Le dimanche s'invite dans le PLF SS 2009

Ce vendredi 310 octobre, l’Assemblée Nationale débattait du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 (PLF SS 2009).

Au cours de ce débat s’est invité le travail du dimanche, avec les interventions notamment de Jacqueline Fraysse, Pierre Gosnat, Jean Gaubert.

Toutes les félicitations du CAD à ces députés défenseurs du principe du repos dominical !

Jacqueline Fraysse :

« Si cette proposition de loi est adoptée, les préfets pourront autoriser tous les magasins situés dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des Bouches-du-Rhône et d’Île-de-France à ouvrir le dimanche, et ce pour cinq ans. Il s’agit tout bonnement de légaliser les ouvertures illégales qu’on y pratique déjà depuis des années, rien de moins… « 

Pierre Gosnat :

« Nul n’est en mesure d’affirmer que l’ouverture des magasins le dimanche ait contribué à relancer l’économie. Le problème qui se pose à nous n’est pas de savoir s’il faut étendre les horaires de travail, mais de faire en sorte que les ménages aient le pouvoir d’achat nécessaire pour consommer.

Dans nos villes, peut-être plus encore en province qu’en région parisienne, l’ouverture des grands magasins le dimanche fait considérablement souffrir les commerces de proximité.

Par ailleurs, à qui fera-t-on croire qu’il appartiendra aux salariés de décider, en tout liberté, s’ils veulent ou non travailler le dimanche ? Ils y seront obligés, au risque de déstructurer leur vie de famille et leur vie sociale. »

Jean Gaubert :

Essayer de faire croire aux gens qu’ouvrir les magasins le dimanche augmenterait leur pouvoir d’achat, c’est vraiment extraordinaire ! Les prix seraient-ils moins élevés le dimanche ? Bien sûr que non, puisque, ce jour-là, heureusement, on doit payer davantage les salariés – pour combien de temps encore, je ne le sais pas.

En revanche, une telle ouverture pourrait provoquer de véritables déplacements de la consommation. Ce n’est pas pour rien que nos collègues dont la circonscription est à proximité de la zone commerciale de Plan-de-campagne se battent : à l’évidence, il s’est créé là un pôle de consommation, au détriment des autres villes de la région. On ne consommera donc pas davantage, mais on consommera ailleurs.

Ensuite, il s’agit de savoir quelle société nous voulons promouvoir. Est-ce une société de seule consommation, ou une société dans laquelle les jeunes pourront avoir d’autres loisirs que celui de lécher les vitrines en enviant leur contenu ?

Enfin, pensez-vous qu’il soit bon que des mères de famille – parce que ce sont souvent elles qui travaillent dans les commerces – soient obligées de travailler sept jours sur sept, avec de surcroît des coupures et des allers et retours ? Croyez-vous que c’est ainsi qu’on réglera les problèmes sociaux ?

 

Transcription des échanges sur le lien lire la suite, ou sur le site de l’Assemblée Nationale.

 

 

Mme Jacqueline Fraysse. [… au cours de la discussion de l’art 71 du PLF SS 2009] la loi réalisant votre rêve libéral de dérogation au travail dominical est d’ores et déjà écrite et fera l’objet, à la demande du Président de la République, d’une niche parlementaire attribuée au groupe UMP afin d’anticiper sa discussion ! Est-ce ainsi qu’il conçoit le renforcement des droits du Parlement, alors même que l’ordre du jour de l’Assemblée est déjà saturé ?

Si cette proposition de loi est adoptée, les préfets pourront autoriser tous les magasins situés dans les zones d’attractivité commerciale exceptionnelle des Bouches-du-Rhône et d’Île-de-France à ouvrir le dimanche, et ce pour cinq ans. Il s’agit tout bonnement de légaliser les ouvertures illégales qu’on y pratique déjà depuis des années, rien de moins… Outre le risque que ferait peser l’ouverture dominicale de ces 11 000 grandes surfaces sur les 300 000 petits commerces de proximité si précieux pour la vie de nos communes, cette mesure affectera encore davantage la qualité de vie des familles, et particulièrement des enfants.

D’ailleurs, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à refuser un assouplissement de la législation sur le travail du dimanche, et ce contrairement à ce qu’a annoncé le ministre du travail sur France 2, le 12 octobre dernier. En effet, ils étaient 63 % à l’approuver l’année dernière, ils ne sont plus que 57 % maintenant. Quant à leur propre souhait de travailler le dimanche, 12 % seulement déclarent être prêts à accepter de le faire aussi souvent que l’employeur le leur proposerait. Mais 41 % déclarent qu’ils le refuseront. Ce qui laisse à penser que, compte tenu de l’inégalité salarié-employeur et de la pression économique ambiante, les salariés qui ne sont pas volontaires seront contraints, c’est une évidence. Travailler tard le soir, la nuit, le dimanche ou les jours de fête n’amuse personne, bien sûr.

