à une certaine souplesse » concernant l’extension du travail le dimanche. L’accueil est plus frais du côté de Fr
ançois de Rugy (Verts). Pour le député Vert,  « on voit mal en quoi » l’ouverture des magasins le dimanche « permettrait d’apporter le moindre pouvoir d’achat supplémentaire aux Français« . Il a demandé la création d’une commission d’enquête parlementaire pour qu' »avant de changer la loi » on fasse « un bilan précis avec tous les acteurs concernés, à commencer par les salariés et les commerçants« .

 

Laisser un commentaire