Mme Nadine Morano, secrétaire d’État. Ce n’est pas le débat !

Mme Jacqueline Fraysse. Le 13 juillet 1906, l’Assemblée nationale avait voté à l’unanimité la loi instaurant le repos dominical, qui a constitué une avancée sociale significative, au profit notamment des salariés les plus modestes. Sa remise en cause au nom de la modernité est en réalité un formidable recul social qui en prépare d’autres…

M. le président. Veuillez abréger !

Mme Jacqueline Fraysse. …comme la banalisation du travail du dimanche, qui pourrait aussi devenir un jour payé comme tous les autres.

M. Benoist Apparu. Vous êtes hors sujet !

Mme Jacqueline Fraysse. Franchement, tout cela n’est pas glorieux, madame la secrétaire d’État.

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. S’agissant des horaires spécifiques des parents, il faut les prendre en compte et une majoration de l’allocation semble intéressante. Mais, à ce jour, la définition des horaires atypiques n’est pas proposée et nous avons besoin de clarifications.

Pour les couples, il sera aussi utile de préciser que seul l’un des deux parents puisse être concerné par ces horaires et non les deux, comme le prévoit l’article.

(L’article 71 est adopté.)

 

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2007-2008/20080194.asp< /EM>

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 953.

La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le soutenir.

M. Pierre Gosnat. Tout d’abord, si M. le rapporteur s’enthousiasme tant pour le remboursement de la TVA par une chaîne de grandes surfaces, peut-être devrait-il aller jusqu’à proposer sa suppression par l’État pour les produits de première nécessité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

M. Franck Gilard. Avec quel argent ?

M. Pierre Gosnat. Jean-Pierre Brard a dit ce qu’il fallait sur les richesses accumulées par les grandes surfaces !

Venons-en au travail du dimanche, dont notre amendement vise à empêcher la généralisation. Ce serait une mesure néfaste, d’autant que nul n’est en mesure d’affirmer que l’ouverture des magasins le dimanche ait contribué à relancer l’économie. Le problème qui se pose à nous n’est pas de savoir s’il faut étendre les horaires de travail, mais de faire en sorte que les ménages aient le pouvoir d’achat nécessaire pour consommer.

Dans nos villes, peut-être plus encore en province qu’en région parisienne, l’ouverture des grands magasins le dimanche fait considérablement souffrir les commerces de proximité.

Par ailleurs, à qui fera-t-on croire qu’il appartiendra aux salariés de décider, en tout liberté, s’ils veulent ou non travailler le dimanche ? Ils y seront obligés, au risque de déstructurer leur vie de famille et leur vie sociale.

Enfin, rappelons à l’intention de certains collègues ici présents que le dimanche est le jour du Seigneur et que nous ferions bien de le respecter ! (Exclamations et rires sur divers bancs.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ?

M. Jean-Paul Charié, rapporteur. Je tiens à saluer le fait que nous nous soyons les uns et les autres efforcés de rester dans le cadre de la loi. L’ouverture des magasins le dimanche aurait pu faire l’objet de longues discussions, mais le groupe UMP et l’ensemble des groupes ont pris en compte le fait qu’une proposition de loi spécifique déposée par le groupe socialiste ou par Richard Mallié permettra d’en débattre au fond. Le faible nombre d’amendements déposés à ce sujet en atteste.

Personne n’est totalement opposé à l’ouverture le dimanche et personne n’est favorable à sa généralisation totale, il faut le savoir. Dans un département rural comme le mien, si les commerçants ne pouvaient ouvrir le dimanche matin pour travailler pour les clients des résidences secondaires, leur chiffre d’affaires diminuerait de façon significative et ils seraient nombreux à devoir fermer boutique. De même, sur le littoral ou les stations de sports d’hiver, il est indispensable et conforme à l’intérêt des consommateurs comme des salariés qu’il y ait ouverture le dimanche. Mais il n’est pas question de la généraliser.

Nous devrons trouver un délicat équilibre qui soit conforme à la fois à l’intérêt des consommateurs, à celui des travailleurs indépendants et à celui des salariés. Et cette recherche dépassera les clivages gauche-droite – nous le verrons lors d’une séance qui sera entièrement consacrée à ce sujet.

Voilà pourquoi, sans vouloir repousser ce débat ô combien important, nous sommes défavorables à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Dans le cadre de la loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, le Sénat avait souhaité assouplir, pour le secteur spécifique de l’ameublement, les dispositions relatives à l’ouverture le dimanche. Cette mesure a été adoptée parce qu’elle concerne un secteur vraiment très particulier, où il y a une réelle convergence des attentes des consommateurs, des professionnels et des salariés, ces derniers pouvant bénéficier de certains avantages lorsque, sur la base du volontariat, ils travaillent le dimanche.

M. Pierre Gosnat. Oh non, pas sur la base du volontariat !

M. le secrétaire d’État chargé de l’industrie et de la consommation. Comme l’a indiqué le rapporteur, le Gouvernement a souhaité lancer le débat sur ce sujet au sein de la majorité. Un groupe de travail a été constitué, qui réunit des tenants des différents points de vue. En effet, les situations sont très diverses suivant les territoires, et le problème ne se pose pas dans les mêmes termes dans les grandes agglomérations, dans la région parisienne et dans les petites villes : les attentes des consommateurs et les besoins des professionnels n’y sont pas les mêmes. Il convient donc de privilégier des approches spécifiques, et c’est ce à quoi travaille le groupe UMP. Dans l’attente de ses conclusions, le Gouvernement a souhaité ne pas aborder le sujet dans le présent projet de loi. C’est pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Nous n’avions pas, peut-être à tort d’ailleurs, l’intention de relancer le débat sur l’ouverture des commerces le dimanche durant l’examen de ce projet de loi. Mais puisqu’il en est question, je voudrais faire trois observations.

En premier lieu, monsieur le rapporteur, il n’existe pas à ma connaissance – mais je ne sais pas tout – de proposition de loi du groupe SRC sur le sujet. (« Eh non ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

M. Jean-Pierre Brard. Le rapporteur a pris ses opinions pour celles du parti socialiste !

M. Jean Gaubert. Et quand bien même il y en aurait une, je doute qu’elle soit de même nature que celle de l’UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Mme Sandrine Mazetier. Ça, c’est sûr !

M. Christian Jacob. Ne soyez pas pessimistes !

M. Jean Gaubert. Notre position a en effet le mérite de la constance. Essayer de faire croire aux gens qu’ouvrir les magasins le dimanche augmenterait leur pouvoir d’achat, c’est vraiment extraordinaire ! Les prix seraient-ils moins élevés le dimanche ? Bien sûr que non, puisque, ce jour-là, heureusement, on doit payer davantage les salariés – pour combien de temps encore, je ne le sais pas.

En revanche, une telle ouverture pourrait provoquer de véritables déplacements de la consommation. Ce n’est pas pour rien que nos collègues dont la circo
nscription est à proximité de la zone commerciale de Plan-de-campagne se battent : à l’évidence, il s’est créé là un pôle de consommation, au détriment des autres villes de la région. On ne consommera donc pas davantage, mais on consommera ailleurs.

Ensuite, il s’agit de savoir quelle société nous voulons promouvoir. Est-ce une société de seule consommation, ou une société dans laquelle les jeunes pourront avoir d’autres loisirs que celui de lécher les vitrines en enviant leur contenu ?

Enfin, pensez-vous qu’il soit bon que des mères de famille – parce que ce sont souvent elles qui travaillent dans les commerces – soient obligées de travailler sept jours sur sept, avec de surcroît des coupures et des allers et retours ? Croyez-vous que c’est ainsi qu’on réglera les problèmes sociaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, ainsi que sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot.

M. Philippe Folliot. J’ai écouté avec attention notre collègue Gaubert. Je crois qu’il s’agit d’un sujet particulièrement important, même si, bien entendu, il n’est pas au cœur de ce texte.

Nous sommes tous convaincus qu’il est nécessaire de réformer notre pays. Mais pourquoi s’attaquer par principe à ce qui va bien ?

Mme Catherine Coutelle. Nous sommes bien d’accord !

M. Philippe Folliot. S’agissant de l’ouverture dominicale, nous avons trouvé un bon équilibre, et je crains que toute modification ne le remette en cause.

Tout comme plusieurs de mes collègues, je suis choqué par certains arguments. On est à pouvoir d’achat constant ! Si l’on généralise l’ouverture des magasins le dimanche, les gens consommeront dans d’autres lieux, peut-être à d’autres moments, mais certainement pas davantage. Ce n’est pas ainsi qu’on résoudra les problèmes du pays, sinon on l’aurait fait depuis longtemps !

Il faut donc savoir raison garder. Nous aurons l’occasion de revenir plus en détail sur ce problème d’ici quelques semaines, mais, en tout état de cause, le groupe Nouveau Centre est plus que réservé, voire franchement hostile à ce que l’on remette en cause l’équilibre actuel. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre, ainsi que sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. Jean Dionis du Séjour. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 953.

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